La contraction utérine est le moteur essentiel de l’accouchement ; elle permet la dilatation du col et la progression du mobile fœtal dans la filière pelvigénitale.
La surveillance de la grossesse a pour objectif de déceler ou, mieux, de prévenir la survenue prématurée d’un accouchement.
1. Mécanique de la contraction :
1) Microscopie :
L’utérus est formé de couches de fibres musculaires lisses, de tissus conjonctifs et de vaisseaux : ces fibres musculaires lisses sont organisées en trois couches concentriques circulaires et plexiformes.
La cellule myométriale, fusiforme, contient des filaments d’actine et de myosine qui glissent l’un sur l’autre pour entraîner la contraction cellulaire. Ces glissements sont soumis à un contrôle biochimique : les variations du calcium intra-cellulaire.
2) Contrôle électrique :
Le stockage du calcium intracellulaire se fait sur le réticulum endoplasmique de la cellule.
Les variations de concentration du calcium intracellulaire entraînent cette onde de dépolarisation qui peut se propager d’une cellule à l’autre par le système des “gap jonctions”.
3) Contrôle hormonal et pharmacologique de la contraction utérine :
– Les estrogènes contrôlent indirectement la contraction utérine par l’élaboration de protéines contractiles et la synthèse des gap jonctions.
– La progestérone est considérée comme l’hormone du maintien de la gestation ; elle favorise la relaxation de l’appareil contractile en maintenant une faible concentration de calcium libre intracellulaire.
Mais les deux hormones qui contrôlent directement le mécanisme de la contraction utérine sont l’ocytocine et les prostaglandines :
– L’ocytocine, qu’elle soit endogène ou exogène, permet de déclencher et d’entretenir le travail à terme.
La sensibilité de l’utérus à l’ocytocine augmente progressivement avec l’âge gestationnel pour être maximale en fin de grossesse.
Cette sensibilité est liée à l’augmentation du nombre de récepteurs à l’ocytocine sous la dépendance des estrogènes.
Le mécanisme contractile est toujours lié à une augmentation de la concentration du calcium intracellulaire.
– Les prostaglandines induisent la contraction utérine à tout stade de la gestation et en dehors de la gestation. Leur précurseur est l’acide arachidonique stocké dans toutes les membranes cytoplasmiques.
II existe de nombreuses classes de prostaglandines, les principales qui nous intéressent en gynécologie sont les prostaglandines F2-alpha et E2. Leurs sites d’action sont très ubiquitaires : cardio-vasculaires, centrales, bronchiques, digestifs et utérins. Au niveau utérin, l’effet est double : maturation cervicale (principalement pour les prostaglandines E2) et utérotonique (prostaglandines F2-alpha).
La chaîne de synthèse des prostaglandines fait intervenir une enzyme capitale (cyclo-oxygénase) : c’est cette enzyme qui est bloquée par la plupart des inhibiteurs de prostaglandines (acide salicylique et AINS…).
2. Contraction utérine et physiologie :
1) En dehors de la grossesse :
L’utérus est soumis à des contractions fréquentes mais peu intenses, sauf lors des menstruations où les contractions peuvent atteindre 100 mm Hg, ce qui correspond à l’intensité des contractions en cours de travail.
2) Pendant la grossesse :
L’activité utérine est faible jusqu’à 30 SA : des contractions utérines sont fréquentes mais non ressenties par la patiente et seulement quelques contractions utérines plus amples peuvent être perçues (contractions utérines de Braxton-Hicks 10 à 20 mm Hg).
A partir de 30 SA, la contraction augmente en intensité et en fréquence, et c’est dans les 24 à 48 heures précédant le travail que s’installe une activité motrice coordonnée et rythmique.
3) Au cours du travail :
La dynamique utérine maximale doit respecter les critères suivants :
– tonus de base 5 (± 3 mm Hg),
– intensité des contractions : 50 (± 15 mm Hg),
– fréquence : 4 par 10 minutes,
– durée : 1 minute à 90 sec.
Le problème principal est de distinguer :
– l’activité utérine physiologique sans conséquence sur le col,
– de l’activité utérine pathologique avec risque d’accouchement prématuré.
En effet, la prématurité (8 % des accouchements) représente un grave problème : elle représente 70 % de la mortalité périnatale, entraînant des séquelles neuropsychiques sévères.
La sévérité de ces chiffres justifie une campagne de sensibilisation.
Le généraliste peut reconnaître une MAP, en déterminer la sévérité et l’étiologie éventuelle.
La notion de prématurité repose sur 2 critères principaux : enfant né avant 37 SA et de poids inférieur à 2.500 g.
3. Dépistage du risque d’accouchement prématuré :
II est accessible à chaque praticien et repose principalement sur un interrogatoire précis et consciencieux :
– étude des antécédents gynéco-obstétricaux de la patiente (fausse-couche spontanée, précoce, tardive, curetage, accouchement prématuré, chirurgie gynécologique, notion de malformation utérine…),
– étude du contexte socio-économique (travail difficile, longs trajets, escaliers…),
– un examen clinique correct pour dépister une béance cervicale évidente en tout début de grossesse.
Ces facteurs de risque ont tenté d’être récapitulés dans plusieurs tableaux et principalement l’indice établi par Papiernik (Coefficient de risque d’accouchement prématuré (CRAP)).
4. Diagnostic de la MAP et diagnostic de sévérité :
Le diagnostic de MAP repose sur l’association de contractions utérines, de modifications cervicales et parfois d’une RPM.
– La contraction utérine : pour être pathologique, elle doit atteindre le seuil de 1 contraction/10 min ou 5 à 6 contractions / heure.
La recherche de facteurs déclenchants est souvent fructueuse : trajet en voiture, syndrome infectieux général ou urinaire, fatigue excessive (déménagement), perte de liquide amniotique. Ces facteurs doivent être systématiquement recherchés par un interrogatoire précis.
Le clinicien pose les mains à plat sur l’utérus de la patiente, et attendra patiemment la survenue d’une contraction utérine. II peut ainsi évaluer la fréquence des contractions utérines et leur intensité.
– Les modifications locales : elles sont évaluées par le toucher vaginal. Cet examen simple doit être pratiqué correctement. Le toucher vaginal doit pouvoir préciser la longueur du col, la dilatation, la consistance, la situation, l’état de la poche des eaux et la sollicitation du col par la présentation.
Plusieurs scores tentent d’évaluer la sévérité de la MAP en fonction des modifications cervicales (score de Bishop).
– Autres symptômes associés : la RPM : elle aggrave le risque d’accouchement prématuré. De surcroît, elle introduit un risque infectieux important pour la mère et pour l’enfant. L’hospitalisation immédiate de la patiente est nécessaire.
Selon l’âge de la grossesse, une tocolyse sera tentée dans la mesure où aucun syndrome infectieux n’est dépisté.
D’autres symptômes peuvent être associés à la MAP : métrorragies qui peuvent être symptomatiques d’un placenta prævia entraînant souvent une MAP ou encore métrorragies symptomatiques d’un décollement prématuré du placenta qui doit être recherché attentivement. Dans d’autres cas, les métrorragies seront minimes mais simplement symptomatiques de la dilatation cervicale débutante. Ce dernier diagnostic ne doit être retenu qu’après avoir éliminé les deux autres au préalable.
5. Bilan étiologique et de prématurité :
A adapter en fonction de l’urgence de la tocolyse.
– Mère : NFS, test à la diamino-oxydase (DAO) à la recherche d’une rupture, test de Kleihauer en cas de métrorragies.
– Fœtus : évaluation du bien-être fœtal (RCF) et estimation de l’âge et du poids fœtal (clinique et échographique)
Ce bilan rapide permet d’apprécier le pronostic fœtal en cas d’échappement à la tocolyse.
6. Conduite à tenir :
1) Repos au lit : à l’hôpital ou à domicile
Il est fondamental ; il suffit dans 50 % des cas.
2) Tocolyse pharmacologique : Cf chapitre spécial
7. Conclusion :
Une meilleure connaissance de la physiologie de la contraction utérine, le développement des procédés d’enregistrement et les progrès de la pharmacologie permettent d’appréhender au mieux le risque d’accouchement prématuré et d’envisager une conduite pratique et thérapeutique plus adaptée.