Une maladie auto-immune (MAI) ne diminue pas en général la fertilité chez la femme et ne constitue pas en soi un obstacle au bon déroulement d’une grossesse, à condition que les interactions entre ces deux éléments soient étroitement contrôlées.

Mal gérée, une grossesse peut en effet aggraver la pathologie et cette dernière faire échouer un projet de grossesse.

Il y a encore à peine quarante ans, la grossesse était déconseillée dans la plupart des maladies auto-immunes et, jusqu’aux années quatre-vingt, elle était contre-indiquée chez la femme atteinte d’un LED, en raison de la forte mortalité maternelle.

Depuis, des progrès immenses ont été réalisés dans le traitement de ces maladies, permettant ainsi aujourd’hui de bien réussir un tel projet, mais toujours sous réserve d’une prise en charge adéquate entre tous les intervenants concernés (médecin généraliste de la mère, gynécologue-obstétricien, spécialiste de la maladie auto-immune, pédiatre, cardiologue, biologiste…). 

La consultation préconceptionnelle est fondamentale, elle doit d’abord évaluer l’état de la personne et du traitement en cours. Certaines situations, comme une hypertension artérielle mal contrôlée, une atteinte rénale évolutive ou encore une poussée de la maladie, notamment d’un lupus systémique ou de certaines vascularites, contre-indiquent momentanément une grossesse. Le contraceptif prescrit doit s’ajuster alors aux spécificités de la pathologie sous-jacente.

Par contre, la grossesse est en général de bon pronostic dans la polyarthrite rhumatoïde où l’on observe souvent une rémission passagère et elle ne semble pas avoir d’influence particulière sur l’évolution du Gougerot-Sjögren.

1. Gérer les traitements :

Au-delà de la maladie en cause, la gestion des traitements est cruciale.

– Certains médicaments, comme le cyclophosphamide, ont des effets négatifs sur la fertilité et peuvent même induire une stérilité définitive (celle-ci est fonction aussi de la dose cumulative, de l’âge et de la réserve ovarienne).

Certaines thérapeutiques, tels le cas du méthotrexate et du mycophénolate mofétil (MMF), sont contre-indiquées, du fait de leurs effets malformatifs ou de leur toxicité fœtale.

– D’autres, par contre, comme les corticoïdes, l’azathioprine et les antipaludéens de synthèse, peuvent être poursuivis pendant la grossesse.

– Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont contre-indiqués au cours du 3ème trimestre de la grossesse.

– Concernant les médicaments biothérapiques, leur utilisation ou leur poursuite en cours de grossesse n’est envisagée en général qu’après qu’aient été écartées les autres options thérapeutiques possibles, du fait de l’intensité de l’immunosuppression qu’ils génèrent.

Ainsi, si un changement de médicaments contre-indiqués au cours de la grossesse s’impose, il vaut mieux l’effectuer à un moment où la stabilité de la maladie ne peut être mise en péril par une grossesse.

NB : La présence de certains auto-anticorps sera aussi recherchée, notamment les anti-SSA/SSB et les antiphospholipides :

– les premiers ont la faculté d’entraîner des complications électriques du tissu cardiaque du fœtus,

– les seconds de provoquer des fausses couches spontanées ; une femme porteuse d’un syndrome d’anti-phospholipides et ne prenant aucun traitement préventif (héparine/aspirine) a seulement 50 % de chance de mener une grossesse à terme et moins de 10 % en cas d’antécédents de pertes fœtales ou de fausses couches à répétition.

La présence d’anticorps antithyroïdiens augmente également le risque abortif.

2. Risques de transmission :

La transmission d’une MAI d’une mère à son enfant est par contre exceptionnelle. Une vigilance s’impose néanmoins à l’égard de l’enfant qui aura toujours par nature une prédisposition, même si cette dernière est statistiquement faible, à contracter d’autres MAI.

On observe parfois un lupus néonatal lié à la transmission passive d’auto-anticorps maternels, se traduisant par des signes divers : éruption cutanée, photosensibilité, hépatite, pneumonie, bloc auriculo-ventriculaire congénital (BAV), anémie hémolytique, leucopénie ou thrombopénie. Hormis le BAV, ces manifestations disparaissent habituellement au bout de six mois.

Les risques encourus par la grossesse face aux maladies auto-immunes ne cessent pas le jour de l’accouchement : il convient donc souvent de reprendre les médicaments prescrits avant la grossesse car la rechute est parfois classique, comme dans la polyarthrite rhumatoïde.

La survenue d’une thyroïdite d’Hashimoto silencieuse est assez fréquente en post-partum ; disparaissant habituellement en quelques semaines, elle est susceptible de récidiver lors de grossesses ultérieures ou d’évoluer vers une hypothyroïdie permanente.

Au final, tous les moyens sont là pour garantir le contrôle de la maladie auto-immune et le succès de la grossesse. Toutefois, beaucoup de femmes jeunes ignorent souvent qu’elles sont atteintes de MAI car elles sont dans la phase d’établissement de la maladie où les symptômes, peu perceptibles, apparaissent et disparaissent, échappant ainsi à leur attention ou à un diagnostic. Le résultat peut alors être préjudiciable pour la mère comme pour le futur bébé.

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