C’est une présentation céphalique complètement défléchie diagnostiquée au cours du travail, tête fixée.

Cette situation, dite primitive, devient définitive au cours du travail.

Elle est souvent eutocique.

Le diamètre d’engagement est le sous-mento-bregmatique, de 9,5 cm (quand la désolidarisation du couple tête-thorax se produit). Son repère est le menton.

Le dégagement ne peut se faire qu’en mento-pubien, donc favorable pour les variétés antérieures.

Les variétés postérieures ou transverses doivent subir une rotation obligatoire (“la face tourne en avant ou meurt”).

Elle est relativement rare, fréquence : 3 pour 1.000 naissances.

1. Etiologies :

1) Facteurs favorisants maternels :

– multiparité : en raison de l’hyperlaxité de la sangle abdomino-pelvienne, de l’hypotonie de la fibre myométriale et de l’obliquité utérine (60 à 70 %),

– bassins rétrécis,

– hypotrophie utérine.

2) Facteurs favorisants fœtaux :

– gros enfants,

– dolichocéphalie,

– malformations vertébrales,

– tumeurs cervicales (goitre congénital, tumeur thymique).

3) Facteurs favorisants ovulaires :

– hydramnios,

– PP (surtout dans sa forme marginale postérieure),

– anomalies funiculaires : la circulaire du cordon est plus fréquente que dans la présentation du sommet.

2. Variétés de position :

Le repère de la présentation de la face est le menton (M), selon son orientation par rapport au bassin :

1) Variétés antérieures : les plus fréquentes (65 %) :

Si le menton est orienté vers l’arc antérieur :

– mento-iliaque gauche antérieur (MIGA),

–  ”    ”    ”    ”  droite antérieur (MIDA),

–  ”    ”   – pubienne (MP).

2) Variétés postérieures (26 %) :

Le menton est orienté vers la région sacro-iliaque :

– mento-iliaque gauche postérieur (MIGP),

–  ”    ”    ”    ”  droite postérieur (MIDP),

–  ”    ”   – sacré (MS).

3) Variétés transverses (9 %) :

Ce sont les MIGT, MIDT qui sont en fait des variétés postérieures en train de subir leur rotation et de se transformer en antérieures.

L’orientation de la présentation se fait dans les 2/3 des cas en utilisant l’oblique gauche, c’est pourquoi nous retrouvons plus de gauches dans les variétés antérieures et plus de droites dans les postérieures.

3. Diagnostic positif :

“La présentation de la face est une surprise qui se révèle au cours du travail, dans l’écrasante majorité des cas”. (Lacomme). Il faut même une certaine progression du travail pour avoir la certitude.

1) Examen clinique :

– Inspection : utérus développé longitudinalement.

– Palpation : triade de Léopold :

. présentation haute et mobile, formée par un élément dur, proéminent et débordant largement la SP,

. plan du dos du même côté que la proéminence céphalique (sommet : côté opposé),

. dépression profonde entre la proéminence et le plan du dos : “coup de hâche externe”.

– Auscultation : BCF entendus au-dessous de l’ombilic, du côté opposé au plan du dos.

– TV : il apporte des éléments importants au diagnostic, d’autant plus fiables que la dilatation du col est avancée.

Il faut savoir le pratiquer avec douceur d’autant plus que cette présentation peut s’associer à un PP ou un hydramnios qui fait bomber la PDE ; celle-ci doit être respectée jusqu’à la fin du travail.

Il met en évidence d’un côté le front (reconnaissable à la suture métopique), puis les arcades orbitaires, la proéminence du nez au centre de la présentation suivie par la dépression de la bouche, la mâchoire inférieure, et surtout du côté opposé la saillie du menton.

Le diagnostic n’est certain que quand celui-ci est palpable.

Le toucher devient délicat quand la PDE est rompue depuis longtemps et quand la face est le siège d’une infiltration œdémateuse, rendant les saillies difficiles à mettre en évidence.

2) Examens complémentaires :

– Radio du CU : elle apporte des renseignements précieux, surtout quand le fœtus apparaît en profil strict :

. déflexion céphalique : elle est complète si la ligne horizontale passant par le menton est plus basse que celle passant par le bregma,

. recherche de l’intégrité de la voûte crânienne pour éliminer une anencéphalie.

– Radiopelvimétrie : si suspicion d’anomalie osseuse, surtout chez la primipare.

– Echographie :

. aspect général,

. présentation,

. viabilité et biométrie fœtales,

. recherche d’éventuelles malformations,

. apprécier la quantité du liquide amniotique et la localisation placentaire.

4. Diagnostics différentiels :

1) Présentation du siège :

Surtout dans sa forme décomplétée, en début de travail.

La bouche est confondue avec l’anus, le nez avec la saillie du sacrum et les joues avec les fesses.

Une astuce clinique mais parfois d’aider au diagnostic : l’anus est sur une même ligne horizontale que les tubérosités ischiatiques, alors que la bouche forme avec la proéminence des os malaires un triangle. En cas de doute : radiographie ou échographie.

2) Présentation du front ++ :

Le TV profond met en évidence d’un côté la grande fontanelle dans sa totalité et de l’autre on n’arrive jamais au menton.

D’ailleurs il est souvent difficile avant la fixation de la tête fœtale de trancher entre les deux diagnostics, en raison des positions intermédiaires entre face et front qui peuvent évoluer soit vers l’une ou l’autre.

5. Mécanisme de l’accouchement :

Le diamètre de la présentation est le sous-mento-bregmatique (SMB) qui mesure 9,5 cm et paraît très favorable à un accouchement par les voies naturelles, puisque le plus petit des diamètres de la tête fœtale.

En fait, cette dernière dans la présentation de la face est hyperdéfléchie, coincée entre les deux omoplates ⇒ le mobile fœtal qui se présente au bassin maternel est constitué non seulement par l’extrémité céphalique mais par le couple tête-thorax. Le diamètre de la présentation sera donc plus bas situé : ce sera le syncipito-présternal mesurant 13 à 15 cm, donc incompatible avec les diamètres du bassin. Il ne peut y avoir d’engagement dans la présentation de la face puisque son grand diamètre ne peut traverser le DS. En fait, il faut qu’il y ait une désolidarisation entre le couple tête-thorax pour faire intervenir le SMB.

Cette désolidarisation ne peut se faire que dans les variétés antérieures, autrement l’accouchement par les voies naturelles est impossible.

1) Physiologie de l’accouchement :

* Dans les variétés antérieures : la déflexion céphalique est complète et totale, ce qui fait intervenir le diamètre SMB, favorable à une descente et un dégagement faciles, puisqu’on ne peut parler d’engagement. En fait, certains auteurs montrent que le diamètre qui intervient réellement est le trachéo-bregmatique mesurant 0,7 cm de plus.

* Dans les variétés postérieures ou transverses : la déflection de la tête n’est pas totale, ce qui explique les complications.

Les phases de l’accouchement dans la présentation de la face étant complètes dans les postérieures qui se transforment d’abord en transverses puis se dégagent obligatoirement en antérieures, nous décrirons le mécanisme dans la MIDP où celui-ci est complet.

L’orientation de la présentation se fait dans le grand diamètre gauche.

a) 1ère phase :

Elle est constituée par un complément de descente de la tête fœtale jusqu’à ce que l’occiput vienne buter en avant contre le bord supérieur de la SP. Un complément de déflexion est alors obligatoire escamotant le diamètre occipito-mentonier et le transformant en trachéo-bregmatique (10,2 cm).

Ce dernier descend facilement dans l’excavation plus bas que le plan du DM.

A la fin de cette descente, le fœtus se trouve bloqué par son thorax et ses épaules contre la margelle du pelvis, situation dangereuse qui ne peut continuer à évoluer dans cette position.

b) 2ème phase :

La grande rotation se produit ensuite pour escamoter le diamètre syncipito-présternal ; elle mesure 135°, et intéresse la tête et le thorax du fœtus qui sont solidaires, ramenant ainsi le menton en arrière de la SP. Celui-ci descend derrière la symphyse par élongation du cou jusqu’à son bord inférieur, où il se fixe.

c) 3ème phase :

Elle est constituée par le dégagement ; l’élongation du cou étant maximale et la TF étant solidarisée du tronc, il se produit une flexion de la tête à travers le DI et le périnée maternels : où apparaîtront d’abord les arcades orbitaires, puis le front suivi par la grande fontanelle, enfin la petite fontanelle et l’occiput.

Cette flexion céphalique est complète et totale, car elle transforme une tête complètement défléchie en une tête complètement fléchie ; elle se fait à la partie basse de l’excavation et tend les éléments du périnée, les menaçant gravement.

Nb : Dans les variétés transverses et antérieures, les temps de l’accouchement sont les mêmes, sauf pour la rotation qui n’est que de 90° pour les premières et 45° pour les secondes.

2) Aspect du nouveau-né à la naissance :

Il est caractéristique, permettant de confirmer rétrospectivement le diagnostic :

– attitude d’opistotonos spontanée avec lordose dorsale difficilement réductible,

– allongement de la tête dans le sens de la longueur (dolichocéphalie),

– tuméfaction de la face, qui est parfois le siège d’une véritable BSS, si la durée du travail a été longue.

On peut aussi avoir, en plus de l’infiltration œdémateuse, des lésions érythémateuses, des ecchymoses ou même des phlyctènes ; le tout constituant le faciès de “boxeur groggy”.

Enfin, on peut noter une raucité du cri, dû à un œdème laryngé secondaire à la compression du cou.

Tout ceci, d’aspect inquiétant à la naissance, pour la mère et l’entourage, disparaît en quelques jours.

6. Evolution – complications :

1) Dystocie mécanique :

L’enclavement est une complication évolutive des variétés postérieures et accessoirement transverses qui ne peuvent faire leur rotation ⇒ la tête est bloquée au niveau de la partie basse de l’excavation, et le dégagement par flexion est impossible.

En l’absence d’intervention : mort fœtale et rupture utérine.

2) Dystocie dynamique :

– arrêt ou lenteur de la dilatation du col, pendant plus de 2 heures,

– stagnation de la présentation.

En l’absence de DFP, la durée du travail n’est pas anormalement plus longue que dans la présentation du sommet.

3) RPM :

Témoin d’une mauvaise adaptation, elle est plus fréquente dans les variétés postérieures et transverses.

Plus la rupture des membranes tarde, plus l’expulsion a lieu par les voies naturelles et plus le pronostic est bon.

L’idéal serait donc de maintenir la PDE intacte jusqu’à une dilatation avancée du col.

7. Conduite à tenir :

La présentation de la face est souvent eutocique (diamètres souvent favorables), à condition que la rotation en MP puisse se faire dans un temps idéal.

Tout obstétricien devant une présentation de la face se posera obligatoirement les questions suivantes :

– l’accouchement spontané par les voies naturelles se fera t-il ? quelle durée du travail peut-on accepter sans risque pour l’enfant ? peut-on utiliser les ocytociques ?

– si non, faut-il tenter une application de forceps afin de compléter ou de faire une rotation de la tête fœtale, ou bien préférer une césarienne ? si oui, quand la pratiquer ?

1) Cardiotocographie :

Par monitorage externe ou interne (électrode au niveau du front ou de la mandibule) ; elle permet de dépister une éventuelle SF.

2) Perfusion ocytocique :

Elle n’est pas contre-indiquée ; elle est même utile pour améliorer la qualité de la CU, et peut permettre la rotation spontanée des faces en mento-postérieur ou transverse.

Cependant, son débit doit être contrôlé et adapté à l’importance de l’hypocinésie.

3) Forceps :

Il n’est justifié que devant une variété antérieure, à la partie basse de l’excavation.

Certains le refusent même dans cette indication car le point d’appui des deux cuillères se trouve au niveau de la région temporale très sensible, au lieu de se faire au niveau des joues comme dans le sommet.

De plus, la descente de la présentation menace le larynx en arrière de la symphyse.

Les branches du forceps sont placées en dehors de l’oreille ; on pratique une traction pour terminer la descente du menton sous la symphyse, puis on commence la flexion douce pour éviter les délabrements du périnée.

Toute autre indication du forceps, pour faire une rotation en cas de variété postérieure ou la compléter en cas de transverse est à écarter, car dangereuse.

4) Manœuvres :

– Rotation manuelle de la tête fœtale (variété postérieure ou transverse à antérieure) : intéressante car elle facilite un mouvement physiologique,

– complément manuel de la déflexion céphalique en cas de présentation intermédiaire front-face par la fermeture de la bouche du fœtus in utero, en ramenant la mâchoire inférieure.

5) Césarienne :

– Elle a d’abord ses indications propres : bassin rétréci, procidence du cordon, PP,

– survenue d’une SFA, mise en évidence par la clinique ou la cardiotocographie, responsable du tiers des indications,

– arrêt de progression de la présentation et stagnation de la dilatation après un délai raisonnable (2 à 3 h).

8. Pronostic :

1) Pronostic maternel :

En général, il est bon.

La mère ne court aucun risque, sauf si la face est négligée avec enclavement de la tête ⇒ Sd de lutte pouvant aboutir à la RU.

2) Pronostic fœtal :

Le pronostic est moins bon que celui du sommet :

– l’enclavement est une complication évolutive des variétés postérieures et accessoirement transverses qui ne peuvent faire leur rotation (⇒ la tête est bloquée à la partie basse de l’excavation et le dégagement par flexion est impossible).

Méconnue, elle aboutit à la MIU voire à la RU.

– la SFA survient souvent car le travail est long et la RPM fréquente.

 

Au total, le pronostic fœtal est perturbé :

– mortalité périnatale : 3,3 %,

– morbidité périnatale (apgar inférieur à 7 à 1 minute) : 6,3 %.

Ce qui veut dire qu’un enfant sur 10 né en présentation de la face meurt ou aura des séquelles.

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