Le cancer du sein est une pathologie hétérogène : suivant les cas, le risque de rechute varie de 10 à 90 %.
Les facteurs pronostiques devraient permettre de sélectionner les patientes en fonction de leur risque de récidive.
La connaissance de ces facteurs pronostiques influence la stratégie thérapeutique : un traitement adjuvant sera proposé en fonction du risque de rechute. Mieux le traitement est adapté, plus le bénéfice obtenu est important.
1. Facteurs pronostiques de 1ère génération :
1) Atteinte ganglionnaire :
C’est le facteur pronostique le mieux connu et le plus important.
L’évaluation clinique de l’état ganglionnaire du creux axillaire constitue une partie de la classification TNM.
Cette classification a certes une valeur pronostique, mais elle est trop grossière pour être prise en considération.
Plus le nombre de ganglions atteints est élevé, plus le pronostic est mauvais.
Classement :
. 0 ganglion atteint = meilleur pronostic, mais 1/3 rechutent.
. 1 à 3, 4 à 10, >10 ganglions atteints = pronostic de plus en plus défavorable.
Nb : Beaucoup plus importante est l’analyse histologique des ganglions prélevés dans le curage de la région axillaire (minimum souhaité : 7).
2) Taille tumorale :
C’est, au moment du diagnostic, le premier paramètre clinique que l’on peut identifier.
Il fait partie de la classification TNM : T1 (<2 cm), T2 (2-5 cm), T3 (>5 cm).
La taille de la tumeur influence le pronostic : plus la tumeur est grande, plus le pronostic est mauvais.
Chaque centimètre supplémentaire diminue la survie.
Actuellement, tous les efforts tendent à découvrir les tumeurs avant qu’elles n’atteignent le centimètre.
3) Grade histologique :
C’est la méthode Scarff, Bloom et Richardson (SBR) qui est la plus utilisée en Europe.
Seul le grade I a un meilleur pronostic ; grades II et III ont un pronostic identique et moins favorable.
4) Type histologique :
Les carcinomes canalaires (80 %), lobulaires (5-10 %), médullaires ont un pronostic identique.
Les carcinomes tubuleux ou colloïdes : pronostic légèrement meilleur, mais peu pris en compte dans les décisions thérapeutiques.
5) Récepteurs hormonaux :
Les récepteurs hormonaux (RH) sont des protéines intracellulaires liant l’œstrogène (RE) ou la progestérone (RP) avec une grande affinité et une grande spécificité.
Ils servent d’intermédiaires entre l’hormone produite à distance et la machinerie intracellulaire du cancer du sein.
La présence de récepteurs aux œstrogènes (RE) et à la progestérone (RP) indique un meilleur pronostic.
Leur présence oriente vers une hormonothérapie en traitement adjuvant.
6) Age et état ménopausique :
– Moins de 35 ans : survie moins bonne, taux de rechute loco-régionales plus élevé, souvent associé à d’autres mauvais facteurs (adénopathies plus fréquentes, taille plus importante, grade histologique plus souvent SBR III et des récepteurs hormonaux volontiers négatifs). Cela conduit certaines équipes à réfuter la chirurgie à visée conservatrice et à proposer un traitement adjuvant sur le seul argument qu’une malade a moins de 35 ans.
– Etat ménopausique : il n’a pas d’influence pronostique, mais guide le choix du traitement : chimiothérapie plus efficace avant 60 ans, hormonothérapie surtout chez les femmes ménopausées.
7) Facteurs pronostiques de 1ère génération et stratégie thérapeutique :
Les facteurs que l’on vient d’évoquer sont dans la majorité des cas suffisants pour prendre la décision de débuter ou non un traitement adjuvant et pour choisir le traitement le plus approprié.

2. Facteurs pronostiques de 2ème génération :
1) Tests de prolifération tumorale :
Les tests qui évaluent la rapidité de la reproduction cellulaire peuvent être considérés comme des tests pronostiques.
Ces tests vont quantifier soit les cellules en mitoses soit les cellules en phase S (phase de synthèse de l’acide désoxyribonucléique) en train de doubler la quantité d’ADN nucléaire.
a) Index mitotique :
Il s’agit du nombre de mitoses par champ, divisé par le nombre de cellules qui sont dans ce champ.
C’est un des 3 constituants du score de Scarff, Bloom et Richardson.
b) Cytométrie en flux :
C’est une technique qui quantifie le pourcentage de cellules en phase S (synthèse d’ADN) à partir des histogrammes d’ADN.
Une phase S élevée individualise une population à haut risque de récidive (plus mauvais pronostic).
2) Oncogènes et facteurs de croissance :
a) HER-2/neu :
C’est un oncogène localisé sur le chromosome 17q21.
Surexpression associée à un pronostic défavorable, résistance à certaines chimiothérapies, sensibilité aux anthracyclines.
b) Protéine p53 :
Il s’agit du produit d’anti-oncogène localisé sur le chromosome 17q13 qui est souvent altéré dans le cancer du sein (40 à 50 %). Sa surexpression est liée à un pronostic péjoratif.
3. Conclusion :
Le nombre de facteurs pronostiques est très élevé.
Les facteurs pronostiques les plus fiables restent la taille tumorale, l’atteinte ganglionnaire axillaire et le grade histopronostique.
Les nouveaux marqueurs biologiques sont prometteurs mais ne sont pas encore intégrés dans la pratique courante pour guider les traitements.
Résumé sous forme de tableau
Facteur pronostique | Influence sur le pronostic | Impact sur la stratégie thérapeutique |
Atteinte ganglionnaire | Très forte | Décision de traitement adjuvant |
Taille tumorale | Forte | Dépistage précoce, choix du traitement |
Grade histologique | Moyenne à forte | Choix du traitement |
Type histologique | Faible à moyenne | Rarement utilisé pour la décision thérapeutique |
Récepteurs hormonaux | Forte (si présents) | Indique hormonothérapie |
Âge | Moins de 35 ans = moins bon | Influence le choix du traitement |
HER-2/neu, p53 | Moyenne (en cours d’évaluation) | Pas encore utilisés en routine |
A retenir :
En pratique, quand on parle de cancer avec facteurs de bon ou de mauvais pronostic, on parle surtout de :
– taille tumorale (< ou > 3 cm),
– envahissement ganglionnaire (N- ou N+),
– grade SBR (I-II ou III),
– récepteurs hormonaux (+ ou -).