La syphilis est une IST à déclaration et traitement obligatoires.

Elle est due à la transmission interhumaine d’un spirochète (non cultivable in vitro) : le tréponème pâle ou Treponema pallidum (TP).

Elle survient surtout dans les populations défavorisées, à sexualité à haut risque.

Le réservoir est exclusivement humain.

1. Historique :

Les spécialistes pensent que la syphilis a été introduite en Europe en 1493 par des membres d’équipages revenant de la première expédition de Christophe Colomb en Amérique. Au XVIe siècle, cette maladie était la plus répandue.

Le spirochète ne fut cependant découvert qu’en 1905.

– En 1906, le bactériologiste allemand August Von Wassermann mit au point le premier test sanguin permettant le diagnostic de la maladie.

– En 1943, les chercheurs démontrèrent qu’un antibiotique, la pénicilline, était très efficace contre la syphilis ; elle reste d’ailleurs le traitement habituel de cette maladie.

– Au cours des années 1970, la plupart des cas de syphilis étaient observés chez les homosexuels occidentaux, mais l’augmentation survenue dans les années 1980 semble dans une large mesure toucher les hétérosexuels. Cette tendance a fait augmenter les cas de syphilis congénitale, responsable d’un taux élevé de morbidité et de mortalité chez les nourrissons.

En outre, les personnes atteintes par le syndrome immunodéficitaire acquis (SIDA) sont plus susceptibles de contracter des formes graves de syphilis et de rechuter après un traitement permettant normalement la guérison.

2. Epidémiologie :

1) Fréquence :

La syphilis est beaucoup plus répandue dans les pays en voie de développement et en particulier en Afrique.

Dans les pays industrialisés, le nombre de cas a nettement dimi­nué après 1950, grâce à l’utilisation de la pénicilline et à d’énergiques mesures de santé publique, en particulier le caractère obligatoire du dépistage prénuptial et prénatal, de la déclaration et du traitement. Puis l’incidence s’est remise à augmenter depuis environ 1980, en relation avec l’apparition de la pandémie due au HIV.

Les tréponématoses endémiques, maladies tropicales dont les caractères épidémiologiques et cliniques sont très différents (pian, béjel, pinta…), sont dues à des agents impossibles à distinguer du tréponème pâle (notamment par la sérologie).

2) Germe en cause :

La cause de la syphilis fut découverte en 1905 par les microbiologistes allemands Fritz Schaudinn et Hoffmann lorsqu’ils visualisèrent les spirochètes dans les lésions infectieuses précoces.

L’agent causal de la syphilis, Treponema pallidum, est très proche des autres spirochètes pathogènes, dont ceux provoquant le pian (T. pertenue) et le mal del Pinto (T. carateum).

T. pallidum est une cellule spiralée, mince de 0,15 µm de large et de 6 à 50 µm de long. Il y a d’ordinaire environ 6 à 14 spirales. L’organisme est effilé à l’une des extrémités. Il est trop fin pour être observé avec la coloration standard de Gram mais peut être visualisé en amas humides au microscope à fond noir ou par coloration argentique ou par les méthodes d’anticorps fluorescents.

Les études récentes ont décrit plusieurs caractéristiques inhabituelles de la membrane externe de T. pallidum qui pourraient fournir une explication à la pathogenèse de la syphilis. A la différence de la plupart des bactéries ayant une membrane externe riche en protéines, la membrane externe de T. pallidum semble être constituée de façon prédominante de phospholipides avec peu de protéines exposées en surface. On a émis l’hypothèse que c’est à cause de cette structure que la syphilis pourrait se développer malgré une vive réponse anticorps (dirigée contre les antigènes internes, non exposés en surface). 

Il est possible de cultiver T. pallidum in vitro, mais une culture in vitro soutenue n’est pas encore possible et les rendements sont très faibles.

Temps de division du TP :

– syphilis précoce : 33 heures,

– syphilis tardive : plusieurs jours.

La culture est d’usage limité en recherche mais d’aucune utilité en pratique clinique. 

Les seuls hôtes naturels connus de T. pallidum sont l’homme et certains singes dont les grands singes sans queue.

3) Mode de transmission :

Dans la majorité des cas, la syphilis est transmise par voie sexuelle à partir d’un sujet infecté. Les autres voies possibles sont : le contact avec des lésions cutanéo-muqueuses (érosion), la contamination materno-fœtale transplacentaire à partir de 18 SA (syphilis congénitale), et, tout à fait exceptionnelles, par transfusion ou accident pro­fessionnel (piqûres septiques).

Il est rare que l’infection se transmette par des objets contaminés car les micro-organismes meurent rapidement en milieu sec. 

Dans les heures qui suivent son inoculation, Treponema pallidum dissémine par voie sanguine ou lymphatique dans tout l’organisme, pouvant toucher n’importe quel organe, en particulier le système nerveux central ou le système cardiovasculaire.

La multiplication de l’organisme est très lente, avec un temps de division d’environ 33 heures. Une pousse aussi lente des tréponèmes chez l’homme compte probablement pour part dans la nature prolongée de la maladie et dans la période d’incubation relativement longue.

La syphilis, exception faite de la syphilis congénitale, est acquise presque exclusivement par contact intime avec des lésions infectieuses de syphilis primaire ou secondaire (chancre, plaques muqueuses, syphilides). Cela se produit habituellement lors de rapports sexuels, y compris les rapports anogénitaux et orogénitaux.

Les personnels de santé ont quelquefois été contaminés lors d’examen sans précaution de patients avec des lésions contagieuses.

L’infection par contact avec les objets est très peu courante.

3. Histoire naturelle de la syphilis non traitée :

En l’absence de traitement, la syphilis évolue en 3 phases après une période d’incubation de 3 semaines en moyenne (mais qui peut s’étendre de 1 à 12 semaines).

– La phase primaire se caractérise par l’apparition d’une papule non douloureuse qui se développe puis se dégrade pour former une ulcération à fond propre et à bords surélevés indurés (chancre d’ino­culation). Elle persiste de 2 à 6 semaines, puis cicatrise spontanément.

– Plusieurs semaines après, le patient développe de façon caractéristique une phase secondaire marquée par des signes cutanéo?muqueux, une fébricule, des céphalées, un malaise et une lymphadénopathie généralisée. Il peut y avoir une atteinte des viscères.

L’éruption secondaire peut survenir alors que le chancre est encore en cours de cicatrisation ou plusieurs mois après la disparition du chancre.

– Les lésions secondaires guérissent spontanément en 2 à 6 semaines, et l’infection entre alors en période de latence. Certains patients peuvent présenter plus tard des lésions de rechute similaires à celles de la phase secondaire ; la rechute prend rarement la forme d’une récurrence du chancre primaire.

– Environ un tiers des patients non traités développent éventuellement des lésions tertiaires destructrices tardives touchant l’un ou les deux yeux, le SNC, le cœur ou d’autres organes, dont la peau. Cela peut arriver à tout moment, de quelques années à 25 ans après la contamination.

Ces complications tardives (syphilis tertiaire) sont devenues excep­tionnelles depuis la pénicilline.

L’incidence des complications tardives de la syphilis non traitée n’est pas actuellement connue mais semble être moindre que par le passé. Les cas de gomme sont à présent trop rares pour être rapportés.

4. Diagnostic clinique :

La syphilis est remarquable parmi les maladies infectieuses par sa grande diversité de présentations cliniques.

Elle passe, en l’absence de traitement, par une phase primaire, secondaire puis tertiaire.

Les phases précoces (primaire et secondaire) sont contagieuses.

La guérison spontanée des lésions précoces est suivie d’une longue période de latence.

Chez environ 30 % des patients non traités, se développe une atteinte tardive du cœur, du système nerveux central (SNC) ou d’autres organes. 

1) Syphilis primaire : Cf chapitre spécial

2) Syphilis secondaire : Cf chapitre spécial

3) Syphilis latente : Cf chapitre spécial

4) Syphilis tertiaire : Cf chapitre spécial

5) Syphilis congénitale : Cf chapitre spécial

5. Diagnostic positif :

1) Diagnostic direct :

a) Microscope à fond noir (MFN) : 

Le moyen le plus sûr de faire le diagnostic est de mettre en évidence les spirochètes de morphologie et de mobilité typiques dans les lésions de syphilis précoce (acquise ou congénitale). 

Il faut demander cet examen avant tout traitement ou toute application de traitement local.

– Sérosité : 

. raclage du fond du chancre,

. lésions cutanées secondaires (syphilides papuleuses érosives).

– Sensibilité : 35 – 75 %, spécificité : 100 %.

– Difficulté d’interprétation pour les lésions buccales (présence de spirochètes morphologiquement non différenciables de T. pallidum dans la bouche, particulièrement au niveau du liseré des gencives).

L’examen microscopique à fond noir est souvent positif dans la syphilis primaire et dans les lésions muqueuses humides de la syphilis secondaire et congénitale.

Les problèmes surviennent, cependant en raison de faux négatifs dans la syphilis primaire du fait de l’application par le patient de savons ou autres composés toxiques pour les lésions. Un seul résultat négatif est par conséquent insuffisant pour exclure la syphilis. De façon optimale, les patients avec des lésions suspectes mais avec un examen microscopique à fond noir initial négatif devraient être informés d’éviter de laver les lésions et de revenir dans la journée pour deux examens successifs.

En pratique, néanmoins, pour les sujets à haut risque (drogués, homosexuels actifs), il peut être plus approprié de traiter de façon présomptive les patients avec des lésions suspectes après avoir obtenu les tests sérologiques.

Pour réaliser l’examen microscopique à fond noir, la surface de la lésion ulcéreuse suspectée doit être nettoyée avec du sérum physiologique et tamponnée avec une gaze sans provoquer de saignement. La présence de cellules de la lignée rouge dans le prélèvement rend difficile la visualisation d’un petit nombre de T. pallidum.

La compression de la lésion (avec des gants) peut aider à exprimer un fluide séreux, qui est mis sur une lame en verre, recouvert par une lamelle, et examiné au microscope à fond noir.

Les organismes T. pallidum vivants montrent des mouvements progressifs de va-et-vient, des mouvements de rotation autour de l’axe longitudinal, et de flexion plutôt brutaux à 90 degrés au niveau du centre de l’organisme.

b) Examen microscopique après application d’Ac marqués par une fluorescence.

T. pallidum peut aussi être mis en évidence dans les biopsies ou les prélèvements histologiques par coloration à l’aide d’anticorps fluorescents ou par coloration argentique.

c) PCR :

– Prélèvement sur le même type de lésions ;

– Écouvillon sec à température ambiante ;

– Mauvaise sensibilité sur le sang et le LCR ;

– Résultat retardé.

2) Sérodiagnostic : Cf chapitre spécial

6. Evolution et pronostic :

En l’absence de traitement, les anomalies cliniques dispa­raissent spontanément.

Une minorité de malades (un tiers) évoluent vers les complications tardives de syphilis tertiaire, en particulier : atteinte neurologique (tabès, paralysie générale = démence…) et cardiovasculaire. Ce chiffre est diminué par les antibiothérapies intercurrentes et le dépistage.

La sérologie décroît après la syphilis secondaire ; sous traitement, elle décroît plus vite (et peut ne pas se positiver si le traitement est précoce).

On la surveille non pour suivre un modèle de décroissance, mais pour dépister les réascensions témoignant d’une réinfection.

En effet, la maladie n’est pas immunisante et des réinfections sont possibles.

Nb : Chez le sujet positif au HIVon a décrit des formes graves précoces et des sérologies “bizarres”.

C’est surtout la possibilité de neurosyphilis précoce, sou­vent associée à une atteinte oculaire (uvéite avec rétinite) qui caractérise la syphilis sur ce terrain.

Les tableaux cli­niques observés sont variables : syndrome méningé, atteinte des nerfs crâniens, accident vasculaire cérébral, polyradi­culonévrite. Leur survenue après des traitements “minute” a amené à modifier les schémas thérapeutiques chez ces patients, et à réaliser systématiquement une ponction lom­baire qui montre parfois une neurosyphilis asymptoma­tique (hyperprotéinorachie, pléiocytose, VDRL positif).

7. Syphilis et grossesse : Cf chapitre spécial

8. Traitement : Cf chapitre spécial

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