1. Définition :

L’achondroplasie est la forme la plus fréquente de l’ostéochondrodysplasie (nanisme) et la plus connue.

Il s’agit d’une affection génétique due à des mutations du gène FGFR3 encodant un récepteur transmembranaire important dans la régulation de la croissance linéaire des os longs.

L’achondroplasie est un défaut constitutionnel de la croissance de l’os, caractérisée par une petite taille et un raccourcissement des membres.

Elle se manifeste par une rhizomélie, une hyperlordose, une brachydactylie et une macrocéphalie avec front proéminent et hypoplasie de la partie moyenne du visage.

Dans la majorité des cas, elle n’affecte pas l’intelligence humaine.

Ce type de nanisme est dit “dysharmonieux” ou “disproportionné” car il est plus marqué sur les membres, contrairement aux nanismes “harmonieux” qui portent sur l’ensemble du squelette.

2. Epidémiologie :

L’achondroplasie touche un enfant sur 25.000 naissances vivantes dans le monde.

Le gène responsable de la maladie est le gène FGFR3 (fibroblast-growth factor receptor 3), localisé en 4p16.3.

Ce gène code pour un récepteur de facteur de croissance fibroblastique exprimé dans le cartilage de croissance.

Plus de 98 % des patients atteints d’achondroplasie ont une anomalie unique qui consiste en une substitution d’une glycine en arginine au codon 380.

3. Description clinique :

L’achondroplasie se manifeste par une morphologie particulière, dont le nanisme.

1) Dès la naissance :

Certains aspects permettent d’identifier la maladie :

– les mains et les membres sont courts et trapus,

– macrocéphalie avec bosse frontale et hypoplasie de la partie moyenne du visage et arête nasale déprimée,

– le thorax est long et étroit,

– la courbure lombaire est accentuée.

L’acquisition de la capacité motrice globale est retardée du fait des petits membres, du cou court, de la tête large et de l’hypotonie. 

2) Dans la petite enfance :

La cyphose thoraco-lombaire est très fréquente, les articulations sont hyperextensibles et les mains larges, courtes et en forme de trident.

Une compression de la moelle épinière au niveau du foramen magnum peut survenir dans la petite enfance et au début de l’enfance et provoquer une apnée centrale, un retard de développement, et des signes pyramidaux. Un genu varum est souvent observable durant l’enfance. Il existe aussi un léger risque d’hydrocéphalie avec augmentation de la pression veineuse intracrânienne.

3) A l’âge adulte :

L’aspect est caractéristique : 

– petite taille (les hommes atteignent en moyenne la taille de 1,30 m et les femmes 1,24 m), 

– déformations squelettiques modérées mais très caractéristiques : une hyperlordose, un genu varum, parfois un canal rachidien étroit responsable de complications neurologiques, une hydrocéphalie possible et des mains en trident,

– les déformations faciales sont caractérisées par des bosses frontales, une hypoplasie de l’étage moyen et une racine du nez déprimée,

– les membres sont courts et le déficit de croissance prédomine sur les os longs proximaux, fémur et humérus,

– enfin on note une limitation de l’extension et de la rotation des coudes, une hyperlaxicité des autres articulations,

– l’obésité est fréquente,

– le développement intellectuel est quant à lui parfaitement normal.

Les femmes affectées doivent accoucher par césarienne du fait de la petite taille du pelvis. 

Le traitement est symptomatique et le pronostic est essentiellement lié à l’atteinte vertébrale.

4. Diagnostic :

Le diagnostic est porté sans ambiguïté dès la naissance ; il est clinique et radiologique.

Les radiologies squelettiques démontrent une rhizomélie, des irrégularités métaphysaires généralisées, une réduction de la distance interpédiculaire entre les vertèbres lombaires basses et un pelvis anormal avec de petites ailes iliaques carrées et une encoche sacrosciatique.

Le diagnostic génétique (moléculaire) est donc en principe sans intérêt à la naissance, si ce n’est de confirmation.

En revanche, l’étude moléculaire prend toute son importance en période prénatale lors d’une échographie du 3ème trimestre, en cas de découverte fortuite d’un retard de croissance intra-utérin, associé à certaines anomalies morphologiques (fémur court, macrocéphalie, associé à certaines anomalies morphologiques (hydramnios, fémur court, macrocéphalie).

En effet, lorsqu’il est lié à une achondroplasie, ce retard de croissance prédomine sur les os longs (supérieur à –2 DS) ; il apparaît tardivement après 24 SA et est le plus souvent associé à un hydramnios.

La mesure de la longueur fémorale est fiabilisée par la mesure échographique du rapport de la longueur fémur/pied.

L’échographie 3D peut étudier la dysmorphie faciale.

En règle générale, la radiographie du contenu utérin permet de mettre en évidence les anomalies radiologiques osseuses et de porter ainsi le diagnostic.

Le test de génétique moléculaire confirme le diagnostic par la mise en évidence de la mutation de FGFR3.

Nb : l’ADN du fœtus peut également être testé pour la mutation du gène FGFR3 ; c’est même réalisable de façon non invasive, dans le sang maternel pendant la grossesse.

5. Diagnostics différentiels :

D’autres pathologies sont issues de l’atteinte du gène FGFR3 : ce sont l’hypochondroplasie, le nanisme thanatophore (types I et II), le syndrome SADDAN (severe achondroplasia development delay acanthosis nigricans), la craniosynostose coronale de Muenke et le syndrome de Crouzon associé à un acanthosis nigricans.

6. Intérêts du génotypage :

La recherche des mutations responsables d’achondroplasie permet un diagnostic de certitude.

Cette recherche s’effectue donc le plus souvent à partir des cellules fœtales après amniocentèse par diverses méthodes de détection de mutations ponctuelles.

Ce diagnostic peut être réalisé aujourd’hui en quelques heures par PCR en temps réel, ce qui est d’autant plus intéressant que la détection du retard de croissance est toujours tardive dans la grossesse ; de fait, le diagnostic moléculaire d’achondroplasie est toujours un diagnostic d’urgence. Il peut d’ailleurs être couplé avec celui d’hypochondroplasie dans le cadre d’un diagnostic différentiel.

En revanche, si l’un des parents, ou les deux, sont atteints d’achondroplasie, le diagnostic moléculaire prend tout son intérêt dans la mesure où un diagnostic prénatal précoce en cas de grossesse pourra être proposé. L’analyse est dans ce cas effectuée par analyse de l’ADN des villosités choriales.

7. Complications :

L’achondroplasie nécessite une surveillance rapprochée, surtout les premières années ; en effet, quelques complications peuvent survenir :

– des apnées du sommeil,

– des otites moyennes chroniques récurrentes, provoquées par la petite taille des conduits, pouvant entraîner une surdité si mal traitées,

– des problèmes orthopédiques tels qu’une cyphose dorsale et un bassin trop fléchi,

– une compression de la moelle épinière au niveau du trou occipital, induisant une souffrance neurologique, un potentiel risque de paralysie ou d’hydrocéphalie,

– une propension à l’obésité,

– à l’âge adulte, des articulations qui font souffrir et un risque augmenté de compression de la moelle épinière au niveau de la colonne lombaire.

8. Evolution :

Une prise en charge préventive de la maladie est essentielle, surtout durant les 3 premières années.

La kinésithérapie aide, par exemple, à développer la station assise, debout et la marche ou permet d’étendre le bassin pour le rendre le plus souple possible.

Un suivi ORL régulier est également recommandé pour prévenir les infections auriculaires.

Après 3 ans, des consultations annuelles chez l’orthopédiste et chez l’ORL suffisent le plus souvent.
Cette prise en charge préventive permet d’améliorer nettement le pronostic et d’avoir une espérance de vie supérieure à 70 ans.

9. Conseil génétique :

L’achondroplasie se transmet selon le mode autosomique dominant, le conseil génétique est donc proposé.

Si l’un des parents est atteint d’achondroplasie, il existe un risque de 50 % de transmettre la maladie à la descendance.

Cependant, 90 % des nouveaux cas naissent de parents sains (cas sporadiques) ; il s’agit d’une mutation de novo, dont la fréquence augmenterait avec l’âge paternel de conception.

L’achondroplasie homozygote est une condition létale.

10. Prise en charge et traitement :

Il n’existe, pour le moment, aucun traitement curatif de la maladie.

Le traitement est multidisciplinaire et une prise en charge préventive est essentielle.

Plusieurs spécialistes peuvent intervenir tels que le généticien, le pédiatre, le kinésithérapeute, le médecin rééducateur, l’orthopédiste et l’ORL.

Une décompression chirurgicale du foramen magnum et/ou un shunt pour l’hydrocéphalie peuvent être nécessaires chez les nouveau-nés. Certains patients optent pour un allongement des membres, procédure controversée.

Le traitement des infections auriculaires et des otites moyennes séreuses, ainsi que l’évaluation des troubles auditifs potentiels est nécessaire. L’orthophonie peut être proposée si besoin.

Le traitement de l’apnée obstructive du sommeil inclut une adénotonsillectomie, une perte de poids, et/ou une pression continue positive des voies aériennes.

La correction chirurgicale peut réaligner la courbure des jambes. Une laminectomie lombaire est parfois nécessaire chez les patients adultes pour traiter la sténose vertébrale.

La prise de poids doit être suivie dans l’enfance pour éviter des complications.

Les activités avec risque de blessure au niveau de l’articulation cranio-cervicale doivent être évitées.

Un soutien psychologique et social doit être proposé.

11. Pronostic :

L’espérance de vie des patients n’est que très légèrement inférieure à celle de la population générale, dans les cas de maladies cardiovasculaires potentielles.

12. De l’espoir pour un nouveau traitement :

Un autre traitement, médicamenteux cette fois, pourrait voir le jour prochainement, puisque des essais sont en cours concernant un médicament susceptible de faire gagner des centimètres. La molécule à la base de ce progrès, le vosoritide, permet de contourner l’effet nocif de la suractivité du FGFR3 porteur de la mutation.

A l’état normal, le FGFR3, récepteur de facteur de croissance, a comme fonction naturelle de réguler les cellules au niveau des cartilages de croissance des os. Le vosoritide rétablirait donc la croissance.

Lors d’un essai du laboratoire pharmaceutique Biomarin sur des enfants de 5 à 14 ans, des injections quotidiennes ont fait augmenter leur croissance de 50 % par rapport aux 6 mois précédant l’essai. Les essais cliniques sont encore en cours et si l’efficacité de ce médicament est confirmée, les agences de santé pourront autoriser sa commercialisation dans quelques années.

Achondroplasie 1
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