L’examen des organes génitaux externes et du pelvis fait partie intégrante de l’analyse morphologique du fœtus. Indépendamment du souhait parental et en dehors des maladies liées à l’X nécessitant le diagnostic du sexe fœtal, l’examen du périnée et du pelvis peut permettre le diagnostic d’anomalies génitales.

Celles-ci sont globalement peu fréquentes, leurs aspects échographiques ainsi que leurs étiologies sont multiples et parfois très difficiles à élucider. Leur diagnostic anténatal est cependant souhaitable en raison de leurs intrications avec certaines anomalies urinaires, de leurs associations fréquentes avec de nombreux syndromes ou séquences malformatives, et de leurs implications thérapeutiques.

1. Anomalies des organes génitaux externes :

1) Chez le fœtus mâle :

1- Hypospadias
2- Epispadias
3- Micropénis
4- Anomalie du contenu scrotal

2) Chez le fœtus féminin :

1- Hypertrophie clitoridienne
2- Anomalie des bourrelets labiaux 
3- Imperforation hyménéale

2. Anomalies des organes génitaux internes :

1- Kyste de l’ovaire
2- Hydrométrocolpos 
3- Pathologie génito-urinaire
4- Discordance entre le caryotype et le sexe échographique

 




 

1. Anomalies des organes génitaux externes :

1) Chez le fœtus mâle :

a) Hypospadias :

L’hypospadias se définit comme l’abouchement anormal de l’orifice urétral sur la face ventrale du pénis, il peut-être antérieur (distal), médian ou postérieur (proximal).

C’est l’une des plus fréquentes anomalies génitales puisqu’elle est retrouvée chez 0,5 % des garçons nés vivants. Son étiologie n’est pas élucidée ; il pourrait s’agir d’un déficit en alpha réductase, enzyme transformant la testostérone en dihydrotestostérone, d’une déficience en testostérone ou encore d’une insensibilité pénienne à la testostérone.

En anténatal son diagnostic est souvent méconnu, ce qui est dommageable car si l’hypospadias est isolé il peut aussi s’associer à des anomalies génito-urinaires ou faire partie d’un syndrome malformatif.

Son aspect échographique et sa gravité varient en fonction de son étendue.
 

♦ L’hypospadias distal doit être suspecté chaque fois que le pénis paraît court et/ou incurvé (incurvation latérale ou ventrale) ou de forme anormale (extrémité de forme bulbaire).

Il faut cependant noter qu’une incurvation du pénis peut-être isolée sans hypospadias.

Cette découverte doit faire rechercher d’autres anomalies associées ; isolée elle est de bon pronostic.
 

♦ L’hypospadias proximal ou péno-scrotal est plus complexe et plus grave.

Dans sa forme majeure les bourrelets labio-scrotaux ne fusionnent pas ce qui donne un aspect de bourse fendue, le pénis est de petite taille, l’ensemble évoquant un sexe féminin.

L’existence des testicules dans les bourrelets est une aide au diagnostic.

Si les testicules restent dans les canaux inguinaux, le tableau constitue un piège diagnostique et fait porter un diagnostic erroné de sexe féminin.
 

b) Epispadias :

L’épispadias isolé est extrêmement rare ; dans 90 % des cas il est associé à l’exstrophie vésicale et l’anomalie urinaire est alors au premier plan.

Dans l’épispadias les moitiés droite et gauche du tubercule pénien ne se réunissent pas si bien que l’urètre s’abouche à la face dorsale du pénis.

La verge est petite, présente une coudure dorsale, le gland peut-être de forme aplatie.

Dans sa forme majeure la verge est bifide.
 

c) Micropénis :

Son diagnostic est subjectif car il n’existe pas de table de croissance.

La principale difficulté étant de ne pas le confondre avec un gros clitoris.

La distinction entre un scrotum et des bourrelets labiaux aidera au diagnostic.
 

d) Anomalies du contenu scrotal :

Au décours de la vie fœtale, le testicule situé au niveau de la 10ème vertèbre thoracique descend dans le scrotum suite à la condensation d’un ligament (le gubernaculum). Il est accompagné dans sa descente par une évagination péritonéale : le processus vaginal. Le canal inguinal, lui-même évagination de la paroi abdominale, livre passage à ces deux éléments. Le raccourcissement du gubernaculum et la pression des viscères abdominaux aidant, les testicules franchissent le canal inguinal pour descendre dans le scrotum. Par la suite le processus vaginal s’oblitère laissant un petit sac distal en avant du testicule, celui-ci finira par entourer tout le testicule au cours de l’enfance.

Dans des conditions pathologiques cette série d’événements peut se trouver perturbée :

– Ectopie :
Les testicules descendent dans le scrotum entre 28 et 34 SA.
Dans l’ectopie, le ou les testicules ne descendent pas, le scrotum apparaît vide et anormalement petit. 
A noter qu’il n’existe jamais d’hydrocèle dans ce cas.

– L’hydrocèle : c’est l’anomalie scrotale la plus commune.

Il existe une lame liquidienne anéchogène uni ou bilatérale augmentant le volume scrotal et encerclant les testicules apparaissant comme des petites zones denses. Elle est due à la non oblitération du processus vaginal, une petite quantité de liquide péritonéal emplit alors la vaginale.

– La hernie inguino-scrotale : le scrotum est anormalement très augmenté de volume, il contient des images cerclées anéchogènes correspondant à des images digestives siège d’un péristaltisme plus ou moins important.

– Images de calcifications intra scrotale.

2) Chez le fœtus féminin :

a) Hypertrophie clitoridienne :

Le clitoris est anormalement long et proéminent. La difficulté consiste à ne pas le confondre avec un pénis de petite taille.

Il faut s’aider de l’étude des bourrelets labiaux et de leur séparation.

Dans les grossesses plus évoluées on cherchera à mettre en évidence un utérus fœtal et on s’assurera de l’absence de gonade dans les bourrelets labiaux.

b) Anomalie des bourrelets labiaux :

On doit s’attacher à étudier leur séparation et leur échogénicité afin d’éliminer la présence d’un testicule. Souvent l’échographie sera hésitante voire incapable de reconnaître des éléments peu évocateurs.

En cas d’anomalies clitoridiennes et/ou labiales, il faudra faire une recherche étiologique.

Les hyperplasies congénitales des surrénales sont les causes les plus fréquentes de la virilisation des organes génitaux féminins. Elles sont dues à un déficit d’enzyme permettant la synthèse du cortisol. La carence en cortisol entraîne une augmentation de l’ACTH responsable de l’hyperplasie de la surrénale, il y a parallèlement une accumulation de précurseurs androgéniques. Il s’agit d’affection génétique de transmission autosomique récessive.

Parmi les autres causes de virilisation du fœtus féminin, on retrouve les intoxications exogènes (androgènes, progestérone), certains syndromes polymalformatifs et certaines causes sont idiopathiques.

c) Imperforation hyménéale :

L’imperforation hyménéale simple est rare puisque sa prévalence serait de 0,014 %.

Elle est la plupart du temps isolée et sporadique mais des formes familiales ont été décrites. Durant l’embryogenèse une membrane endoblastique divise la lumière du vagin, d’avec le sinus uro-génital, futur vestibule du vagin, cette membrane dégénère partiellement au 5ème mois pour ne laisser que l’hymen ; l’absence de dégénérescence de cette membrane constitue l’imperforation hyménéale.

En échographie, l’imperforation hyménéale peut passer complètement inaperçue sauf s’il se produit une accumulation de sécrétion génitale en amont. Il existe alors une image liquidienne anéchogène séparant chaque petite lèvre l’une de l’autre. En cas de sécrétion génitale importante l’image vulvaire est associée à un hydrocolpos ou un hydrométrocolpos.

2. Anomalies des organes génitaux internes :

1) Kyste de l’ovaire :

La découverte d’un kyste de l’ovaire chez le fœtus n’est pas une éventualité rare.

Dans 97 % des cas, il s’agit de kyste fonctionnel et leur pathogénie n’est pas tout à fait élucidée.

La folliculogénèse serait secondaire à un taux d’HCG placentaire élevé ou secondaire à une hypersensibilité de l’axe gonadotrope fœtal.

On trouve des kystes ovariens dans certaines pathologies (diabète, iso-immunisation, toxémie, hypothyroïdie fœtale) mais aussi hors de tout contexte anormal ; quoiqu’il en soit 33 % des nouveaux nés en sont porteurs.

Sur le plan échographique : le kyste ovarien non compliqué se présente comme une image ronde ou ovalaire, à parois extrêmement fines, à bords réguliers et à contenu anéchogène. Il est de situation latérale dans le pelvis mais peut se révéler très mobile dans la cavité abdominale; sa taille est variable, dans certains cas il peut occuper une grande partie de l’abdomen.

Il est généralement diagnostiqué  au 3ème trimestre de la grossesse. 

Il est nécessaire de répéter la surveillance échographique afin de dépister une complication (torsion, hémorragie) survenant dans 30 % des cas en anténatal.

La complication est relativement facile à repérer car le contenu échographique du kyste change : il devient hyperéchogène et hétérogène présentant plusieurs aspects possibles et ses parois ont tendance à s’épaissir.

On retrouve alors :

– Des images de cloisons intrakystiques qui seraient dues à des ponts de fibrine ou encore à des bandes de cellules nécrotiques qui se sont séparées de la paroi du kyste suite à l’ischémie,

– Un interface solide/liquide (correspondant à la sédimentation déclive de débris nécrotiques mobiles avec du liquide sus-jacent),

– Une hémorragie intrakystique isolée ou secondaire à la torsion le plus souvent avec une image dense échogène de caillot rétracté entouré de liquide et situé à la partie déclive du kyste,

– Dans quelques cas rares, le kyste peut se rompre et donner des images d’ascite. 

Le kyste simple ou compliqué peut comprimer les organes de voisinage et entraîner :

. une dilatation pyélocalicielle par compression urétérale,
. une compression digestive avec rupture en amont et signe de péritonite méconiale.

Lors de la surveillance échographique, il peut arriver que le kyste se résolve spontanément.
 

♦ Le diagnostic différentiel se fera :

– avec d’autres images kystiques :

. kyste mésentérique,

kyste du cholédoque situé dans l’hypochondre droit,

. kyste rénal dépendant du parenchyme rénal,

. kyste de l’ouraque sus-vésical accolé à la paroi de l’abdomen.

– avec une grosse vessie : les uropathies obstructives sont plus rares chez la petite fille,

– avec un hydrométrocolpos : mais celui-ci est plus médian et rétro vésical,
– avec un tératome sacro-coccyggien kystique avec développement pelvien mais l’image est très postérieure.

– avec une duplication digestive.
 

♦ Le diagnostic du kyste de l’ovaire permet une meilleure prise en charge anténatale et postnatale.


♦ La prise en charge anténatale est très débattue entre partisans de l’abstention thérapeutique et partisans de la ponction évacuatrice.


En résumé les abstentionnistes argumentent :
– sur la résolution spontanée de kyste ovarien même de bonne taille,
– sur le risque inhérent à la ponction : fissuration des membranes, infection,
– sur le risque de ponctionner ce qui n’est pas de l’ovaire ou de blesser un organe de voisinage.
 

Les interventionnistes argumentent : 
– sur le fait que des petits kystes peuvent se tordre,
– sur le fait que la survenue d’une complication est imprévisible,
– sur le fait que la torsion détruit l’ovaire,
– sur le fait qu’elle prévient la compression des organes de voisinage (hydronéphrose, rupture digestive en amont),
– sur le fait qu’elle permet une cytologie : 3 % des kystes étant des kystes organiques.

2) Hydrométrocolpos :

L’hydrométrocolpos est une dilatation kystique du vagin et de l’utérus secondaire à une obstruction basse.

Le mucus des glandes cervicales stimulées par les œstrogènes maternels s’accumule en amont de l’obstacle, dilatant le vagin, l’utérus voire les trompes avec passage péritonéal.

L’obstacle à l’écoulement du mucus peut-être dû à une imperforation hyménéale, à une membrane vaginale, à une atrésie vaginale ou peut-être dû à une embryopathie plus complexe telle qu’une anomalie du sinus urogénital.

C’est une malformation rare puisque sa prévalence est de 1/30.000 naissances.

En échographie anténatale : l’hydrométrocolpos apparaît comme une masse pelvienne hyperéchogène située derrière la vessie et en avant du sacrum.

Son contenu peut-être échogène en raison de particules mucoïdes, des cloisons peut-être observées ainsi qu’un niveau de sédimentation. 

Le diagnostic différentiel doit se faire avec :

– un kyste de l’ovaire généralement plus haut situé et plus latéralisé,

– un kyste mésentérique,

– un méningocèle antérieur (et on recherchera la lésion rachidienne),

– une tératome sacro-coccygien à développement antérieur.
 

Un piège doit être évité : celui de prendre l’hydrométrocolpos pour une vessie fœtale (cette dernière étant comprimée par l’hydrométrocolpos) à fortiori s’il existe une hydronéphrose associée (hydronéphrose due à la compression urétérale). Le tableau évoquant à tort une uropathie obstructive (cependant rare chez la fille).
 

Le diagnostic étant fait, il faudra rechercher les complications de l’hydrométrocolpos :

– compression des organes de voisinage :

. intestin avec dilatation digestive en amont,
. reins, uretère avec dilatation urétéro-pyélocalicielle.

– image de péritonite suite au passage de liquide mucoïde dans les trompes,

– hypoplasie pulmonaire avec élévation du diaphragme en cas de masse volumineuse.
 

Il faudra également rechercher les lésions associées en particulier :
– les malformations cloacales,
– le syndrome de Mac-Kusick-Kaufman associant à l’hydrométrocolpos une polydactylie et des malformations cardiaques, de transmission autosomique récessive.

3) Pathologie génito-urinaire :

La pathologie urinaire est au premier plan, les anomalies génitales constituent des signes d’appel supplémentaires. 

a) Exstrophie vésicale :

Elle survient dans 1 sur 50.000 naissances.

Hormis la vessie non visible, l’existence d’une plaque vésicale irrégulière sous ombilicale et le diastasis de la symphyse pubienne, on retrouve des anomalies génitales caractéristiques de la non fusion des tubercules génitaux :
– épispadias chez le garçon,
– bourrelets labiaux très écartés chez la fille.

b) Uropathie obstructive :

La pathologie urinaire est au premier plan avec mégavessie, dilatation urétérale et dilatation pyélocalicielle, oligoamnios. On observe alors une dilatation de l’urètre proximal (plus rarement distal), souvent attribuée à une valve de l’urètre chez le garçon.

4) Discordance entre le caryotype et le sexe échographique :

a) Pseudohermaphrodisme masculin :

Le caryotype peut être masculin chez un fœtus dont le sexe échographique est strictement féminin. Il faudra alors s’efforcer de mettre en évidence l’absence d’utérus fœtal ce qui peut être très difficile en échographie. Il peut s’agir d’une insensibilité totale aux androgènes, maladie récessive liée au chromosome X, ou d’une carence de la synthèse de testostérone par défaut enzymatique (20,22 desmolase, 17 hydroxylase, 17,20 desmolase, 17 bêta hydroxydeshydrogenase), toutes ces anomalies enzymatiques sont à transmission autosomique récessive.
L’existence des gonades et leur sécrétion d’hormone anti Müllérienne fait disparaître les canaux de Müller et l’utérus ne se développe pas.

b) Pseudohermaphrodisme féminin :

Dans sa forme complète, il est rare. L’anomalie des OGE résulte d’un excès d’androgènes, il existe des ovaires avec des organes génitaux internes.

La recherche échographique de l’utérus peut être intéressante.

Dans la majorité des cas il s’agit d’un déficit en 21 hydroxylase ou bien d’une exposition iatrogène aux androgènes ou encore d’une tumeur virilisante de l’ovaire maternel.

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