Le prurit est un phénomène fréquent au cours de la grossesse. Il correspond parfois à un tableau bien étiqueté : prurit gravidique, herpès gestationnis.

II peut également être le témoin d’un certain nombre de dermatoses, considérées comme spécifiques de la grossesse, mais dont l’autonomie est discutable.

1. Prurit gravidique :

– considéré comme une forme mineure de l’ictère gravidique récidivant ;

– le prurit est couramment observé au cours de la grossesse, particulièrement dans les derniers mois et curieusement lors d’une 2ème grossesse ;

– débute au niveau de l’abdomen, du tronc et des extrémités puis se généralise ;

– prurit intense avec lésions de grattage ;

– une cholestase doit toujours être recherchée :

. augmentation des transaminases, phosphatases alcalines, γ-GT et des 5 nucléotidases,

. la bilirubine est normale ou légèrement augmentée.

Le pronostic maternel est très bon : le prurit disparaît quelques jours après l’accouchement mais une récidive à chaque grossesse ultérieure ou lors de prise d’estroprogestatifs est possible.

Le pronostic fœtal est plus discuté : certains pensent qu’il y a un risque accru de prématurité et de mortalité périnatale.

Au plan thérapeutique :

– Si prurit modéré : un traitement local antiprurit (Sédax ® crème zones localisées) associé à des antihistaminiques non contre-indiqués pendant la grossesse (Polaramine ®, Primalan ®),

– si formes sévères (prurit intense lié à une cholestase gravidique sévère) : on utilisera exceptionnellement la colestyramine (Questran ®) : 2-3 sachets / j.

2. Herpès gestationnis ou Pemphigoïde gestationnis :

Maladie bulleuse auto-immune proche de la Pemphigoïde bulleuse qui survient pendant la grossesse chez les femmes multipares lors du 1er ou 2ème trimestre de la grossesse ou dans le post-partum immédiat.

Elle se caractérise par un dépôt de complément et éventuellement d’IgG à la jonction dermo-épidermique.

C’est une affection rare (1 cas pour 4.000 grossesses), pouvant mettre en jeu le pronostic fœtal.

L’éruption, souvent précédée de sensation de cuisson et de prurit, débute fréquemment au pourtour de l’ombilic par des papules érythémateuses et œdémateuses, souvent d’aspect urticarien sur lesquelles surviennent secondairement des vésicules ou des bulles de grande taille ; des aspects en cocarde sont courants.

Le traitement repose sur une corticothérapie générale (0,5 à 1 mg/kg/j de prednisone) jusqu’à l’accouchement et pendant le post-partum immédiat pour améliorer l’état de la mère, prévenir une extension des décollements cutanés et éviter les complications fœtales (MIU, prématurité).

3. Prurigos de la grossesse :

Il s’agit d’un ensemble d’entités mal définies.

On distingue des prurigos précoces et des prurigos tardifs.

1) Prurigos précoces :

Ils surviennent au cours du 1er trimestre :

– Le prurigo gravidique : fréquent, caractérisé par de petites papules prurigineuses, excoriées, des épaules, bras et cuisses, bénin, qui disparaît 3 mois après l’accouchement, souvent sur terrain atopique.

Traitement par antihistaminiques et corticoïdes locaux. Le pronostic materno-fœtal est excellent.

– La dermatose papuleuse de la grossesse : affection exceptionnelle formée de petites papules fermes, très prurigineuses, disséminées, surtout sur les membres.

Le pronostic est bon chez la mère, des récidives étant possibles lors d’autres grossesses. Par contre le pronostic fœtal serait sombre avec 30 % de mortalité.

Le traitement repose sur la corticothérapie par voie générale (1-2 mg/kg/j de prednisone).

2) Au dernier trimestre de la grossesse :

On peut observer fréquemment des éruptions regroupées sous le nom de PUPP (Prurit Urticarial Papules and Plaques of Pregnancy).

Ces lésions débutent les 5 dernières semaines de la grossesse, chez les primipares, sous forme de rash composé de papules et plaques urticariennes en cocarde, très prurigineuses, localisées sur l’abdomen, fesses, cuisses et sur les éventuelles vergetures.

Elles disparaissent quelques jours ou semaines après l’accouchement et peuvent récidiver lors de grossesses ultérieures.

Le diagnostic paraclinique est plutôt un diagnostic d’élimination : l’histologie avec immunofluorescence permet surtout d’éliminer un herpès gestationnis.

II n’y a aucun marqueur spécifique de la PUPP. La pathogénie reste inconnue.

Le traitement sera symptomatique : antiprurigineux locaux (Sédax ® crème zones localisées), corticoïdes locaux, et pour certains corticothérapie générale à faible dose (30-40 mg/j de prednisolone [Solupred ®]) ; les antihistaminiques sont inefficaces.

Bref :

Malgré l’apparente complexité de ces différentes étiologies, un bilan simple suffit, après avoir éliminé une autre cause de prurit chez la femme enceinte (gale, eczéma, urticaire, toxidermie).

Grossesse prurits
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