Le curage axillaire reste indispensable dans la chirurgie du cancer du sein, tant par son côté thérapeutique que par son côté pronostique. Cependant, la chirurgie du curage du creux axillaire est une chirurgie entraînant un taux de complications non négligeable. De nombreux efforts essaient donc d’en diminuer la morbidité.
On réalise un évidement cellulo-lymphatique, soit en continuité avec la pièce de mastectomie (en monobloc) soit en discontinuité (traitement conservateur).
1. Rappel anatomique : collecteurs lymphatiques du sein :
Les canaux lymphatiques glandulaires se jettent dans deux collecteurs principaux : axillaire surtout et mammaire interne. Cette dernière voie ne concerne que ¼ environ du drainage lymphatique de la glande mammaire.
1) Collecteurs lymphatiques mammaires internes :
Ces canaux traversent le grand pectoral puis les muscles intercostaux et rejoignent les ganglions situés à l’extrémité interne des espaces intercostaux de la région latéro‑sternale, au contact même des vaisseaux mammaires internes. Les ganglions sont donc retrouvés dans les trois premiers espaces intercostaux et aussi dans près de 2 cas sur 3 dans le 6ème espace intercostal. On estimait classiquement que la chaîne mammaire interne drainait surtout les quadrants internes et la région rétro‑aréolaire, les études isotopiques ont montré qu’il n’en était rien. La chaîne mammaire interne peut être rejointe après l’injection de n’importe quel quadrant mammaire.
2) Intérêt du curage de la chaîne mammaire interne :
LACOUR, dans un essai comparait l’opération de Halsted et l’opération de Halsted associée à un curage mammaire interne dans les cancers opérables d’emblée.
Il n’y avait pas de différence significative entre les taux de survie sans récidive ni métastase dans les deux groupes. Le curage de la chaîne mammaire interne a donc été abandonné.
3) Collecteurs lymphatiques axillaires :
Ils drainent 75 à 95 % du flux lymphatique situé au carrefour du membre supérieur et de la paroi thoraco‑abdominale.
Ils sont loin de recevoir exclusivement la lymphe provenant de la glande mammaire. On distingue classiquement 5 groupes (Cf. Chapitre Anatomie).
4) Intérêt du curage axillaire :
La connaissance du statut ganglionnaire histologique est déterminante pour la conduite thérapeutique.
L’existence ou non d’un envahissement ganglionnaire axillaire est le point essentiel au moment du diagnostic, du pronostic et du traitement. Le ganglion envahi est un indicateur de risque de métastase à distance. Il est indispensable d’effectuer une analyse anatomopathologique rigoureuse de l’ensemble des ganglions du curage axillaire, qui comporte 10 à 15 ganglions.
a) La stadification clinique est imprécise : Il n’y a pas de concordance entre la clinique et l’histologie.
L’examen clinique du creux axillaire est de sensibilité médiocre et de spécificité insuffisante.
b) L’atteinte histologique ganglionnaire est à l’heure actuelle l’index pronostique le plus fiable.
Selon l’absence ou la présence d’une atteinte ganglionnaire prouvée, il existe jusqu’à 3,5 fois plus de chances de survie à 15 ans s’il n’y a pas d’atteinte ganglionnaire.
– Importance du nombre de ganglions prélevés :
Un curage axillaire bas suffirait pour connaître le statut N+ ou N- de l’aisselle, mais le curage doit être complet pour connaître le nombre exact de ganglions N+, car plus le nombre de N+ augmente dans l’aisselle, plus le pronostic est défavorable.
L’évidement cellulo‑lymphatique axillaire doit donc être complet et le compte‑rendu anatomopathologique doit préciser :
‑ le nombre total de ganglions prélevés,
‑ le nombre de ganglions envahis,
‑ le type d’atteinte ganglionnaire,
‑ la présence ou non d’une rupture capsulaire,
‑ le niveau des ganglions atteints.
2. Indications du curage axillaire :
Il est indiqué dans tous les cas de formes opérables du cancer du sein :
– Il s’agit le plus souvent d’un curage de principe (N0) : le nombre de ganglions envahis étant le facteur pronostique le plus puissant ; le curage doit intéresser au moins 10 ganglions :
. en cas de ganglions suspects ou envahis, il doit être complet et intéresser les trois étages de BERG,
. lorsqu’il n’y a pas de ganglions perceptibles ou si ceux‑ci sont apparemment banals, on peut se contenter d’un curage de l’étage I et II de BERG avec un prélèvement d’au moins 10 ganglions.
– Il peut s’agir d’un curage de nécessité (N1). Dans les cancers localement évolués et dans les mastectomies dites de “propreté”, l’évidement axillaire évite une évolution ganglionnaire gênante, difficile à contrôler par la radiothérapie ou la chimiothérapie.
Rem 1 : Le curage axillaire n’a pas sa raison d’être dans les carcinomes lobulaires in situ, lésions à la limite de la malignité dont le risque de transformation en carcinome n’est pas démontré.
Rem 2 : Compte tenu de sa morbidité, il est discuté dans les cas où le risque ganglionnaire est considéré comme faible : les carcinomes intracanalaires et micro‑invasifs.
3. Traitement radical :
1) Repères musculaires et vasculaires :
Il est important, lorsqu’on aborde la région axillaire dans le but de faire un curage, de bien se représenter dans l’espace les parois du creux axillaire et les limites qui serviront de repères aux différents types de prélèvement.
Le tissu cellulo-ganglionnaire qui doit être prélevé est localisé entre le grand dorsal en dehors et en arrière, la paroi thoracique et le grand dentelé en dedans, la face antérieure de l’omoplate et le muscle sous-scapulaire en arrière, les vaisseaux axillaires en haut.
Les limites du curage ne vont apparaître et la graisse axillaire ne peut être bien individualisée qu’après avoir écarté le grand dorsal en bas et en dehors et le grand pectoral en haut et en dedans. Dès que l’on soulève le grand pectoral, on fait apparaître le bord externe du petit pectoral. Une fois ce bord dégagé, les deux muscles sont réclinés en bloc.
Pour que cet écartement soit efficace, il faut que les repères musculaires soient dégagés sur une partie importante de leur longueur, et que les muscles soient détendus, grâce à la position du bras de la patiente maintenu au-dessus de sa tête. Dans cette position, l’axe vasculaire prend une direction oblique en haut et en dehors.
Cet axe vasculaire est le troisième repère chirurgical important. Son abord constitue le premier temps du curage.
2) Abord de la veine axillaire :
L’artère n’a jamais besoin d’être repérée car elle est située en arrière et au-dessus de la veine.
Pour aborder la veine, il faut effondrer progressivement, de dedans en dehors, l’aponévrose clavipectoro-axillaire. Ce tissu cellulo-aponévrotique est toujours bien individualisé et facile à repérer en arrière de la partie haute du bord externe du grand pectoral et de son tendon qui doivent être réclinés légèrement à l’aide d’un écarteur de Farabeuf.
Plus en dehors, cette aponévrose clavipectoro-axillaire s’épaissit et doit être également incisée. Plusieurs ligatures doivent être placées à ce niveau ; c’est la partie haute du prolongement axillaire du sein.
L’effondrement de l’aponévrose clavipectoro-axillaire permet de pénétrer dans la loge axillaire à l’intérieur de laquelle se trouve le paquet cellulo-ganglionnaire. Dans la graisse située en arrière de l’aponévrose clavipectoro-axillaire, la pointe des ciseaux, écartée doucement, ouvre des fenêtres au fond desquelles apparaît la paroi bleutée de la veine axillaire. Dès que le contact est pris avec la veine, il faut la dégager sur toute la longueur de son trajet axillaire sans chercher à rentrer dans sa gaine périvasculaire comme on le préconisait avant. Le dégagement se fait au niveau du bord inférieur de la veine qui va constituer la limite supérieure du curage.
La prudence impose la ligature de tous les petits tractus fibreux (pour diminuer le risque de lymphocèle).
La dissection se poursuit en liant plusieurs veines afférentes qui abordent la veine axillaire à l’union de sa face antérieure et de sa face inférieure. Au nombre de celles-ci, la volumineuse veine mammaire externe est facilement repérable.
3) Dissection du sommet de l’aisselle :
Celle-ci ne peut être effectuée que grâce à un écartement du tendon du petit pectoral.
Il convient auparavant de repérer le nerf pectoral médial, en dégageant le bord externe du petit pectoral. Son respect met à l’abri d’une atrophie des faisceaux externes du grand pectoral, préjudiciable sur le plan morphologique. L’aide doit faire attention à ne pas l’écraser avec son écarteur. C’est ici que la mobilisation du bras est précieuse, permettant un relâchement notable du pectoral. Il est pratiquement toujours possible par cette manœuvre de remonter au-dessus du petit pectoral. Tout en haut, au-dessus de son bord supérieur sous la clavicule, le sommet de la pyramide cellulo-ganglionnaire est progressivement libéré, chaque pédicule étant ligaturé au fil résorbable. Ce sommet est clivé sans difficulté au gril costal et récliné progressivement vers le bas.
Un fil repère est laissé à son extrémité supérieure pour orienter l’examen anatomopathologique. On peut également mettre un autre repère au niveau où la graisse croise les bords supérieurs et inférieurs du petit pectoral pour marquer sur le spécimen les limites des différents étages.
Enfin, on peut aussi isoler chaque étage ganglionnaire et l’envoyer séparément au laboratoire. Les repères permettent de mieux étudier le niveau de l’envahissement ganglionnaire et l’envahissement des étages supérieurs ne se fait pratiquement jamais sans un envahissement de l’étage inférieur.
Au cours de la dissection du sommet de l’aisselle, le seul danger est de blesser la veine axillaire si l’exposition est insuffisante. Plus rarement, on peut être gêné par une hémorragie due à une blessure des vaisseaux pectoraux qui traversent la région au niveau du troisième étage ganglionnaire. En cas de blessure vasculaire difficile à contrôler, il ne faut pas hésiter à sectionner le tendon du petit pectoral pour avoir un meilleur jour.
4) Rôle de la main mineure :
Le creux axillaire en position relâchée est un espace virtuel où la graisse axillaire est plaquée contre le gril costal par le muscle grand dorsal. La dissection est grandement facilitée lorsqu’on recrée l’espace à trois dimensions en écartant le bord externe du grand dorsal de la paroi costale couverte par le grand dentelé. Ce geste est réalisé par les doigts de la main mineure de l’opérateur plutôt qu’avec un écarteur qui nécessiterait un troisième aide à côté de l’opérateur.
Le paquet ganglionnaire se trouve alors rassemblé dans l’écartement des doigts de l’opérateur qui peut ainsi contrôler à tout moment la progression de sa dissection et la qualité de cette dissection.
Cette main mineure, au lieu de tenir la pince à disséquer qui ne pourrait lui faire jouer qu’un rôle de traction limité, va servir à la fois à écarter les parois du curage par les doigts extérieurs et en même temps attirer vers le bas le paquet ganglionnaire grâce à l’index et au médius. Ce geste n’est pas classique et beaucoup d’opérateurs préfèrent attirer le curage à l’aide d’une pince en cœur tenue par l’aide, tandis qu’un deuxième aide écarte le grand dorsal en dehors.
Mais la difficulté principale se situe au niveau de l’écartement du grand puis du petit pectoral. Cet écartement permet l’exposition de la veine axillaire jusqu’au voisinage de la clavicule lorsqu’il est correctement fait et lorsque les muscles sont en position relâchée avec le bras replié au-dessus du champ opératoire. C’est la raison pour laquelle il paraît préférable de libérer l’aide principal pour qu’il se concentre sur l’écartement des muscles pectoraux et l’exposition du sommet de l’aisselle. Ce temps d’exposition est capital car il va être responsable de la qualité de la dissection du curage.
Lorsque la dissection du sommet de l’aisselle est terminée, l’isolement des ganglions du premier étage se poursuit.
5) Premier étage :
La dissection du premier étage se poursuit de haut en bas selon la même logique.
L’exposition de la région nécessite un écartement plus léger des pectoraux. En dehors, le grand dorsal, dont la face interne a été dégagée, est écarté par la main gauche de l’opérateur qui en même temps récline le paquet ganglionnaire vers le bas.
Le bras de la malade peut être replacé en position horizontale sur l’appui-bras. La dissection du premier étage est plus facile dans cette position, grâce à une exposition meilleure notamment de la veine axillaire qui prend alors un trajet rectiligne et horizontal. Cette dissection va consister non seulement à libérer la graisse et les ganglions des parois vasculaires en haut et musculaires en dehors et en dedans, mais aussi à les séparer des deux axes vasculo-nerveux qui le traversent et qui doivent être préservés : le pédicule du grand dorsal et le nerf du grand dentelé. Ces deux axes ont une direction verticale qui suit le sens de la dissection. Le paquet ganglionnaire est également traversé à sa partie moyenne par les nerfs perforants intercostaux, horizontaux, qui sont généralement sacrifiés au cours de la dissection. Au nombre de deux en moyenne, ils suivent un trajet grossièrement parallèle à la veine axillaire.
La dissection de cet étage ganglionnaire va commencer par repérer l’axe vasculo-nerveux scapulaire inférieur et le nerf du grand dentelé contre le plan musculaire profond. Puis le plan ganglionnaire sera séparé en dedans du grand dentelé, en arrière du sous-scapulaire et en dehors de la face profonde du grand dorsal.
En haut, la découverte du nerf du grand dentelé se fait en longeant la paroi costale. Le nerf à ce niveau est toujours profondément situé, en arrière du plan de la veine axillaire. Les ciseaux qui séparent le plan cellulo-ganglionnaire du grand dentelé ramènent en dehors, une fine aponévrose dans laquelle se situe le nerf. Celui-ci ne reste pas collé au plan musculaire et apparaît sous forme d’un cordon blanc nacré dans le tissu cellulo-ganglionnaire récliné en dehors par la main gauche de l’opérateur. Il peut en être séparé facilement de la pointe des ciseaux d’un seul geste et rabattu contre la paroi depuis la face inférieure de la veine axillaire jusqu’à la partie basse de l’aisselle.
On se porte alors en dehors pour disséquer le pédicule scapulaire inférieur. Ce pédicule est repéré profondément à l’union du tiers externe et des deux tiers internes de la veine axillaire contre la paroi postérieure constituée par le muscle sous-scapulaire en avant de l’omoplate. Il est toujours plus profond qu’on ne le pense quand on n’est pas familiarisé avec le curage axillaire, en arrière du plan sagittal de la veine axillaire. On découvre en premier la veine et l’artère toute proche en dehors ou en dedans, plus souvent en arrière. C’est un pédicule vasculaire volumineux d’environ 2 mm de diamètre, le plus volumineux de la région après le pédicule axillaire. Le nerf du grand dorsal est repéré sur le même plan que le pédicule scapulaire en dedans de lui. D’abord parallèle à la face inférieure de la veine axillaire, il s’incurve vers le bas pour rejoindre le pédicule scapulaire et prendre une direction verticale. C’est au niveau de cette courbe à concavité interne que la pointe des ciseaux va le repérer et l’isoler.
Un à deux centimètres au-dessous de la veine axillaire, les trois éléments veineux, artériel et nerveux du pédicule scapulaire inférieur sont réunis. La dissection du tissu cellulo-graisseux permet de l’isoler.
La pointe des ciseaux introduite verticalement de haut en bas, au contact du pédicule vasculo-nerveux, la convexité des ciseaux s’adossant au pédicule, on peut dégager très facilement le tissu cellulo-ganglionnaire en avant des vaisseaux sans risquer de les blesser. Puis les ciseaux séparent la graisse du pédicule au niveau de sa face externe et ils peuvent alors descendre le tissu ganglionnaire localisé entre le pédicule et la face profonde du muscle grand dorsal raclant en arrière le corps charnu du muscle sous-scapulaire. En dedans, le pédicule du grand dorsal est disséqué de la même façon en prenant garde de lier une ou deux petites branches artérielles nées de l’artère du grand dorsal. Toujours de la pointe des ciseaux, le paquet ganglionnaire situé entre en dehors le pédicule du grand dorsal et en dedans le nerf du grand dentelé sur son muscle, est rabattu vers le bas en raclant sans hémostase la face antérieure du muscle sous-scapulaire.
Par contre, il faut rappeler une fois de plus combien il est important de faire des ligatures sur tous les pédicules cellulo-graisseux sous la veine axillaire, qu’ils contiennent ou non des pédicules vasculaires visibles, pour assurer une meilleure lymphostase.
Il reste maintenant à dégager le paquet ganglionnaire de la terminaison du pédicule du grand dorsal en dehors. En bas, la limite est déterminée par la branche antérieure des vaisseaux scapulaires inférieurs, qui rejoint horizontalement le grand dentelé au niveau du cinquième espace intercostal.
En dehors, le dégagement des ganglions compris entre le pédicule et le muscle grand dorsal constitue une manœuvre de décroisement qui est facilitée par la traction légère sur le pédicule au moyen d’un écarteur ou d’un lacs. Il faut également disséquer la terminaison des branches du pédicule vasculo-nerveux pour assurer la qualité du décroisement lorsque les ganglions ont été libérés et rabattus en dedans avec l’ensemble de la pièce, les branches vasculaires doivent être visibles jusqu’à leur pénétration dans le muscle et les parois musculaires doivent être totalement mises à nu.
La pièce ganglionnaire ne tient plus que par les attaches à la glande mammaire en bas et en dedans. Elle est séparée des vaisseaux du grand dentelé en évitant leur blessure et en dedans, contre la paroi costale, il faut se méfier du trajet du nerf grand dentelé qui a tendance à devenir plus antérieur sur le muscle et peut être blessé par inadvertance si l’on n’a pas poursuivi sa dissection suffisamment bas.
Il reste à séparer le paquet ganglionnaire de la glande mammaire, ce qui peut être fait avec quelques ligatures grossières puisque la glande va être enlevée. On peut aussi laisser le paquet ganglionnaire fixé à la glande mammaire, ce qui réalise une mastectomie curage axillaire en monobloc.
La fermeture se fait sur drainage aspiratif de Redon. Un tel curage doit ramener en moyenne 15 ganglions.
Il n’est donc pas nécessaire de sectionner les pédicules vasculaires ou d’enlever le petit pectoral pour réaliser un bon curage.
La pièce doit être orientée par des fils repères et confiée intacte au pathologiste afin que celui-ci puisse dresser la carte de l’envahissement ganglionnaire dans les meilleures conditions.
En résumé :
1 : L’effondrement de l’aponévrose clavipectoro‑axillaire va permettre de découvrir la veine axillaire sous-jacente.
2 : La veine axillaire est repérée, son bord inférieur est disséqué et les veines afférentes sont liées.
3 : La dissection démarre derrière le petit pectoral (deuxième et si possible troisième étage), le nerf externe du grand pectoral (nerf pectoral médial) est préservé. La main gauche écarte le grand dorsal ouvrant l’espace virtuel du creux axillaire.
4 : La dissection ramène le tissu cellulo‑graisseux du sommet de l’aisselle vers le bas et découvre le deuxième perforant intercostal qu’elle va essayer de respecter pour préserver la sensibilité de la face interne du bras.
5 : Le tissu cellulo‑ganglionnaire constituant le curage axillaire est rabattu vers le bas jusqu’à sa limite inférieure constituée par les veines du grand dentelé.
6 : Parois musculaires du creux axillaire.
Le creux axillaire est limité en dehors par le corps aplati du grand dorsal, en arrière par le sous-scapulaire, en dedans par le grand dentelé, en haut par le petit pectoral recouvert par le grand pectoral.
3. Traitement conservateur :
Il est toujours préférable de séparer l’incision du curage et celle de la tumorectomie.
Pour le curage, deux tracés d’incision peuvent être en principe proposés (fig. a) : soit une incision longitudinale, parallèle au bord externe du grand pectoral et situé quelques centimètres en arrière de lui, soit une incision transversale épousant la concavité de l’aisselle et suivant la partie la plus haute de celle-ci (tracée du relief du muscle grand pectoral au relief du muscle grand dorsal). Cette deuxième incision ne donne pas de brides rétractiles et laisse en général une cicatrice très peu visible, mais elle perturbe un peu les points de repère habituels de l’opérateur lorsqu’il n’en a pas l’habitude.
L’installation de la malade est la même que pour l’opération princeps, bras libre enveloppé dans un jersey stérile.
Cette incision mesure entre 8 et 10 cm de long ; elle ne doit jamais déborder le bord externe du relief du grand pectoral pour éviter une bride cicatricielle secondaire.
Le décollement des berges cutanées doit être suffisant pour retrouver les repères habituels que constituent le grand et petit pectoral en haut et en dedans, le grand dorsal en dehors et la veine axillaire en haut.
Les bords externes des muscles grands et petits pectoraux sont alors disséqués et relevés à l’aide d’écarteurs de façon à repérer les éléments vasculo-nerveux qui sont destinés à ces deux muscles (fig. b et c). Il existe fréquemment un pédicule vasculaire partant du pédicule vasculo-nerveux des grands et petits pectoraux à direction descendante. Il est nécessaire de sectionner ce pédicule afin de poursuivre la dissection du creux axillaire. Il faut alors repérer les rameaux transversaux des nerfs perforants des 2ème et 3ème espaces intercostaux, une branche du 2ème nerf intercostal s’anastomosant fréquemment avec l’accessoire du brachial cutané interne et devant être respectée de façon à éviter les paresthésies de la face interne du membre supérieur. On effectue ensuite la dissection de l’aponévrose du grand dentelé après repérage de son nerf, puis l’ablation des groupes ganglionnaires mammaire externe, scapulaire inférieur et central en s’efforçant de respecter les différents pédicules vasculo-nerveux et particulièrement celui du grand dorsal.
Le sein est laissé en place et le curage est séparé de lui dans tous les cas. A ce niveau la tentation est de sectionner rapidement le paquet ganglionnaire pour l’envoyer au laboratoire. Il est très important au contraire de ligaturer très soigneusement le moignon glandulaire externe qui contient la majeure partie des canaux lymphatiques provenant du sein resté en place. Si ces canaux ne sont pas liés, le risque de lymphocèle secondaire est plus important que dans la mastectomie.
En fin d’intervention (fig. d), doivent donc être visibles : la veine axillaire mais sans qu’elle ait été “pelée”, le paquet vasculo-nerveux du grand dorsal, le nerf du grand dentelé et les rameaux perforants des nerfs intercostaux.
Le drainage du creux axillaire sera de type aspiratif et laissé en place jusqu’à ce qu’il ne soit plus productif.
La pièce du curage doit être orientée de façon à permettre aux anatomopathologistes de préciser les différents relais ganglionnaires atteints.
4. Complications des curages axillaires :
1) Complications immédiates :
– Elles sont dominées par la lymphocèle (ou lymphorrhée) : sa fréquence est diversement appréciée, allant de 24 à 52 % des curages ; elle est plus fréquente chez les obèses.
Elle est due aux blessures des vaisseaux lymphatiques et à l’ablation du tissu cellulo-graisseux qui crée un espace mort.
L’adhérence des plans superficiels aux plans profonds est rendue difficile par les mouvements respiratoires et de l’épaule. Ces mouvements de plus agissent comme une pompe visant à remplir de lymphe le creux axillaire.
Sa prévention justifie un drainage aspiratif prolongé, associé éventuellement à un pansement compressif ; en cas de récidive après ablation du drainage aspiratif, il est justifié d’avoir recours aux ponctions à l’aiguille (il ne faut pas rouvrir la cicatrice).
‑ L’hématome est une complication non spécifique et rare.
‑ L’infection, également non spécifique, est favorisée par les collections liquidiennes et les altérations des moyens de défenses de l’hôte.
‑ Les plaies vasculaires :
. celle de la veine axillaire risque d’augmenter le lymphœdème,
. celle du pédicule scapulaire inférieur compromet le lambeau musculo‑cutané du grand dorsal qui ne peut plus être utilisé lors d’une reconstruction.
‑ Les plaies des nerfs :
. celle du grand dentelé entraîne une gêne fonctionnelle et une scapula alata,
. celle de l’anse des pectoraux occasionne une atrophie du grand pectoral empêchant la mise en place d’une prothèse sous pectorale,
. celle du nerf inter‑costo‑brachial est source d’une hypoesthésie de la face interne du bras et du creux axillaire.
2) Complications tardives des curages axillaires :
Elles sont dominées par le lymphœdème du bras.
‑ Le lymphœdème.
‑ Les cordes fibreuses : elles sont une conséquence de la réaction inflammatoire post‑opératoire. Elles se développent en regard de la cicatrice du curage axillaire et envoient de véritables “tentacules” fibreuses sur la face interne du membre supérieur allant jusqu’au coude, parfois même jusqu’au poignet, le long de la voie lymphatique bicipitale.
Ce phénomène est douloureux et entraîne une gêne fonctionnelle pouvant aboutir à une épaule bloquée.
Traitement : Casser ces cordons fibreux par une technique spécifique qui respectera au maximum les néo-canaux lymphatiques de suppléance (en voie de formation ou déjà fonctionnels). Ceux-ci sont très fragiles, a fortiori si la malade a été irradiée.
‑ Les lymphangites : Déclenchées par une blessure du membre supérieur, parfois très superficielle et qui est passée inaperçue, elles donnent un tableau fébrile avec une inflammation importante de tout le membre supérieur.
Il faut naturellement éviter tout traumatisme sur le membre où a été réalisé le curage et les traiter impérativement dès leur apparition par une antibiothérapie et des anti‑inflammatoires.
Leur prévention est la protection du revêtement cutané : il faut soigneusement informer les malades qui ont eu un curage axillaire d’éviter les blessures de ce membre.
– Les plexites : il s’agit plus de complications radiothérapiques et on en rapproche les parésies et les paralysies du membre supérieur.
‑ Les raideurs de l’épaule : elles sont le plus souvent transitoires et consécutives à une immobilisation prolongée due à des complications postopératoires telles qu’une lymphorrhée chronique. La kinésithérapie prolongée doit permettre de récupérer la fonction normale de l’épaule.
5. Conclusion :
La chirurgie ganglionnaire dans le traitement du cancer du sein reste d’actualité tant que l’on ne trouvera pas d’indicateur pronostique meilleur que le nombre de ganglions axillaires envahis, le curage fera partie du traitement locorégional initial du cancer du sein.
Epargner les séquelles de ce curage est un problème important ; de nombreux acquis y contribuent :
‑ une technique chirurgicale bien codifiée,
‑ et une limitation de l’étendue des curages.