1. Définition :

Une anémie se définit par une baisse de l’hémoglobine au-dessous de 13 g/dl chez l’homme, 12 g/dl chez la femme et 11 g/dl chez la femme enceinte.

Une anémie est macrocytaire lorsque le VGM excède 100 fL, microcytaire lorsqu’il est inférieur à 80 fL et normocytaire lorsque le VGM s’inscrit entre 80 et 100 fL.

Elle est qualifiée de régénérative lorsque la moelle osseuse est capable de la compenser (réticulocytes > 150 G/L) ou arégénérative (réticulocytes < 80 G/L) dans le cas contraire. 

2. Rappel physiologique :

Il existe au cours de la grossesse une augmentation du volume sanguin, qui est relativement plus importante pour le volume plasmatique (+ 45 %) que pour le volume érythrocytaire (+ 25 %) ⇒ il en résulte une HEMODILUTION, qui a été appelée “anémie physiologique de la grossesse”, si bien qu’une anémie ne doit être prise en considération que lorsque le taux d’Hb est < 11 gr/100 ml de sang.

La grossesse en elle-même n’entraîne pas d’état anémique vrai, mais elle révèle le plus souvent un état anémique préexistant, volontiers aggravé dans le post-partum s’il n’a pas été corrigé en cours de grossesse.

* Pronostic maternel : l’anémie augmente le risque de mort maternelle pendant la grossesse. Une hémorragie importante au moment de l’accouchement chez une femme déjà anémiée est doublement dangereuse.

* Pronostic fœtal : l’anémie maternelle a été mise en cause dans l’augmentation du risque d’ABRT (?), d’accouchement prématuré, de souffrance fœtale et de mort périnatale.

3. Symptomatologie :

1) Pâleur cutanéo-muqueuse : les conjonctives de la malade sont roses ou même blanches.

2) Signes fonctionnels (hypoxie fonctionnelle) :

a) Anémie chronique : peut être bien supportée, car il y a une adaptation de l’organisme :

– signes de souffrance cérébrale : céphalées, vertiges, lipothymie, bourdonnements d’oreilles, baisse de l’acuité visuelle.

Si l’anémie est extrêmement sévère (Hb < 2 gr) : anoxie cérébrale (coma anémique).

– signes de souffrance myocardique : tachycardie, précordialgies, palpitations, dyspnée, et à l’auscultation : souffle systolique fonctionnel.

Pour tous les autres symptômes (de la carence en fer) : Cf chapitre spécial

b) Anémie aiguë : s’installe brutalement. Pas de phénomène d’adaptation.

En plus de tous les signes qu’on peut rencontrer dans l’anémie chronique, on peut avoir une défaillance cardiaque aiguë (collapsus CV).

4. Catégories d’anémie :

Il y a trois catégories d’anémies : les anémies microcytaires, les anémies non microcytaires régénératives, les anémies non microcytaires non régénératives.

– Lorsque l’anémie est microcytaire : le diagnostic est orienté par les marqueurs du cycle du fer.

– Lorsqu’elle est régénérative (“périphérique”) : elle évoque avant tout une anémie hémolytique et le test de Coombs est l’examen principal.

– Si elle est arégénérative (“centrale”) : un myélogramme est souvent nécessaire.

5. Classification détaillée :

1) Anémies microcytaires (VGM < 80 fL chez l’adulte) : Cf chapitre spécial

a) Avec fer sérique bas (< 10 µmol/l) :

– Carences en fer : anémies ferriprives.

– Troubles de l’utilisation du fer : anémies inflammatoires

b) Avec fer sérique normal :

– Troubles de la synthèse de la globine : thalassémies

c) Avec fer sérique augmenté (parfois normal) :

– Trouble d’incorporation du fer dans l’hémoglobine (⇒ insuffisance de synthèse de l’hémoglobine) : anémies sidéroblastiques.

Anémies microcytaires : 3 étiologies principales :

1) Avec fer sérique bas (< 10 µmol/l) : ⇒ mesure de la CTFT :

 Augmentée : anémies ferriprives (carences en fer).

 Normale ou diminuée : anémies inflammatoires (troubles de l’utilisation du fer).

2) Avec fer sérique normal :

 Thalassémies et les autres hémoglobinoses microcytaires (C, D, E) (troubles de la synthèse de la globine).

3) Avec fer sérique augmenté (parfois normal) :

 Anémies sidéroblastiques (trouble d’incorporation du fer dans l’hémoglobine).

2) Anémies non microcytaires régénératives :

Toute nouvelle anémie impose une numération des réticulocytes (non comprise dans l’hémogramme standard) soit par coloration sur lame, soit par cytométrie en flux.

Si les réticulocytes sont > 150 G/L : l’anémie est régénérative.

Il existe une hyperdestruction des GR (cause périphérique).

Il y a deux causes d’anémie régénérative : l’hémorragie aiguë et l’hémolyse. 

a) Saignements et réparations d’anémie :

– Une anémie régénérative survient 48 heures après les saignements aigus qui sont facilement reconnus s’ils sont extériorisés, plus difficilement lorsqu’ils restent occultes.

– Une réticulocytose accompagne également la réparation d’une anémie traitée (transfusion, perfusion d’EPO, injection de vitamine B12…). 

b) Anémies hémolytiques :

En dehors de ces deux cas, suites d’une hémorragie aiguë ou réparation d’une anémie, l’anémie régénérative est une anémie hémolytique.

Une anémie hémolytique se reconnaît à :

– l’élévation de la bilirubine libre et du fer sérique (hémolyse intratissulaire) ;

– l’haptoglobine effondrée ou nulle (hémolyse intravasculaire) ;

– l’augmentation des LDH (témoin de la gravité). 

Anémies hémolytiques de causes évidentes :

– De nombreuses hémolyses surviennent dans un contexte clinique aigu, évocateur : septicémie, paludisme, morsure de serpent, intoxication aiguë (champignons) ou encore : maladie hémolytique du nouveau-né.

– Hormis ces situations cliniques évidentes, le diagnostic d’une hémolyse repose sur le test de Coombs direct (ou test direct à l’antiglobuline), qui permet de reconnaître les anémies hémolytiques acquises immunologiques. 

Anémies hémolytiques : Cf chapitre spécial

3) Anémies non microcytaires arégénératives :

Les anémies arégénératives ou médullaires s’observent lorsque la moelle ne fonctionne pas (cause centrale) :

– par faute de substrats (folates, vitamine B12…), d’érythropoïétine (EPO) ;

– ou lorsque les cellules médullaires sont incompétentes ou trop peu nombreuses. 

a) Anémies arégénératives faute de substrats ou d’érythropoïétine :

Le contexte clinique des anémies arégénératives de ce premier groupe est souvent évident :

– anémie d’une insuffisance rénale chronique (par insuffisance de production rénale d’EPO) ;

– anémie de l’insuffisance hypophysaire (par déficit thyréotrope et somatotrope) ou de l’insuffisance thyroïdienne.

Ces causes écartées, le dosage de l’acide folique et de la vitamine B12 permet de reconnaître les anémies mégaloblastiques.

En l’absence des causes précédentes, il faut faire un myélogramme qui permettra de reconnaître syndromes myéloprolifératifs, myélodysplasies et aplasies médullaires. 

b) Anémies arégénératives par prolifération, altération ou raréfaction des cellules hématopoïétiques :

Trois possibilités au myélogramme : moelle riche, bloquée ou pauvre. 

– Moelle riche hypercellulaire :

Lorsque le myélogramme montre une infiltration cellulaire, on est en présence d’une leucémie aiguë, d’un myélome ou d’un envahissement médullaire par un lymphome agressif ou les métastases d’un cancer. 

– Moelle bloquée (cellularité médullaire normale mais hématopoïèse inefficace) :

Si, chez un adulte de plus de 50-60 ans, l’anémie, arégénérative, s’accompagne d’une moelle riche et bloquée, il s’agit d’une myélodysplasie (anémie “réfractaire”).

Sur le myélogramme, il faut compter le nombre de blastes, celui des sidéroblastes après coloration de Perls, faire un caryotype et/ou une FISH.

L’anémie peut alors être classée selon l’OMS : anémie réfractaire avec sidéroblastes en couronne (ARS), avec excès de blastes (AREB 1 et 2), cytopénie réfractaire avec dysplasie… 

– Moelle pauvre ou déserte :

Dans ce cas, le diagnostic d’aplasie médullaire est le plus probable. Il sera confirmé par une biopsie médullaire.
NB : Si l’aplasie médullaire peut être de cause toxique, médicamenteuse ou infectieuse, elle reste souvent idiopathique pendant la grossesse et régresse parfois après l’accouchement.

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