1. Vécu du couple infertile :

– Phénomène de perte et réaction dépressive : se reproduire, fonder une famille sont des besoins naturels qui canalisent une grande part de l’énergie vitale. L’impossibilité d’y parvenir peut provoquer une véritable crise existentielle. La crainte d’être stérile, et a fortiori la confirmation de cette crainte induisent un sentiment de perte, dans l’acceptation psychologique du terme : perte d’une personne qui n’a pas encore d’existence concrète, mais qui est très investie symboliquement ; perte de l’espoir d’être parent, avec les connotations personnelle, sociale et religieuse que cela suppose ; perte de l’estime de soi en tant qu’être normal, car fertile. Tout cela aboutit souvent à une réaction dépressive, parfois sévère, fré­quemment associée à un sentiment de culpabilité et à une mentalisation obsédante de tout ce qui a rapport avec la fertilité, avec crise de désespoir lors de chaque nouvel épisode menstruel. Cela bien souvent alors que le couple cache son désarroi au médecin pour sauver la face.

– Sentiment d’injustice et révolte : cette autre réaction à la stérilité est aussi fréquente que normale. Elle peut perturber les réactions sociales et spécialement la relation médicale. Il faut éviter de prendre au pied de la lettre les attitudes agressives de certains patients. C’est parfois leur façon d’exprimer leur révolte contre le sort. Riposter agressivement serait malencontreux.

– Cercle vicieux lié au stress : l’infertilité est source de stress, et le stress peut à son tour perturber la fertilité. Ce cercle vicieux joue un rôle fondamental dans la constitution (affolement après quelques cycles sans conception) ou l’aggravation de certaines infertilités. Les mécanismes les mieux connus sont les altérations de la qualité du sperme et surtout de l’ovulation, mais il en existe probablement d’autres.

– Influence de l’infertilité sur la vie sexuelle : elle est très importante dans certains cas. La vie sexuelle des couples infertiles ne diffère pas nettement de celle des fertiles jusqu’à leur première consultation. L’incidence des problèmes sexuels augmente ensuite franchement tant chez la femme que chez l’homme. L’homme est le plus concerné car sa fonction sexuelle est plus vulnérable à la pression de performance : la révélation de sa stérilité le rend souvent temporairement impuissant. De plus, il est plus perturbé par la programmation des rapports en fonction de la courbe de température ou d’un test post-coïtal. Cet examen constitue une véritable intrusion d’un tiers dans la vie sexuelle du couple. L’homme peut devenir plus ou moins rapidement incapable de s’exécuter sur commande, faute d’érection ou d’éjaculation. Cela ne fausse pas que les spermogrammes et les tests post-coïtaux, et peut contribuer à retarder la grossesse, faute d’éjaculation au moment approprié.

2. Vécu du médecin :

Il est lui-même plus ou moins impliqué émotionnellement dans ce type de prise en charge. Une telle implication est importante, car les patients sont plus en confiance, et vivent mieux leur problème s’ils sentent leur médecin chaleureux et motivé, que s’ils le sentent froid et indifférent. Mais toute implication émotionnelle expose à perdre son objectivité. L’infertilité persistante met le médecin en situation d’échec, le rend plus vulnérable à la pression du couple. Il pourrait en résulter un activisme médical non justifié.

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