1. Méthodes thérapeutiques :
Le traitement des fibromes utérins est adapté à chaque patiente en fonction de plusieurs facteurs :
– l’intensité des symptômes,
– la taille et la localisation des fibromes,
– l’âge,
– le désir de grossesse,
– et les préférences personnelles.
Les approches thérapeutiques se regroupent en trois catégories principales : médicales, chirurgicales et mini-invasives/interventionnelles.
1) Traitement médical :
Il vise principalement à soulager les symptômes et, dans certains cas, à réduire temporairement la taille des fibromes :
a) Pilules œstroprogestatives :
Elles peuvent améliorer les symptômes fonctionnels du fibrome, notamment les saignements abondants, et en même temps régulariser les cycles, mais effet variable sur les fibromes.
b) Progestatifs :
Les progestatifs (oraux, injectables, implant) visent à corriger l’insuffisance lutéale permettant ainsi de réduire les phénomènes hémorragiques (ménométrorragies).
Ils peuvent induire une aménorrhée ou réduire les saignements.
Pas d’influence sur le volume des myomes, ni leur croissance, par contre ils agissent sur l’endomètre qui est le siège d’une hyperplasie.
Ils sont néanmoins le traitement de première intention, en raison de leur faible coût, de leur bonne tolérance et de leurs effets sur les autres symptômes de l’insuffisance lutéale fréquemment retrouvée à cet âge.
Pour cette raison, le traitement d’un fibrome intra-cavitaire ou sous-muqueux à développement intracavitaire est essentiellement chirurgical.
– 2 voies d’administration :
► Voie orale :
* on préférera les dérivés de la 19-norprogestérone (norprégnanes) (Lutényl ®, Nomégestrol ®, Surgestone ®) du fait de leur activité anti-estrogénique nette et surtout de leur absence d’effet androgénique des dérivés de la testostérone (groupe estranes) : Orgamétril ®.
* On peut aussi utiliser les dérivés de la 17OH-progestérone (prégnanes) (acétate de chlormadinone).
On peut les prescrire en discontinu 10 jours (16ème au 25ème jour du cycle) ou 21 jours par mois (5ème au 25ème jour du cycle) avec maintien des menstruations ou en continu, sur une période de 3 mois.
⊗ Mise en garde concernant les progestatifs : Cf chapitre spécial
Nb : La progestérone naturelle par voie orale (Utrogestan ®) n’est pas une bonne indication.
► Voie endo-utérine : dispositif intra-utérin au lévonorgestrel (DIU-LNG).
Ce DIU hormonal (Mirena ®, Kyleena ®) bien qu’il n’ait pas l’AMM dans l’indication fibrome peut être inséré en cas de ménorragies en l’absence de fibromes intracavitaires.
Il est surtout efficace dans les ménorragies dans les fibromes intramuraux ou sous-séreux ne déformant pas trop la cavité, moins sur les métrorragies des sous-muqueux.
c) Analogues (ou agonistes) de la GnRH :
Ce sont des peptides de synthèse proches du LHRH naturel, entraînant par le biais d’une castration médicale réversible une diminution du volume du fibrome et des saignements.
Ils ont fait preuve d’une efficacité remarquable, et ont quelques effets secondaires désagréables (en rapport avec la carence estrogénique : bouffées de chaleur, plus inconstamment : céphalées, troubles du sommeil, sécheresse vaginale, baisse de la libido, état dépressif).
Un traitement estrogénique local permettra de pallier un certain nombre de ces effets secondaires.
Leur efficacité est malheureusement transitoire et leur coût élevé.
– Indications : traitement prescrit en pré-opératoire pour une durée limitée dans quelques indications précises :
. correction d’une anémie sévère (Hb ≤ 8 g/dl) avant une myomectomie ou une hystérectomie,
. sédation d’une hémorragie rebelle aux progestatifs en vue d’une intervention chirurgicale,
. réduction du volume du fibrome (et/ou de l’utérus) pour faciliter ou modifier la technique opératoire.
– Le traitement ne peut être poursuivi au-delà de 3 mois : il existe en effet un échappement thérapeutique et un risque osseux du fait de la castration médicale.
– Il permet en général d’obtenir une réduction pouvant aller jusqu’à 50 % du volume tumoral.
– Exemple : Triptoréline : Décapeptyl LP 3 mg (IM) ® ou Leuproréline : Enantone LP 3,75 mg (IM ou SC) ® : 1 injection/mois pendant 3 mois au maximum.
Il peut exister des métrorragies 10 à 15 jours après le début du traitement.
Les règles réapparaissent 30 à 90 jours après l’arrêt du traitement.
On sait qu’à l’arrêt du traitement, on peut assister à une ré-augmentation du volume du fibrome (70 %) avec une reprise des symptômes (au maximum dans 50 % des cas).
Il s’agit donc d’une thérapeutique d’attente et non un traitement exclusif, permettant de transformer certaines interventions qui deviennent alors moins contraignantes et moins radicales.
Au total : réduction temporaire de la taille des fibromes par un état hypoestrogénique réversible, mais avec des effets secondaires limitant leur usage prolongé.
Principalement utilisés en pré-opératoire pour faciliter la chirurgie ou corriger une anémie sévère.
d) Modulateurs sélectifs des récepteurs de la progestérone (ex : ulipristal acétate) :
Ils sont très efficaces pour réduire saignements et volume des fibromes.
Ils doivent être utilisés sous surveillance stricte en raison de rares cas d’atteinte hépatique.
Indications précises : pré-opératoire ou symptomatique si chirurgie non indiquée.
e) Antiprogestatifs (ex : mifépristone) :
f) Méthodes adjuvantes :
– Hémostatiques : Etamsylate (Dicynone cp 250 et 500 mg ® – Solution injectable IM-IV à 250 mg/2 ml).
– Antifibrinolytiques : Acide tranexamique (Exacyl cp 500 mg ® – Solution injectable IV 500 mg/5 ml), efficace pour réduire le volume des règles (ménorragies), moins sur les métrorragies. Prise uniquement pendant les règles.
– AINS (ibuprofène ou acide méfénamique) : soulagement de la douleur +++ (surtout si nécrobiose aseptique) et réduction modérée des flux menstruels (en inhibant la synthèse des prostaglandines) ; ils n’aggravent pas les ménorragies liées aux fibromes.
– Supplémentation en fer en cas d’anémie ferriprive (per os, injectable).
– Transfusions isogroupe-isoRh en cas d’hémorragies graves.
2) Traitement chirurgical :
Il est privilégié lorsque les traitements médicaux sont inefficaces ou si une solution plus définitive est nécessaire.
2 possibilités :
– Traitement conservateur (myomectomie) ;
– Traitement radical (hystérectomie).
a) Chirurgie conservatrice :
– Myomectomie :
Il existe plusieurs possibilités :
. laparotomie : pour les fibromes volumineux ou multiples,
. cœlioscopie : pour les fibromes intramuraux ou sous-séreux accessibles,
. voie basse : pour les fibromes pédiculés accouchés par le col, les fibromes cervicaux et les fibromes postérieurs bas situés,
. hystéroscopie : pour les fibromes sous-muqueux accessibles.
Nb : Il est reconnu que les myomectomies comportent une morbidité plus grande que l’hystérectomie ; les pertes de sang, le temps opératoire et les douleurs sont plus importantes avec les myomectomies, de même que les complications observées en post-opératoire : fièvre, iléus et anémie.
Par ailleurs, les effets bénéfiques de la myomectomie sont indiscutables : amélioration des ménorragies, diminution des pertes sanguines, de la grosseur utérine et de la cavité utérine…
– Le curetage hémostatique n’aura d’efficacité que sur les ménorragies en rapport avec une hyperplasie de l’endomètre survenue sur un terrain d’insuffisance lutéale.
Le curetage est aussi indiqué pour des myomes sous-muqueux pédiculés < 2 cm.
b) Chirurgie radicale :
– Hystérectomie totale : traitement radical et définitif chez les patientes ne désirant plus de grossesse ou en cas d’échec des traitements conservateurs.
Peut se faire par voie basse, haute ou laparoscopique.
Nb : La voie basse sera préférée en cas de prolapsus associé ou devant un utérus modérément augmenté de volume.
– Hystérectomie subtotale : laisse en place le col utérin (chez une femme jeune, pour préserver l’activité génitale et les menstruations ; col à surveiller).
3) Techniques mini-invasives et interventionnelles :
Ces méthodes offrent des alternatives à la chirurgie classique tout en préservant l’utérus :
a) Embolisation des artères utérines (EAU) : 
Technique de radiologie interventionnelle visant à obturer l’artère nourricière d’un fibrome afin de le priver de sa vascularisation (nécrobiose aseptique expérimentale).
– Avantages : traitement conservateur permettant d’éviter une chirurgie, avec disparition des saignements et réduction de la taille des fibromes.
Technique pouvant aussi être proposée en préopératoire sur un gros fibrome pour diminuer le risque hémorragique lors de la myomectomie.
– Inconvénients : douleur post-embolisation (d’origine ischémique), infections.
L’embolisation est une technique à éviter chez une femme jeune ayant un désir de grossesse, en raison d’un risque d’insuffisance ovarienne prématurée si du matériel d’embolisation touche la vascularisation ovarienne.
Dans tous les cas, l’embolisation définitive a un intérêt majeur pour les patientes présentant des contre-indications à l’anesthésie ou à la chirurgie, comme alternative à l’hystérectomie.
b) Ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU) :
Destruction ciblée des fibromes par des ultrasons, technique non invasive mais à indications spécifiques (nombre et taille limités).
c) Thermoablation par radiofréquence :
Elle détruit les fibromes par chauffage localisé, avec un impact minimal sur le tissu sain environnant.
4) Abstention thérapeutique avec surveillance :
En cas de fibromes asymptomatiques ou peu gênants, une simple surveillance clinique et échographique régulière peut être suffisante.
5) Conclusion :
Le choix du traitement repose sur une analyse personnalisée des avantages et inconvénients de chaque option, tenant compte des souhaits de la patiente, notamment en matière de fertilité, et de la nature des fibromes.
2. Indications :
Le traitement des fibromes utérins n’est pas systématique.
1) Abstention thérapeutique :
Elle est la règle pour les fibromes asymptomatiques de découverte fortuite (sans douleur, ni saignement, ni infertilité).
=> Surveillance clinique et échographique tous les 6 mois.
2) Traitement proprement dit :
Le traitement est indiqué principalement lorsque les fibromes sont symptomatiques ou posent un problème spécifique.
Les principales indications sont :
– Symptômes hémorragiques sévères :
. Ménorragies ou métrorragies importantes entraînant une anémie ferriprive, une fatigue chronique ou une gêne significative dans la vie quotidienne.
– Symptômes douloureux ou compressifs :
. Douleurs pelviennes chroniques ou dyspareunie ou douleurs abdomino-pelviennes invalidantes.
. Troubles liés à la compression viscérale :
. vésicale : pollakiurie, urgences mictionnelles, rarement rétention,
. rectale : constipation, ténesme,
. urétérale (rare) : pouvant entraîner une hydronéphrose.
– Infertilité, fausses couches à répétition ou complications obstétricales :
. Fibromes sous-muqueux ou intramuraux de grande taille déformant la cavité utérine, après exclusion d’autres causes.
– Croissance rapide ou (plus rarement) en post-ménopause faisant suspecter la transformation maligne en léiomyosarcome (très rare).
– Complications aiguës rares :
. Torsion de fibrome sous-séreux pédiculé,
. nécrobiose aseptique (infarctus du fibrome) très douloureuse.
– Altération de la qualité de vie : symptômes modérés mais gênants ou impact psychologique significatif.
– De même, l’indication opératoire est portée en cas d’utérus volumineux, porteur de fibromes, dont la taille est supérieure à un utérus gravide de 12 SA (Ø longitudinal ≥ 12 cm et Ø antéro-postérieur ≥ 7 cm).
3) Choix du traitement :
Le choix du traitement dépend des critères suivants :
– âge de la patiente,
– désir de grossesse,
– nombre, taille et localisation des fibromes,
– sévérité des symptômes,
– échec des traitements antérieurs,
– préférences de la patiente.
4) Résumé des traitements :
– Traitement médical : symptômes modérés, fibromes de petite taille, période préopératoire.
– Embolisation : alternative à la chirurgie chez femmes sans désir de grossesse.
– Myomectomie : désir de grossesse, fibromes symptomatiques.
– Hystérectomie : femmes sans désir de grossesse, fibromes multiples ou volumineux, échec des autres traitements.
En synthèse, le traitement est essentiellement indiqué en présence de fibromes symptomatiques, que ce soit par des troubles hémorragiques, compressifs ou liés à l’infertilité, et doit être adapté aux attentes et au profil de chaque patiente.
3. Cas particulier : fibrome + grossesse :
1) Pendant la grossesse :
Il ne faut intervenir que la main forcée, la myomectomie étant hémorragique et provoquant souvent un avortement. La nécrobiose est le plus souvent bien contrôlée par les antibiotiques et les corticoïdes.
2) Pendant le travail :
L’indication d’une césarienne doit être large, portée à la moindre anomalie du travail.
La myomectomie associée à la césarienne ne doit être faite que si elle s’annonce facile.
Si le fibrome a une large base d’implantation ou si l’utérus est polymyomateux, mieux vaut attendre quelques mois et n’envisager le traitement du fibrome qu’après involution utérine.
3) Après l’accouchement :
Faire une RU pour explorer l’utérus et faire le bilan du nombre et de la topographie des myomes.
4) Dans les suites de couches :
L’infection et les phlébites doivent être prévenues par un traitement antibiotique et anticoagulant systématique.
Points clés
Le fibrome utérin est la tumeur bénigne la plus fréquente chez la femme en âge de procréer et la première indication d’hystérectomie chez les femmes en péri-ménopause.
– Le plus souvent asymptomatique.
– Symptôme le plus fréquent : ménorragies (hyperplasie endométriale associée).
– Examen diagnostique de référence : échographie pelvienne.
TRAITEMENT :
– Fibrome asymptomatique ⇒ abstention thérapeutique + surveillance clinique.
– En cas de fibrome interstitiel entraînant des complications hémorragiques : traitement médical (DIU au lévonorgestrel, progestatifs de synthèse) ⇒ traitement d’une hyperplasie endométriale associée.
La chirurgie sera envisagée après échec du traitement médical bien conduit.
– En cas de fibrome intra-cavitaire ou sous-muqueux (< 4 cm) entraînant des complications hémorragiques ou avant PMA : Traitement chirurgical d’emblée ⇒ résection endo-utérine par voie hystéroscopique.
– Hystérectomie totale si utérus polymyomateux et pas de désir de grossesse (voie vaginale, laparotomie, cœlioscopie).
