1. Anomalies autosomiques de nombre :
Seules les trisomies 21, 18 et 13 sont compatibles avec la vie. Leur description est classique.
1) Trisomie 21 :
Elle est le plus souvent libre (92 % des cas) et homogène. Le caryotype montre 47 chromosomes (47XX + 21 pour la fille, et 47XY + 21 pour le garçon).
Le risque de récidive pour une prochaine grossesse dépend de l’âge de la mère (de l’ordre de 1 % si elle a moins de 30 ans, il augmente ensuite progressivement).
La mosaïque (47XX + 21/46 XX par exemple), retrouvée dans 3 % des cas, s’exprime de façon variable.
La trisomie 21 peut être le résultat d’un translocation robertsonienne (5 %) survenue de novo, parfois héritée, et impliquant plus volontiers le chromosome 14 et le 13 avec le 21 [t (14q ; 21q) ; t(13q ; 21q)] que le 22 ou l’autre 21. Dans quelques rares cas, il s’agit d’une trisomie 21 partielle impliquant la zone critique minimale située à la partie distale du bras long.
2) Trisomie 13 et trisomie 18 :
Elles ont une incidence dix fois moins élevée que la trisomie 21 et entraînent en général le décès au cours de la première année de vie. Les trisomies 13 et 18 sont souvent libres (respectivement 80 et 90 % des cas), habituellement homogènes, parfois en mosaïque et plus rarement liées à une translocation.
3) Conseil génétique :
Il est habituellement rassurant. Après la naissance d’un enfant porteur d’une anomalie de nombre, le risque de récurrence est négligeable et augmente avec l’âge maternel, comme pour les femmes sans antécédent particulier.
Cependant, face à une nouvelle procréation, le couple ayant eu un enfant trisomique 21 se comporte souvent comme les couples à risque de 1/4 ayant un enfant atteint de maladie récessive.
Le diagnostic prénatal offre à ces couples la possibilité de procréer sans trop d’arrière-pensée.
Pour les apparentés plus ou moins éloignés, notamment les germains, le risque est négligeable et le généticien doit lever toute inquiétude. Si les trisomiques 21 du sexe masculin sont infertiles, les femmes atteintes ont un risque a priori de un sur deux d’avoir un enfant atteint.
2. Anomalies des chromosomes sexuels :
Elles entraînent un tableau clinique moins grave et leur diagnostic n’est porté qu’à l’adolescence ou à l’âge adulte.
1) Fille 45X (syndrome de Turner) :
Le taux élevé d’avortements en rapport avec cette seule monosomie compatible avec la vie ne peut s’expliquer par le tableau clinique.
Celui-ci est variable, mais avec deux signes constants : la petite taille sensible à l’hormone de croissance et la dysgénésie gonadique à l’origine d’une stérilité définitive et nécessitant un traitement hormonal substitutif.
Le chromosome sexuel perdu est le plus souvent d’origine paternelle (quatre fois sur cinq).
Homogène dans 50 % des cas, la monosomie X peut être aussi en mosaïque (20 à 25 %) ou liée à une anomalie de structure d’un des deux X.
2) Garçon 47XXY (syndrome de Klinefelter) :
Il a une stérilité définitive par azoospermie.
Le diagnostic peut être posé fortuitement devant un retard pubertaire avec atrophie testiculaire à l’adolescence, ou devant une stérilité à l’âge adulte.
Si le développement intellectuel est normal le plus souvent, les sujets atteints ont des difficultés d’apprentissage (langage et lecture) pouvant nécessiter un soutien scolaire.
Cette anomalie chromosomique résulte d’une non-disjonction, aussi bien maternelle que paternelle.
3) Fille 47XXX et garçon 47XYY :
Ce diagnostic en est souvent fortuit.
4) Conseil génétique :
Les femmes 45X (Turner) et les hommes 47XXY (Klinefelter) sont habituellement stériles mais peuvent envisager d’avoir des enfants grâce à la PMA (don de gamètes).
Des grossesses spontanées peuvent être observées en cas de mosaïque, et les hommes 47XXY entrevoient la possibilité d’être père biologique grâce à l’injection intracytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI). Le risque fœtal qui reste à évaluer ne semble pas augmenté.
Le conseil génétique pour les femmes 47XXX et les hommes 47XYY, habituellement fertiles, est rassurant, car le nombre d’anomalies chromosomiques ne semble pas augmenter dans leur descendance.
3. Anomalies de structure :
1) Délétion :
La délétion du bras court du chromosome 5 (syndrome du “cri du chat”) et la délétion du bras court du chromosome 4 (syndrome de Wolf-Hirschhorn) sont à l’origine d’une débilité profonde et sont bien connues cliniquement.
Ces délétions, survenant habituellement de novo (90 %), sont d’origine paternelle le plus souvent. Elles peuvent aussi être liées à la malségrégation d’une translocation parentale.
2) Anomalie de structure déséquilibrée :
Devant la découverte d’une anomalie de structure déséquilibrée, il est de bonne pratique de s’assurer qu’elle n’est pas héritée d’un des parents, et donc de réaliser leur caryotype avant de conclure à une anomalie accidentelle.
3) Anomalie de structure équilibrée :
Pour la descendance d’un sujet porteur d’une anomalie équilibrée, le risque d’anomalie chromosomique viable dépend du remaniement de structure en cause et des circonstances dans lesquelles celui-ci a été décelé : naissance d’un premier enfant atteint, avortements spontanés répétés ou bilan de stérilité.
– Pour la translocation robertsonienne t(13 ; 14) : le risque est faible, quel que soit le sexe du parent (1 à 2 %), mais est plus important quand la translocation implique le chromosome 21 [t(14 ; 21) ou t(21 ; 22)], surtout si elle est portée par la mère (10 à 15 % contre 2 à 5 % pour le père). Enfin, dans le rare cas d’une translocation entre deux chromosomes 21 chez l’un des conjoints, le couple ne peut avoir que des enfants trisomiques 21.
– Pour une translocation réciproque : l’évaluation du risque doit tenir compte des points de cassures, du sexe du parent porteur et des circonstances dans lesquelles la translocation a été découverte (enfant malformé viable ou mort-né, avortements à répétition, stérilité ou hypofertilité). Si la translocation a déjà conduit à la naissance d’un enfant atteint, le risque peut dépasser 20 %, mais est plus faible dans les autres cas.
– La diffusion de l’information dans la famille s’impose. Lorsqu’une translocation a été découverte dans une famille, toutes les personnes à risque d’avoir un enfant atteint, compte tenu de leur lien de parenté, doivent être informées de l’intérêt qu’il y a à réaliser un caryotype. Pour respecter le secret médical, la diffusion de l’information ne peut se faire que par le consultant. Or, certains patients ne sont pas prêts à porter le message à leurs apparentés, pour des raisons diverses qui tiennent à la difficulté de parler de leur propre histoire, à l’impossibilité pour eux de comprendre que d’autres membres de la famille peuvent être confrontés à une situation comparable, ou plus simplement à la mésentente familiale qui est loin d’être exceptionnelle. D’autres patients donnent plus volontiers cette information.
4) Syndromes malformatifs avec microdélétion :
Les outils de la génétique moderne ont permis de rattacher à des microdélétions certains syndromes malformatifs dont le diagnostic est évoqué sur des anomalies phénotypiques spécifiques. La cytogénétique moléculaire et la génétique moléculaire, orientées par l’examen clinique, ne permettent pas toujours de confirmer l’hypothèse diagnostique avancée. L’existence de quelques cas familiaux avait conduit à considérer ces syndromes comme des affections géniques.
Parmi ces syndromes, citons :
– le syndrome de Miller-Dieker (délétion 17p13.3) ;
– la microdélétion 22q11 est retrouvée dans le syndrome de Di George, le syndrome vélocardiofacial, les cardiopathies conontroncales avec dysmorphie faciale ;
– le syndrome de Williams (microdélétion 7q11.23) ;
– le syndrome de Prader-Willi et le syndrome d’Angelman, dans lesquels on retrouve la même microdélétion 15p11q13, le premier étant lié à une non-contribution paternelle, le second à une non-contribution maternelle (empreinte parentale).
Pour la descendance des sujets atteints, le risque est élevé, car ils peuvent transmettre une fois sur deux la microdélétion.