1. Risques maternels :
1) Complications immédiates per-opératoires :
a) Complications hémorragiques :
Ce sont les plus redoutables.
– Facteurs locaux ++ :
. déchirure du segment inférieur : par propagation de l’incision d’hystérotomie lors d’une extraction fœtale difficile ou en cas de segment inférieur fragilisé,
. trouble de la placentation : placenta prævia, placenta accreta,
. inertie utérine.
– Facteurs généraux : troubles de la coagulation parfois préexistant à l’intervention, le plus souvent secondaires à une hémorragie peropératoire ou à un syndrome infectieux.
b) Lésions viscérales :
Elles sont rarement rencontrées au cours d’une césarienne.
– Blessures intestinales : exceptionnelles, elles peuvent compliquer une laparotomie rendue difficile par des adhérences pariétales ; elles doivent être réparées soigneusement.
– Blessures vésicales : également très rares :
. blessure du dôme vésical : elle est facilement reconnue. On la suture en 2 plans au Vicryl 3/0. Une sonde à demeure est laissée pendant 10 jours, ouverte en permanence.
. blessure de la face postérieure et du trigone sont plus dangereuses car souvent méconnues, il s’agit presque toujours d’hystérotomies verticales ; elles donnent un tableau d’incontinence urinaire d’effort apparaissant dans les jours suivant l’ablation de la sonde urinaire. Elles peuvent laisser une fistule vésico-utérine.
– Lésions de l’uretère : le gauche est plus souvent atteint que le droit. En cas de doute sur son intégrité, il ne faut pas hésiter à le repérer à son entrée dans le pelvis et à le vérifier de haut en bas.
c) Complications liées à l’anesthésie :
Elles peuvent se rencontrer au cours de la césarienne comme au cours de toute intervention chirurgicale. Il faut cependant signaler que la césarienne peut être pratiquée en urgence chez une patiente non à jeun, ce qui nécessite des précautions particulières de la part de l’anesthésie.
2) Complications secondaires post-opératoires :
Elles sont relativement fréquentes.
a) Complications infectieuses :
– le plus souvent, il s’agit de complications mineures réagissant bien au traitement médical : endométrites, infections urinaires.
– parfois, malheureusement, l’infection peut être beaucoup plus sévère avec une extension loco-régionale ou générale.
Ces complications infectieuses sévères peuvent alors nécessiter des interventions mutilantes pour compléter le traitement médical.
Parmi les facteurs favorisants, on retrouve des facteurs obstétricaux : rupture prématurée des membranes, travail prolongé, manœuvres par voie basse précédant la césarienne, parfois diminution du pouvoir bactéricide du liquide amniotique et diminution des réponses immunitaires des patientes.
En cas de risque infectieux, le meilleur milieu à cultiver pour mettre en évidence le germe est constitué par les membranes ovulaires.
Les germes les plus souvent retrouvés sont : le streptocoque, l’E. Coli et les germes anaérobies, bacteroïdes notamment.
b) Complications thrombo-emboliques :
Elles ont diminué depuis leur prévention systématique (3 inj/j de 0,2 ml de Calciparine en sous-cutané). Cependant, des cas de phlébites et d’embolies pulmonaires échappent à ces mesures préventives.
c) Autres complications post-opératoires :
– iléus paralytique, surtout après antispasmodiques majeurs (dystocie dynamique),
– anémie, nécessitant parfois une transfusion,
– éventrations, plus fréquentes en cas de LMSO,
– hématomes pariétaux, parfois suppurés, pouvant nécessiter une reprise chirurgicale.
d) Mortalité maternelle :
Si les progrès des techniques médico-chirurgicales ont permis de réduire leur fréquence et de traiter ces complications, certaines mettent encore en jeu le pronostic vital.
Dans les séries importantes, la mortalité maternelle après césarienne se situe autour de 1 pour mille.
Les principales causes retrouvées sont les défaillances cardio-respiratoires en cours d’intervention, l’embolie pulmonaire, les accidents anesthésiques, et certaines complications infectieuses sévères.
3) Complications tardives :
a) Elles sont surtout représentées par l’avenir obstétrical des patientes ayant subi une césarienne :
La cicatrice utérine, même de bonne qualité constitue une fragilité de l’utérus et augmente les risques de césarienne ultérieure.
Cf plus bas : Evaluation de la cicatrice de césarienne.
b) Problèmes gynécologiques :
Ils sont rares. Les ménorragies sont plus fréquentes après césarienne en cas de mauvaise cicatrice (endométriose).
Granjon a décrit une triade qui compte des ménorragies, une dysménorrhée tardive et à l’hystérographie un aspect de hernie de l’isthme. Si le traitement progestatif échoue, il faut intervenir pour réparer la cicatrice. La simple endométriose de la cicatrice, sans déformation cicatricielle évidente, sera traitée par des progestatifs.
En dehors de ce problème particulier d’endométriose, la césarienne semble peu influencer l’avenir gynécologique de la patiente. Elle peut même avoir un effet bénéfique en protégeant la patiente des lésions périnéales causées par un accouchement dystocique.
2. Risques fœtaux :
Chez l’enfant, les complications sont beaucoup plus rares et l’augmentation du nombre de césariennes au cours des dernières années a surtout été indiqué dans l’intérêt du fœtus.
Aussi a-t-on vu s’améliorer le pronostic fœtal à mesure que le nombre de césarienne augmentait.
La mortalité et la morbidité fœtales après césarienne sont en fait plus liées aux indications de la césarienne qu’à l’intervention elle-même.
Parmi la morbidité néonatale liée à la césarienne, il faut retenir l’augmentation du risque de détresse respiratoire, essentiellement représenté par la tachypnée transitoire (liée au défaut de résorption pulmonaire du liquide amniotique dû à l’absence d’expression pulmonaire au cours de l’extraction), l’inhalation amniotique et la MMH, favorisé par la souffrance fœtale éventuelle qui a motivé l’intervention.
Enfin, il faut remarquer que l’extraction de l’enfant par césarienne n’exclut pas le risque de traumatisme obstétrical : paralysies du plexus brachial (avec ou sans séquelles), traumatismes ostéoarticulaires du membre (fracture diaphysaire, décollement épiphysaire), surtout en cas de présentation du siège.
Conclusion :
Si l’augmentation du nombre de césarienne a coïncidé avec une diminution de la mortalité et de la morbidité périnatale, et si les progrès des techniques médico-chirurgicales ont permis de diminuer ses complications, celles-ci, bien que rares, n’en n’existent pas moins, et toute indication de césarienne doit mettre en balance les intérêts de l’enfant et les risques maternels.
Evaluation de la cicatrice de césarienne
Mesure du segment inférieur utérin (MSI) entre 35 et 38 SA comme prédicteur de déhiscence ou de rupture utérine :
Plusieurs auteurs ont proposé la MSI, pratiquée par échographie entre 35 et 38 SA, comme outil prédicteur de la rupture utérine.
Dans la plus grande étude prospective menée par Rozenberg en 1996 (1), une MSI ≤ 3.5 mm était associée à un risque augmenté de déficit utérin (déhiscence et rupture utérines) avec une valeur prédictive négative de 99.3 %.
En 2010, Bujold a démontré qu’une MSI ≤ 2.3 mm pouvait permettre de prédire la majorité des ruptures utérines (2).
Une revue systématique sur 12 études impliquant au total 1834 femmes confirmait la forte association entre la MSI et les déficits utérins.
La revue systématique concluait que la valeur seuil pour prédire les déficits utérins se situe entre 2.0 et 3.5 mm selon les méthodes et techniques d’échographie utilisées (3).
Différentes techniques de MSI au 3ème trimestre :
Certains auteurs mesurent la totalité de l’épaisseur du segment inférieur utérin (SIU), d’autres uniquement le myomètre. Alors que l’association entre la mesure totale a été démontrée par la plupart des auteurs, seules certaines études ont démontré une association entre le myomètre et le risque de déficit utérin.
Certains auteurs ont proposé la voie abdominale, d’autres la voie endovaginale. La combinaison des deux abords semble être la méthode la plus intéressante. En effet, la voie abdominale permet une meilleure visualisation en cas d’utérotomie effectuée dans la partie supérieure du SIU (césarienne prophylactique), alors que la mesure endovaginale nous renseigne mieux en cas d’utérotomie effectuée plus bas, près du col de l’utérus (césarienne en cours de travail) ou en cas d’obésité.
Messages à retenir :
– La mesure de l’épaisseur du segment inférieur (MSI) au 3ème trimestre de grossesse est actuellement le meilleur outil de prédiction des déhiscences et ruptures utérines, cependant une standardisation des techniques de mesure est nécessaire.
– La mesure de la cicatrice chez des patientes non enceintes n’a pas été démontrée comme étant corrélée au risque de rupture ou déhiscence utérine lors d’un accouchement ultérieur.
– La mesure de la cicatrice au 1er trimestre de grossesse est intéressante, mais aucune étude n’a évalué l’association de son épaisseur avec le risque de déhiscence ou de rupture utérine. Des études supplémentaires sont nécessaires pour évaluer l’utilité de la mesure de la cicatrice au 1er trimestre de grossesse dans la prédiction de ces complications.
Bibliographie :
- (1) Rozenberg, P., et al., Ultrasonographic measurement of lower uterine segment to assess risk of defects of scarred uterus. Lancet, 1996. 347(8997): p. 281-4
- (2) Bujold, E., et al., Prediction of complete uterine rupture by sonographic evaluation of the lower uterine segment. Am J Obstet Gynecol, 2009. 201(3) : p. 320 e1-6
- (3) Jastrow, N., et al., Sonographic lower uterine segment thickness and risk of uterine scar defect: a systematic review. J Obstet Gynaecol Can, 2010. 32(4) : p.321-7