1. Définition :
La thrombose se définit par l’OBSTRUCTION d’une veine ou d’une artère par un thrombus (ou caillot).
On distingue deux types de thrombose :
1) La thrombose artérielle :
Elle obstrue une artère, ce qui se révèle d’autant plus grave que l’artère en cause est la seule à irriguer une zone précise du corps.
2) La thrombose veineuse ou thrombophlébite ou phlébite :
Elle peut être superficielle affectant une veine de surface ou profonde, affectant une veine profonde, notamment au niveau de la cuisse.
Il importe de bien distinguer les 2 types de phlébite, aux conséquences et aux traitements fort différents :
a) La phlébite superficielle :
Dans ce cas, le caillot sanguin se forme dans une veine de surface. Il s’agit de la forme la plus courante, qui touche surtout les personnes qui ont des varices. Elle s’accompagne d’une inflammation de la veine et occasionne douleur et inconfort. Bien que la phlébite superficielle puisse sembler anodine, on devrait la considérer comme un signal d’alarme. En effet, elle est généralement un signe d’insuffisance veineuse avancée pouvant conduire à une phlébite profonde.
b) La phlébite profonde :
Elle se produit lorsque le caillot sanguin se forme dans une veine profonde dont le débit sanguin est important, la situation est plus dangereuse puisque le caillot risque de se détacher de la paroi de la veine. Porté par le flux sanguin, celui-ci peut alors traverser le cœur, puis obstruer l’artère pulmonaire ou une de ses branches. Cela entraîne alors une embolie pulmonaire, un accident potentiellement fatal. Le plus souvent, ce type de caillot se forme dans une veine du mollet.
2. Causes de la thrombose :
Il existe de multiples facteurs susceptibles d’entraîner une thrombose.
1) Thrombose artérielle :
Elle peut être déclenchée par une lésion de la paroi d’une artère entraînant la formation d’un caillot au contact de la zone de l’artère abîmée. C’est ce qui se produit dans l’athérosclérose souvent en cause dans les infarctus du myocarde (IDM) ou les AVC. En cause, des substances toxiques soit pour la paroi des artères, soit pour la coagulation du sang : tabac, contraception orale…
2) Thrombose veineuse :
Bien qu’on n’en connaisse pas toujours les causes, la phlébite est généralement liée à 3 facteurs majeurs :
– un ralentissement prolongé de la circulation sanguine (stase veineuse) : cette situation est typique de l’insuffisance veineuse et des varices, mais elle peut aussi être due à une immobilisation prolongée (plâtre, alitement, intervention chirurgicale), une position assise répétée et prolongée (long voyage en avion), une blessure,
– une lésion dans la paroi d’une veine, provoquée par le port d’un cathéter, injection d’un médicament par voie intraveineuse, blessure, inflammation….,
– le sang qui coagule plus facilement (certains cancers et certaines anomalies génétiques, par exemple, rendent le sang plus visqueux). Les traumatismes, la chirurgie, la grossesse, les contraceptifs oraux peuvent aussi réduire la fluidité du sang et augmenter le risque de caillot.
3. Symptomatologie :
1) Thrombose artérielle :
On peut observer selon la localisation du caillot, des signes très divers :
– caillot dans une artère cérébrale ⇒ symptômes d’AVC très variables selon l’artère touchée : déformation de la bouche, faiblesse d’un côté du corps, bras ou jambe, troubles de la parole,
– thrombose d’une artère coronaire ⇒ symptômes d’IDM : douleur inhabituelle ou brutale dans la poitrine à type de pesanteur ou de serrement, au niveau du sternum pouvant irradier vers le bras gauche, ou vers la mâchoire,
– en cas de caillot dans une artère des membres inférieurs, ou ischémie aiguë du membre inférieur, on observe une douleur brutale, une disparition du pouls au niveau de la jambe, une pâleur, une froideur…,
– en cas de caillot dans les artères irriguant le tube digestif ou ischémie mésentérique, apparaît une forte douleur persistante au niveau de l’abdomen. L’ischémie mésentérique peut aussi être due à une thrombose veineuse.
2) Thrombose veineuse du membre inférieur :
a) Phlébite superficielle :
– la veine atteinte est rouge, chaude et forme un « cordon » dur ; cette inflammation peut s’étendre à la zone de peau environnante. La veine est souvent visible (bleuâtre) puisqu’il s’agit d’une veine de surface,
– la région de la veine atteinte est douloureuse ou sensible au toucher ; la veine atteinte peut rester douloureuse pendant plusieurs mois,
– parfois, la zone atteinte enfle légèrement (œdème local).
b) Phlébite profonde :
Les symptômes dépendent de l’importance de la réaction inflammatoire et de la taille du caillot.
Il n’y a parfois aucun symptôme, ce qui rend la maladie d’autant plus dangereuse.
– Phlébite du membre inférieur : signes évocateurs :
. douleur sourde unilatérale (avec ou sans œdème), d’un mollet ou d’une cuisse,
. engourdissement ou crampes du mollet,
. sensation de chaleur,
. gonflement (œdème) du mollet ou de la cheville, ou même de la jambe entière ; la peau est brillante, tendue, blanchâtre ou bleuâtre,
. douleur lorsqu’on relève la pointe du pied vers le haut, vers soi (Signe de Homans),
. légère fièvre (38°C).
En présence de ces symptômes, hospitalisation de la patiente en urgence puisque le risque d’embolie pulmonaire est élevé.
A RETENIR : Dans environ un cas sur deux, la thrombose veineuse profonde n’entraîne aucun signe.
4. Complications :
1) Thromboses artérielles :
Les complications des thromboses artérielles sont l’infarctus du myocarde (IDM), l’accident vasculaire cérébral (AVC) ou d’autres accidents vasculaires au niveau par exemple des membres inférieurs ou de l’intestin.
2) Thromboses veineuses :
– La complication la plus grave de la thrombose veineuse profonde est l’embolie pulmonaire (pouvant entraîner une mort subite). Cet accident survient lorsque le caillot de sang qui s’est formé dans la jambe se détache, « voyage » jusqu’aux poumons et vient obstruer l’artère pulmonaire ou une de ses branches. Ainsi, plus de 70 % des cas d’embolie pulmonaire sont causés par un caillot sanguin initialement formé dans une veine des jambes.
* L’embolie pulmonaire se reconnaît entre autres par un essoufflement soudain, des douleurs thoracique et parfois des crachats sanglants. Une perte de conscience peut survenir. Il arrive malheureusement que l’embolie pulmonaire survienne sans qu’aucun signe de phlébite ne se soit fait sentir.
– En outre, lorsqu’une veine profonde est touchée, des symptômes d’insuffisance veineuse peuvent survenir, par exemple un gonflement persistant des jambes (œdème), des varices et des ulcères aux jambes.
Ces symptômes résultent de l’endommagement des valvules par le caillot sanguin : il s’agit du syndrome post-phlébitique. Comme la phlébite touche souvent une seule jambe, ce syndrome est habituellement unilatéral.
– Quant à la phlébite superficielle, elle a longtemps été considérée comme sans gravité. Cependant, plusieurs études récentes montrent que la phlébite superficielle « cache » souvent une phlébite profonde qui risque de passer inaperçue. En 2010, une étude française menée sur près de 900 patients a même montré que 25 % des thromboses veineuses superficielles s’accompagnaient d’une phlébite profonde ou d’une embolie pulmonaire.
5. Diagnostic de la thrombose :
Plusieurs examens d’imagerie médicale permettent de diagnostiquer une thrombose : artériographie, phlébographie, échographie doppler.
Les analyses sanguines mettent en évidence la présence de D-dimères, substance qui révèle la formation d’un caillot.
6. Populations à risque :
1) Personnes à risque :
– insuffisance veineuse, varices,
– antécédent personnel de phlébite, ou antécédent familial de phlébite ou d’embolie pulmonaire (après une première phlébite, le risque de récidive est multiplié par 2,5),
– personnes porteuses d’un stimulateur cardiaque (pacemaker) et celles à qui on a posé un cathéter dans une veine pour traiter une autre maladie,
– personnes hospitalisées pour crise cardiaque, insuffisance cardiaque ou insuffisance respiratoire,
– personnes atteintes d’un cancer (certains types de cancers causent la coagulation du sang, en particulier ceux du thorax, de l’abdomen et du bassin) ; de plus, certains médicaments de chimiothérapie accroissent le risque,
– Les personnes qui subissent une chirurgie importante et doivent, par conséquent, demeurer alitées plusieurs jours (par exemple, une chirurgie à la hanche) et celles qui doivent porter un plâtre,
– femmes enceintes, surtout en fin de grossesse et juste après l’accouchement (risque de phlébite multiplié par 5 à 10),
– obésité,
– sédentarité,
– diabète,
– hypercholestérolémie,
– insuffisance cardiaque,
– paralysie des jambes ou des bras,
– certains cancers (pancréas, thorax),
– certaines interventions chirurgicales,
– troubles de la coagulation du sang (thrombophilie, surtout héréditaire),
– maladie inflammatoire (colite ulcéreuse, lupus, maladie de Behçet…),
– personnes âgées.
2) Facteurs de risque :
– circulation sanguine ralentie (stase veineuse) : rester dans une position immobile pendant plusieurs heures : travailler en étant debout longtemps, faire de longs trajets en voiture ou en avion… Les voyages de plus de 12 h augmentent tout particulièrement le risque. Dans l’avion, la pression de l’oxygène légèrement plus faible et la sécheresse de l’air semblent accroître le risque davantage. On parle même de « syndrome de la classe économique »,
– immobilisation prolongée,
– chez les femmes : pilule œstroprogestative, certains médicaments (THS de la ménopause, corticoïdes),
– tabagisme.
7. Traitement de la thrombose :
Il dépend avant tout du type de thrombose :
1) Thromboses artérielles :
Leur traitement dépend du lieu de la thrombose. Ce qui compte, c’est la rapidité du traitement, en particulier pour les IDM et AVC. En effet, la zone irriguée par l’artère bouchée s’abime, voire se détruit au fil des heures si elle n’est plus irriguée. L’urgence consiste donc à déboucher l’artère afin de préserver les facultés de fonctionnement, notamment du cœur et du cerveau.
– En cas d’infarctus, le traitement consiste à utiliser le plus rapidement possible un fibrinolytique (dissoudre le caillot qui bouche une artère du cœur). D’autres traitements sont mis en place pour protéger le cœur et éviter les complications et récidives.
– En cas d’AVC dû à une thrombose artérielle : fibrinolytique dès que possible.
– Et pour les autres thromboses, le traitement est adapté à la localisation de la thrombose.
2) Thrombose veineuse des membres inférieurs :
C’est la plus fréquente ; son traitement est bien connu.
– En cas de thrombose veineuse superficielle des membres inférieurs, le repos et la prise de médicaments destinés à apaiser les douleurs sont parfois suffisants. Les injections d’anticoagulants (héparine) sont pratiquées s’il existe un risque de thrombose veineuse profonde ou d’extension de la thrombose.
– En cas de thrombose veineuse profonde des membres inférieurs, le traitement de base repose sur l’injection d’anticoagulants de la famille de l’héparine tous les jours afin d’éviter l’extension et la migration du caillot. Par la suite, d’autres types d’anticoagulants per os prennent le relais. Lorsque la thrombose entraîne une obstruction sévère, on peut avoir recours aux fibrinolytiques.
Une contention élastique est indispensable dès que possible ; il s’agit de bas ou de collants comprimant les veines des jambes, à porter au maximum pour éviter les complications des phlébites. Cette contention doit être ensuite portée pendant au moins 2 ans après la phlébite.
Dans certains cas particuliers, notamment en cas de phlébites récidivantes entraînant un important risque d’embolies pulmonaires à répétition, la pose d’un filtre cave peut être envisagée. Il s’agit d’un filtre inséré dans la veine cave, veine qui draine les membres inférieurs. Ce filtre a pour but de bloquer le caillot avant qu’il n’arrive aux artères pulmonaires, ce qui permet d’éviter l’embolie pulmonaire parfois très grave.
8. Prévention de la thrombose (et ses récidives) :
1) Prévention des thromboses artérielles :
– éviter le surpoids,
– bien soigner un diabète,
– pratiquer de l’exercice physique,
– manger équilibré, peu sucré, peu gras,
– manger beaucoup de fruits et légumes,
– ne pas fumer,
– éviter la contraception orale s’il existe d’autres risques,
– et pour les personnes ayant déjà subi une thrombose artérielle, traitement médical préventif.
2) Prévention des thromboses veineuses des membres inférieurs :
Ces mesures sont d’autant plus importants qu’il existe une insuffisance veineuse ou de varices :
– pratiquer une activité physique régulière,
– en cas de varices : porter des bas de contention, se faire opérer,
– éviter le surpoids,
– éviter la contraception orale s’il existe d’autres risques,
– éviter les immobilisations prolongées ; par exemple, en cas de voyage en avion, pratiquer des flexions-extensions des pieds afin de stimuler la circulation dans les veines, boire beaucoup d’eau pour éviter la déshydratation, porter des bas de contention pendant le voyage,
– éviter de porter des vêtements qui gênent la circulation, comme des chaussettes serrées aux chevilles ou aux genoux ou des pantalons serrés à la taille,
– lever précoce et marche pour toute patiente alitée, opérée ainsi que les femmes qui viennent d’accoucher,
– pour les voyages en avion, voir les conseils ci-dessous,
– bien s’hydrater ; les nutritionnistes recommandent de boire en moyenne 1,5 à 2 litres d’eau ou de boisson (jus, bouillons, thé, café…) chaque jour,
– le traitement par antiagrégant plaquettaire (aspirine) peut être utile selon les cas.
Explorer et soigner les pieds avec des semelles orthopédiques si nécessaires ; les pieds plats ou trop creux diminuant l’efficacité de la marche pour stimuler la circulation sanguine.
De manière générale, il est important de pratiquer une activité physique régulière, et de marcher au moins 30 minutes par jour pour rester en bonne santé et maintenir une bonne circulation sanguine.
– Chez les personnes à faible risque d’avoir une phlébite profonde, l’utilisation de bas de contention durant des situations à risque est suffisante comme mesure préventive. Idéalement, on devrait se procurer des bas neufs tous les 3 mois puisqu’ils perdent de leur élasticité avec le temps.
– Chez les personnes à haut risque de phlébite profonde : prescriptiont parfois d’un médicament anticoagulant (héparine ou warfarine). Ce médicament peut être donné à titre préventif au moment d’une hospitalisation ou d’une chirurgie, par exemple.
Au cours d’un long vol en avion (ou de tout autre long trajet)
Voici quelques conseils qui peuvent aider à améliorer le confort et à prévenir la phlébite au cours de vols en avion d’une durée de 6 heures ou plus.
Se lever à l’occasion pour s’étirer et marcher un peu.
En position assise, pratiquer une quinzaine de mouvements de flexion et d’extension des chevilles toutes les heures ; cet exercice aidera à stimuler le retour du sang vers le cœur.
Eviter de garder les jambes croisées trop longtemps et s’assurer que le bord du siège ne comprime pas les vaisseaux sanguins des cuisses.
Porter des vêtements amples qui ne serrent pas trop les jambes et la taille afin de ne pas gêner la circulation sanguine.
Veiller à bien s’hydrater en buvant de l’eau avant, pendant et immédiatement après le vol.
Eviter de boire de l’alcool, qui déshydrate.
Durant le vol, éviter de prendre des somnifères, qui ont pour effet de ralentir les mouvements et contribuent à la stagnation du sang.
Eviter de dormir pendant des périodes prolongées (le risque de phlébite est plus élevé au bout de 2 heures de sommeil) ; Pour dormir, surélever les jambes si l’espace disponible le permet.
Les personnes à risque de phlébite devraient discuter avec leur médecin avant leur départ de la possibilité de porter des bas de contention ou de prendre des médicaments anticoagulants.