1. Etiologie :

Le lymphogranulome vénérien ou lymphogranulomatose vénérienne (LGV) ou maladie de Nicolas-Favre (en fait décrite par Durand, un élève de Nicolas et Favre) est une infection à point de départ génital (IST) mais au tropisme locorégional.

Elle est due au sérotypes L1, L2 ou L3 de Chlamydia trachomatis.

Ces sérotypes diffèrent des sérotypes de chlamydia qui causent le trachome, la conjonctivite à inclusions et l’urétrite chlamydienne et cervicite car ils peuvent envahir et se reproduire dans les ganglions lymphatiques régionaux.

Il s’agit en fait d’une maladie systémique chronique dont le point de départ est une ulcération génitale (souvent méconnue), révélée par deux tableaux cliniques principaux, l’adénite inguinale et la rectite aiguë.

2. Epidémiologie :

Le lymphogranulome vénérien n’était quasiment plus observé dans les pays industrialisés depuis les années 1960.

Depuis le début des années 2000, on observe une recrudescence de LGV dans sa forme rectale principalement chez les hommes homosexuels des grandes villes des pays occidentaux (Europe, Etats-Unis et Australie, notamment chez les patients séropositifs pour le VIH) où de petites épidémies sont observées.

La maladie de Nicolas-Favre est par ailleurs endémique dans plusieurs pays tropicaux notamment en Afrique (sub-saharienne), en Inde, en Asie du sud-est, et dans certaines îles des Caraïbes. Dans ces pays, la proportion des ulcérations génitales qui peuvent être attribuées au lymphogranulome vénérien varie entre 1 % et 10 %.

3. Pathogénie :

La LGV est une infection systémique qui touche les tissus lymphoïdes.

Les sérotypes responsables de cette maladie sont beaucoup plus invasifs que les autres sérotypes de C. trachomatis.

De façon similaire aux infections dues aux autres sérotypes, la LGV provoque une maladie aiguë et des complications fibrosantes tardives.

4. Symptomatologie :

La lymphogranulomatose vénérienne se développe en 3 phases :

– La phase primaire commence après une période d’incubation de 3 à 30 jours et se caractérise par des micro-ulcérations génitales ou anales (chancres) passant souvent inaperçues car indolores, transitoires et volontiers profondes (col, urètre, rectum).

– La phase secondaire débute habituellement 2 à 4 semaines plus tard avec des adénopathies inguinales uni ou bilatérales, formant de grandes masses, douloureuses, parfois fluctuantes (bubons). Ces adénopathies sont souvent associées à des signes généraux tels que fièvre, céphalées, arthralgies, hyperleucocytose.

Ces adénopathies évoluent vers la fistulisation (en multiples pertuis d’où sourd un pus sanguinolent).

Chez la femme : les lésions initiales peuvent être situées sur le col de l’utérus, la partie supérieure du vagin, et entraînent une inflammation des ganglions lymphatiques périrectaux et pelviens profonds. On peut observer un écoulement de pus et de sang.

– En l’absence de traitement survient la phase tertiaire avec possibilité d’évolution vers la chronicité : fistules des adénopathies, rétrécissements.

Une inflammation persistante due à une infection non traitée obstrue les vaisseaux lymphatiques, entraînant une augmentation de volume et des lésions cutanées.

Les complications fibrosantes tardives sont l’éléphantiasis génital, les rétrécissements et les fistules du pénis, de l’urètre et du rectum.

 Les sujets qui ont des rapports anaux réceptifs (femmes et hommes homosexuels) peuvent présenter une rectite sévère (fébrile) ou une rectocolite sanglante avec des écoulements rectaux purulents qui correspondent à la phase secondaire, la phase primaire étant passée inaperçue.

Dans la phase chronique, la colite simulant la maladie de Crohn peut causer un ténesme et des sténoses dans le rectum ou une douleur due à une inflammation pelvienne.

La rectoscopie peut détecter l’inflammation diffuse, les polypes, les masses ou les exsudats mucopurulents.

La biopsie de la muqueuse rectale montre des granulomes sous-muqueux, des abcès cryptiques et des cellules inflammatoires mononuclées diffuses.

La clinique, l’endoscopie (rectoscopie) et les données histopathologiques (biopsie) peuvent mimer une maladie de Crohn du rectum.

5. Diagnostic :

Le diagnostic repose sur les signes cliniques, mais une confirmation est généralement possible par des techniques sérologiques ou par immunofluorescence.

La lymphogranulomatose vénérienne est suspectée en cas d’ulcérations génitales, de gonflement des ganglions inguinaux ou de rectite, et chez les sujets qui vivent ou en ont visité des régions d’endémie, ou ont eu des rapports sexuels avec des personnes venant de régions où l’infection est endémique.

Elle est également suspectée en cas de bubons, qui peuvent être confondus avec des abcès provoqués par une autre bactérie.

La recherche du Chlamydia trachomatis est primordiale : les prélèvements, à placer dans un milieu de transport, se font par écouvillonnage des lésions (chancre), sous anuscopie ou mieux sous rectoscopie (anorectite) ou par ponction (ganglion).

Le diagnostic est habituellement établi par la sérologie (titres de fixation du complément > 1:64 ou titres d’immunofluorescence > 1:256) ou en effectuant un test basé sur la Polymerase Chain Reaction (PCR) +++.

6. Traitement :

Le traitement est simple mais plus long que celui des infections à Chlamydia dues à d’autres sérotypes : tétracyclines ou érythromycine per os.

La doxycycline 100 mg par voie orale 2 fois/jour +++, l’érythromycine 500 mg par voie orale 4 fois/jour, ou la tétracycline 500 mg par voie orale 4 fois/jour, chacune administrée pendant 21 jours, permet une guérison rapide des lésions débutantes.

La tuméfaction des tissus lésés à un stade avancé peut ne pas guérir malgré l’éradication de la bactérie.

La ponction évacuatrice des bubons, au besoin répétée, évite la fistulisation, et soulage les symptômes.

Les bubons fluctuants peuvent être extraits par une ponction de drainage ou par la chirurgie à visée symptomatique, mais la plupart des patients répondent rapidement à l’antibiothérapie.

Les abcès et les fistules exigent souvent un geste chirurgical, mais les sténoses rectales peuvent habituellement être dilatées.

Si les sujets ont eu un contact sexuel avec une personne atteinte de lymphogranulomatose vénérienne au cours des 60 jours précédant le début des symptômes, ils doivent être examinés et testés à la recherche d’une infection chlamydienne urétrale, cervicale ou rectale selon le site d’exposition. Ils doivent être traités de manière présomptive (par une dose unique d’azithromycine 1 g par voie orale ou de doxycycline 100 mg par voie orale 2 fois/jour pendant 7 jours), quelles que soient les preuves de présence d’une lymphogranulomatose vénérienne.

Après un traitement apparemment efficace, le suivi doit être poursuivi pendant 6 mois.

Points clés

La lymphogranulomatose vénérienne est due à une souche particulière dite L de Chlamydia trachomatis.

Elle se traduit comme la syphilis par un chancre sur les organes génitaux et surtout des adénopathies (ou ganglions) dans les creux inguinaux pouvant évoluer vers la fistulisation.

La LGV peut, également, donner des infections anorectales, sévères et fébriles.

Le diagnostic repose sur le prélèvement local avec recherche de Chlamydia trachomatis.

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