« La vie des ovaires conditionne l’endométriose », disait Brocq.

Cet axiome est toujours valable.

1. Méthodes :

1) Traitement médical :

Il vise à supprimer le statut hormonal, source d’auto-entretien de l’affection.

Actuellement, nous disposons de plusieurs types de traitement.

a) Progestatifs de synthèse :

Ils représentent l’essentiel du traitement.

Il faut utiliser des progestatifs dont l’action anti-estrogénique est importante :

– les dérivés de la 19-norprogestérone (Surgestone ®, Lutényl ®) sont particulièrement intéressants, car ils ne possèdent pas d’effet androgénique et n’ont que peu d’effets métaboliques,

– les dérivés de la 19-nortestostérone (Orgamétril ®) sont très efficaces du fait de leur forte action anti-estrogène, mais entraînent des effets métaboliques qui restreignent leur utilisation (effet hypertriglycéridémiant, hypercholestérolémiant, anabolisant).

Le traitement doit être prescrit en continu, de manière à bloquer le cycle menstruel et à éviter la desquamation de l’endomètre.

Sous l’influence du traitement, les glandes endométriales deviennent épaisses, inactives. Leur nombre diminue puis il se constitue une atrophie véritable. Le stroma se décidualise ; il est alors le siège d’une nécrose et d’une hyalinisation. Cette notion résulte de l’action directe de l’hormone de synthèse sur l’endomètre et du blocage hypophysaire.

Les inconvénients des progestatifs à fortes doses en continu sont connus : prise de poids, hirsutisme, troubles vasculaires.

DCI    

Spécialités

Dydrogestérone

Duphaston ®

Acétate de chlormadinone

Lutéran  ®

Chlormadinone Sandoz ®

Acétate de médroxyprogestérone

Dépoprodasone ®

Médrogestone

Colprone ®

Nomégestrol

Lutényl ®

Promégestone

Surgestone ® 

Lynestrénol

Orgamétril ®

Acétate de cyprotérone

Androcur ®

Pris à forte dose ou sur une longue période, le Lutényl ® et le Lutéran ®, utilisés dans la prise en charge de la ménopause, des troubles menstruels et de l’endométriose, multiplient le risque de développer un méningiome, une tumeur cérébrale, selon l’Agence nationale du médicament.

Sur la base d’une étude épidémiologique réalisée chez un très grand nombre de patientes, l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament) indique que la prise de médicaments progestatifs pour traiter les troubles de la ménopause, des troubles menstruels et de l’endométriose accroît le risque de développer un méningiome (tumeur, le plus souvent bénigne, qui se développe à partir des méninges).

* Un risque multiplié par 12 après 5 ans de traitement :

Selon l’Agence, ce phénomène a notamment été observé chez les femmes exposées, sur une longue durée, à un traitement à base d‘acétate de chlormadinone (Lutéran ®) ou d’acétate de nomégestrol (Lutényl ®) et de leurs génériques.

Les femmes traitées plus de 6 mois avec ces médicaments macroprogestatifs sont exposées à un risque de méningiome conduisant à une chirurgie intracrânienne multiplié respectivement par 3,3 et 3,4 par rapport au risque de base, puis par 12,5 à partir d’une dose cumulée correspondant à 5 ans de traitement. Par ailleurs, ce risque augmente fortement avec l’âge : il est, par exemple, 3 fois plus élevé pour les femmes de 35 à 44 ans que pour celles de 25 à 34 ans. Plus de 400.000 femmes prenaient ce traitement en 2019, en France.

* IRM cérébrale dans certains cas :

L’ANSM (Autorité nationale de sécurité du médicament) invite donc les patientes à consulter leur médecin pour discuter de leur prise en charge et changer de traitement.

Chez les femmes qui ont plus de 35 ans et traitées par Lutényl ® et Lutéran ® depuis plus de 5 ans, une IRM cérébrale sera systématiquement proposée. Il en est de même pour les femmes ayant des symptômes évocateurs d’un méningiome (maux de tête fréquents, troubles de vision, du langage ou de l’audition, vertiges, troubles de la mémoire…).

b) Danazol (Danatrol 200 mg ®) :

Il s’agit d’un antigonadotrope puissant, dérivé de la testostérone ; il provoque une ménopause artificielle en bloquant la sécrétion d’estrogènes par les ovaires.

Il est utilisé pour soulager les douleurs, à la dose de 2 à 3 gélules/jour, en continu ou en séquentiel (20 j/mois), dans les endométrioses rebelles.

Le traitement dure généralement de 6 à 9 mois. 

Ses effets secondaires sont : prise de poids, bouffées de chaleur, sécheresse vaginale, parfois effets androgéniques (acné, hirsutisme), crampes, nervosité. Ces effets disparaissent à l’arrêt du traitement.

c) DIU au lévonorgestrel (Miréna ®) : Cf chapitre DIU

Il peut être proposé dans les adénomyoses entraînant des ménométrorragies.

d) Agonistes du GnRH :

Ils inhibent l’axe hypophyso-ovarien, réalisant un état de pseudo-ménopause sans les effets métaboliques des progestatifs ou du Danazol.

On observe cependant des bouffées de chaleur, une sécheresse vaginale, des céphalées, des sautes d’humeur, une perte minérale osseuse à court terme.

Ils ne sont indiqués en première intention que dans les formes graves ou étendues (stades III et IV) ou lorsqu’il existe des contre-indications aux stéroïdes.

Ils sont utilisés, en seconde intention, en cas d’échec des progestatifs ou du danazol.

Ils sont administrées par injection mensuelle. Habituellement, la durée du traitement ne dépasse pas 6 mois.

Certains auteurs vont jusqu’à 1 an de traitement, avec association d’une “add back thérapie” au-delà de 3 à 6 mois (celle-ci consiste à administrer des estrogènes, de préférence par voie cutanée, afin de diminuer les effets secondaires désagréables des analogues de la GnRH).

DCI

Spécialité

Présentation

Prescription

Triptoréline

Décapeptyl LP 3 mg ®

Ampoule 3 mg

1 ampoule IM/mois

Leuproréline

Enantone LP 3,75 mg ®

Ampoule 3,75 mg

1 ampoule IM-SC/mois

Nafareline

Synarel ®

Pulvérisation nasale

400 g/j en deux prises

2) Traitement chirurgical :

a) Adénomyose :

– Le traitement chirurgical de l’adénomyose est souvent radical.

En effet, l’hystérectomie totale, avec ou sans conservation ovarienne, est le seul traitement capable de supprimer l’adénomyose.

Les ovaires ne doivent pas être conservés s’il existe une localisation extragénitale de l’endométriose. Il est préférable, dans ce cas, de ne pas instaurer de traitement substitutif.

L’hystérectomie subtotale doit théoriquement être rejetée du fait de la persistance de l’évolution des lésions d’adénomyose sur le col restant et sur l’isthme, source de métrorragies.

– La résection endométriale par hystéroscopie (endométrectomie) peut être proposée chez la femme qui ne souhaite plus d’enfants, pour traiter les ménométrorragies si l’endométriose n’est pas trop profonde.

Les résultats sur les saignements s’altèrent rapidement avec le temps.

– La résection isolée d’un adénomyome est difficile car il n’y a pas de plan de clivage.

b) Endométriose externe intrapéritonéale :

Il peut être conservateur ou radical.

– Traitement conservateur :

Il vise à enlever les noyaux d’endométriose et à rétablir les conditions anatomiques les plus proches possibles de la normale et les plus favorables à la fécondation.

Cette chirurgie est difficile car les lésions endométriosiques n’ont pas de plan de clivage avec les tissus avoisinants.

Il est souvent fait actuellement par cœliochirurgie avec éventuellement utilisation de la coagulation bipolaire ou laser CO2 pour la destruction des lésions superficielles.

On complètera l’acte chirurgical par un traitement médical.

– Traitement radical :

L’hystérectomie totale avec castration ne se justifie que dans des formes très sévères, rebelles aux traitements médicaux, chez une femme proche de la ménopause. Elle est exceptionnelle. La castration supprime les hormones ovariennes et entraîne la régression des lésions restantes.

L’existence d’une endométriose digestive peut nécessiter une résection sigmoïdienne.

2. Indications :

1) Adénomyose :

* L’adénomyose asymptomatique ne doit être ni traitée ni surveillée.

En effet, il ne faut pas traiter les formes muettes découvertes lors d’un bilan radiologique effectué pour d’autres raisons.

Ces formes muettes sont en effet limitées et peu réceptives aux influences hormonales.

Elles ne doivent pas être considérées comme pathologiques (elles correspondent, peut-être à un processus de sénescence myométriale). 

* En cas de ménorragies, on peut proposer :

– un DIU au lévonorgestrel,

– un traitement par progestatifs du 5ème au 25ème jour du cycle ou continu, qui permet quelquefois d’atteindre la ménopause (son efficacité n’est pas très importante car les lésions d’adénomyose profondément incluses dans le myomètre réagissent mal à ce traitement médical),

– les analogues de la GnRH peuvent être utilisés pour stopper les hémorragies ; leurs effets secondaires en limitent l’utilisation à une période de 6 mois,

– les techniques de destruction endométriale, qui peuvent être efficaces à moyen terme et permettre d’atteindre la ménopause. Leur efficacité se dégrade rapidement au fil du temps.

En cas d’échec ou de douleurs invalidantes, seule l’hystérectomie totale (avec conservation des ovaires) peut venir supprimer ces foyers profondément enchâssés dans le myomètre.

* Le traitement chirurgical est proposé en première intention de façon assez fréquente en raison de l’âge et de l’association avec d’autres anomalies (fibrome) :

– l’hystérectomie totale avec conservation ovarienne doit être préférée, dans la mesure du raisonnable et en l’absence de localisations extra-génitales d’une endométriose externe, à l’hystérectomie castratrice, étant donné l’âge de ces patientes,

– en cas de prolapsus associé et si le volume utérin l’autorise ⇒ hystérectomie par voie basse.

2) Endométriose externe :

L’abstention thérapeutique est légitime lorsque l’endométriose est minime (stade I), asymptomatique et de découverte fortuite à l’occasion d’une cœlioscopie ou d’une laparotomie.

a) Chez la femme jeune présentant un problème d’infertilité :

Il est recommandé de recourir d’emblée à la cœlioscopie en cas de suspicion clinique ou échographique d’endométriose.

– Découverte de formes minimes ou modérées : destruction des lésions par coagulation bipolaire.

Il n’y a pas d’indications à un traitement médical complémentaire qui, entraînant une aménorrhée, retarderait l’obtention d’une grossesse. Il faut aussi corriger rapidement les divers facteurs concourant à l’infertilité : dysovulation, glaire inadéquate, de façon à obtenir une grossesse avant que l’endométriose ne s’aggrave.

– Découverte de formes moyennes et sévères (stades III et IV) : 

Abstention chirurgicale et traitement médical par agonistes de la GnRH qui permet de reprendre secondairement la patiente dans de meilleures conditions.

Le traitement chirurgical consistera en : adhésiolyse, résection de kyste, fimbrioplastie.

En post-opératoire, le traitement médical n’est pas recommandé.

Le recours direct à la FIV ne se justifie que pour l’existence d’une autre indication : salpingectomie, infertilité masculine.

– Au final, en cas d’infertilité persistante : on pourra avoir recours à une FIV dont les résultats sont bons dans les formes modérées (21 % de grossesses par ponction) et moins bons dans les stades III et IV (14 %). La prescription d’agonistes de la GnRH pendant 3 mois avant la FIV améliore le taux de grossesses obtenues.

b) Chez la femme présentant une endométriose douloureuse :

Les lésions d’endométriose retrouvées ne sont pas toujours la seule étiologie des douleurs dont souffre la patiente. Des facteurs psychologiques peuvent influencer l’importance de la douleur, et la douleur liée à l’endométriose peut entraîner des altérations de la personnalité.

Quelques explications simples sur la nature de l’affection, sa bénignité, son évolution toujours favorable à la ménopause, rassurent bien des patientes inquiètes d’avoir une affection grave, voire cancéreuse.

A l’occasion de ces explications, le dialogue avec la patiente permettra parfois de révéler un conflit conjugal ou professionnel à l’origine des douleurs plus que l’endométriose minime.

Une psychothérapie simple, des recommandations pour une meilleure hygiène de vie (pratique d’un sport, du yoga, de techniques de relaxation…) seront suffisantes.

La prise en charge psychologique des patientes souffrant de douleurs pelviennes chroniques améliore les résultats du traitement. Une approche multidisciplinaire est recommandée pour les douleurs invalidantes.

* Traitement médical :

Le diagnostic d’endométriose doit autant que possible être confirmé histologiquement ou chirurgicalement avant de mettre en œuvre un traitement prolongé.

Dans tous les cas, le recours à des antalgiques peut être utile. Les antalgiques de niveau III peuvent être utilisés dans les formes hyperalgiques.

Le traitement médical hormonal vise à obtenir une aménorrhée :

– contraceptifs estroprogestatifs monophasiques en continu : pris en continu, ils calment les douleurs et ralentissent l’évolution de la maladie ;

– progestatifs, danazol : prescrits en continu, ils sont indiqués dans les formes symptomatiques graves ou étendues.

Le traitement sera prolongé 6 à 8 mois. En cas de succès, le relais sera pris par les estroprogestatifs.

Parfois les progestatifs seront prolongés jusqu’à la ménopause si elle est proche.

En cas d’échec ou de contre-indication, on aura recours aux analogues de la GnRH.

– analogues de la GnRH : ce traitement ne sera pas prolongé plus de 6 mois en raison du risque d’ostéoporose.
Souvent, ils précéderont ou encadreront un traitement chirurgical : ablation cœliochirurgicale d’un kyste ovarien, voire ovariectomie ou chirurgie d’une endométriose profonde.

Les récidives sont fréquentes quel que soit le traitement, obligeant à une reprise des traitements plusieurs fois avant la ménopause. Celle-ci confirmée, un traitement substitutif peut être donné, il est rare de “réveiller” l’endométriose.

Endométriose peu évoluée :

– Douleurs cycliques mensuelles en dehors d’un besoin de contraception : AINS ayant l’AMM “dysménorrhée” dans les périodes douloureuses. Ex. : acide méfénamique (PONSTYL) 2 gél. à 250 mg x 3/j ou ibuprofène (BRUFEN) 400 mg à renouveler si besoin, max 1 600 mg/j.

– Dans les autres cas : progestatif à dose antigonadotrope ou contraception œstroprogestative monophasique en continu.

Endométriose profonde :

– Les progestatifs à dose antigonadotrope sont le plus souvent recommandés en première intention. Le traitement est instauré pour un minimum de 3 mois.

– La prescription des analogues de la GnRH ne devrait pas être prolongée au-delà de 6 mois (AMM). Ex. : triptoréline (DÉCAPEPTYL LP) 1 inj. IM/4 à 6 sem.

– A la fin du traitement par agonistes de la GnRH, un relais par progestatifs à doses antigonadotropes peut être proposé.

* Traitement chirurgical :

Il vise l’exérèse des foyers d’endométriose.

– En cas d’exérèse complète :

. un traitement médical complémentaire par progestatifs pour augmenter l’intervalle libre sans douleur est à discuter ;

. un traitement complémentaire par analogues de la GnRH n’est pas recommandé.

– En cas d’exérèse suboptimale, un traitement médical complémentaire est recommandé.

Nb : Des endométrioses extrapelviennes péri-ombilicales, pleurales, pulmonaires peuvent se voir et justifier une exérèse chirurgicale.

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