Il s’agit de la localisation du bacille de Koch (BK) au niveau de l’appareil génital ; elle représente 6 à 10 % des tuberculoses.

Sa fréquence a diminué au cours de ces cinquante dernières années (en rapport avec le développement de la vaccination de masse, des traitements antituberculeux et de l’amélioration des conditions de vie).

La forme habituellement rencontrée est une forme latente dont le diagnostic est évoqué au cours d’un bilan pour stérilité primaire ; les formes classiques avec lésions majeures sont plus rares.

Le diagnostic de tuberculose génitale est souvent difficile en raison de l’absence de confirmation bactériologique.

L’endomètre, les trompes et le péritoine sont le plus souvent atteints.

Le col et l’ovaire sont l’exception.

La tuberculose génitale survient surtout :

– chez des malades transplantées ou immunodéprimées,

– en cas d’antécédents personnels ou familiaux de tuberculose,

– avec notion d’un virage récent des cutiréactions, ou d’une IDR à la tuberculine explosive.

1. Voies de contamination : 

La contamination de l’appareil génital se fait essentiellement par voie hématogène ++ ; elle succède toujours à une inoculation plus ou moins patente, pulmonaire ou pleurale.

Il y a toujours un temps de latence entre l’inoculation et le développement de l’affection.

Ce sont d’abord les trompes qui sont contaminées, puis à partir de cette première localisation, le BK contamine le reste de l’appareil génital.

Le contexte bacillaire n’est pas toujours établi au moment du diagnostic ; en effet, dans 30 % des cas, le foyer primitif n’est pas retrouvé.

D’autres localisations secondaires doivent être recherchées, en particulier urinaires, qui sont associées dans environ 10 % des cas.

2. Clinique :

Les circonstances de découverte sont variées :

1) Infertilité primaire :

La tuberculose est actuellement responsable de 5 à 10 % des infertilités.

C’est au moment où la patiente s’inquiète de son infertilité que la tuberculose est découverte.

Chez plus du 1/3 des patientes, l’épisode de primo-infection est passé inaperçu ou n’a laissé aucune séquelle radiologique.

Parfois l’interrogatoire retrouve l’existence d’un syndrome abdominal qui a pu conduire à une appendicectomie abusive ou inutile.

2) Infertilité secondaire :

Cette forme inhabituelle est rarement due à une contamination tardive mais à la poussée évolutive de lésions latentes.

3) Formes avec troubles des règles :

– l’aménorrhée ou l’oligoménorrhée peu fréquentes sont secondaires, rarement primaires.

Elles sont dues soit à une synéchie totale ou cervico-isthmique, soit à des troubles de la réceptivité de l’endomètre atteint, soit à des adhérences périovariennes (anovulation).

– les formes hémorragiques sont une manifestation plus fréquente et peuvent revêtir tous les types : ménorragies, métrorragies ou hémorragies intermenstruelles.

Leur origine est généralement endométriale, plus rarement tubaire par salpingite hémorragique.

4) Formes douloureuses (simulant une salpingite) : 

Elles sont fréquentes et se manifestent par des douleurs pelviennes modérée mais permanente, à type de pesanteur, sans atteinte de l’état général ni leucorrhées, mais associées à des troubles des règles ou à une dyspareunie.

L’examen clinique ne retrouve qu’une douleur provoquée des culs-de-sac.

C’est le plus souvent à la cœlioscopie (ou à la laparotomie exploratrice) que le diagnostic est redressé.

Les signes faisant suspecter une tuberculose génitale sont :

– le terrain : patiente immigrée, transplantée ou immunodéprimée,

– les antécédents de tuberculose pulmonaire personnels ou de l’entourage,

– l’altération de l’état général,

– l’absence de vaccination par le BCG, une IDR phlycténulaire,

– l’inefficacité du traitement antibiotique non spécifique.

3. Diagnostic :

1) Etude du contexte tuberculeux :

Les lésions tuberculeuses antérieures ou contemporaines doivent être recherchées car elles auront valeur d’orientation, mais leur absence constatée dans 30 à 50 % des cas ne permet en aucun cas d’éliminer la tuberculose génitale.

L’interrogatoire peut retrouver :

– une notion de contage ou d’un virage de cuti-réaction,

– l’absence de vaccination par le BCG (ou l’absence de vérification de cette vaccination),

– une stérilité,

– une atteinte de l’état général…

La recherche de l’allergie tuberculeuse est faite par l’IDR à la tuberculine (avec 10 U de tuberculine purifiée) : une réponse érythémateuse intense est en faveur du diagnostic, mais une réaction peu intense ou négative ne permet pas de l’éliminer.

Le bilan biologique est d’un intérêt médiocre : VS accélérée, lymphocytose.

2) Examen clinique :

Il est particulièrement pauvre, le plus souvent normal.

L’examen au spéculum confirme un col sain et une glaire propre.

3) Examens complémentaires :

Pour affirmer le diagnostic, 5 explorations sont souvent nécessaires : l’HSG (et parfois l’hystéroscopie), la cœlioscopie, la biopsie d’endomètre, la culture du sang des règles et le bilan systématique de la tuberculose.

L’HSG et la cœlioscopie ont un rôle d’orientation et seuls la biopsie et l’examen bactériologique peuvent affirmer la tuberculose génitale.                           

a) Téléthorax :

Indispensable, il permet de découvrir des images séquellaires pleurales et pulmonaires qui ont une grande valeur d’orientation.

b) Hystérosalpingographie : Cf chapitre spécial

c) Hystéroscopie :

Cet examen doit respecter les mêmes principes et contre-indications que l’HSG.

Elle permet de visualiser des synéchies endo-utérines correspondant aux aspects HSG.

d) Cœlioscopie : Cf chapitre spécial

e) Autres examens :

Biopsie d’endomètre : c’est l’examen primordial pour le diagnostic de tuberculose génitale. Les résultats sont jugés sur les plans histologique et bactériologique.

La biopsie doit être faite en fin de phase lutéale (3 jours avant les règles).

On utilise généralement la canule de Novak (4 prélèvements).

Actuellement, on préfère le curetage biopsique sous anesthésie générale en l’absence de signes infectieux.

– Examen du sang des règles : le sang des règles est mis en culture (excellent moyen diagnostic).

Chez la jeune fille : prélèvement des sécrétions cervico-utérines par introduction d’un porte-coton à l’intérieur du vagin.

Arguments diagnostiques : ce sont :

– la découverte d’autres localisations tuberculeuses (pulmonaires, urologiques),

– l’existence, lors de l’hystérosalpingographie (en l’absence de signes infectieux), de signes évocateurs,

– l’existence de lésions évocatrices à la cœlioscopie.

Au total : le diagnostic ne peut être que bactériologique, voire histologique :

– par une biopsie d’endomètre (ou par curetage biopsique) : qui permet un diagnostic anatomopathologique (follicules giganto-épithélioïdes) ou bactériologique (bacille de Koch individualisé par examen direct ou après culture sur milieu de Löwenstein),

– par des biopsies pratiquées en cours de cœlioscopie, systématique pour faire le bilan lésionnel (ou prélèvement pour culture du liquide péritonéal).

f) Bilan de la tuberculose :

Outre le téléthorax, le bilan doit comporter la recherche du BK à l’examen direct dans les crachats, le liquide gastrique et les urines.
Une UIV sera demandée pour dépister une atteinte rénale.

Au total : le diagnostic de tuberculose génitale est le plus souvent soupçonné devant des aspects hystérographiques ou cœlioscopiques évocateurs. Ce diagnostic est rarement affirmé sur le plan bactériologique mais reste très probable en raison des données de l’interrogatoire et des bilans clinique, radiologiques et endoscopique.

4. Traitement :

Le traitement est médical et/ou chirurgical. 

L’efficacité du traitement médical laisse peu d’indications au traitement chirurgical en cas de lésions évolutives.

1) Traitement médical : 

Il repose sur une association de plusieurs antituberculeux.

– Indications : toutes les tuberculoses prouvées doivent être traitées même quand les lésions sont minimes et silencieuses. Lorsque la certitude anatomique ou bactériologique n’a pu être faite, alors qu’il existe des arguments convergents (antécédents indiscutables, HSG spécifique, cœlioscopie évocatrice), il faut accepter le diagnostic et instituer le traitement.

– Surveillance du traitement : les risques toxiques du traitement imposent avant sa mise en route un examen ophtalmologique et le dépistage d’une insuffisance rénale ou hépatique.

La guérison sera confirmée par un examen clinique normal, le retour des menstruations, la stabilisation radiologique, une VS normale et des examens histologiques et bactériologiques négatifs que l’on vérifiera 6 mois plus tard.

La cœlioscopie de contrôle peut être pratiquée 6 mois à 1 an après la mise en route du traitement.

Nb : L’HSG et la cœlioscopie ne permettent pas d’affirmer la guérison, mais d’apprécier les séquelles.

2) Traitement chirurgical : 

La diminution des indications chirurgicales a été sensible ces dernières années, car l’efficacité des traitements anti-tuberculeux s’est améliorée, et les formes macrolésionnelles sont devenues rares.

Indications restantes :

– persistance de masses annexielles malgré le traitement médical, en particulier l’abcès froid,

– rechute de la tuberculose de l’endomètre après une année de traitement, 

– persistance de douleurs pelviennes après 3 mois de traitement ou lorsqu’elles n’ont pas totalement disparu au terme d’un an de traitement,

– fistules qui ne tarissent pas.

Les partisans d’une chirurgie radicale sont les plus nombreux et proposent une hystérectomie totale avec salpingectomie bilatérale évitant les récidives ultérieures.

Les ovaires rarement atteints doivent être conservés.

3) Résultats thérapeutiques :

– La guérison de la maladie tuberculeuse est difficile à affirmer : le taux de guérison varie entre 90 et 95 % actuellement (par moindre gravité des tuberculoses génitales, et grâce à l’efficacité des traitements).

– Le traitement de l’infertilité reste toujours décevant : les grossesses à terme chez les femmes traitées pour tuberculose existent, mais sont exceptionnelles.

Malgré le traitement par trithérapie et la cure éventuelle des synéchies, la stérilité peut rester définitive par destruction profonde de l’endomètre.

Il n’y a pas de place pour la chirurgie tubaire qui est presque toujours un échec.

Les indications de FIV sont possibles chez les tuberculeuses traitées et guéries, en cas d’obstruction tubaire isolée, à la condition que l’utérus ne présente plus de lésions à l’hystérographie ou mieux à l’hystéroscopie avec prélèvements endométriaux multiples.

Conclusion :

Grâce aux progrès thérapeutiques, la tuberculose génitale n’est plus une maladie redoutable, mais l’infertilité continue à rester la séquelle quasi-inéluctable.

D’où l’intérêt de la prévention par le BCG !

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