Avant le début des années 80, la seule méthode de diagnostic anténatal reposant sur un prélèvement de tissu d’origine fœtale était l’amniocentèse.
La biopsie du trophoblaste ou prélèvement de villosités choriales (PVC) ou choriocentèse est, avec le prélèvement de sang fœtal, une technique récente ; il permet de prélever sous échoguidage un fragment de trophoblaste à partir duquel peuvent être faites des études chromosomiques ou de biologie moléculaire ou, beaucoup plus rarement, recherchées des maladies métaboliques.
Les deux avantages fondamentaux du PVC sont la précocité du diagnostic (à partir de 9 SA) et la rapidité avec laquelle les résultats peuvent être connus (pour certains résultats dans les 24 à 48 heures, avec un délai maximum de 8 jours), permettant ainsi de décider, à un terme très précoce de la grossesse, de la conduite à tenir.
Les désordres psychologiques consécutifs au diagnostic tardif de certaines maladies sont ainsi évités.
Ces 2 avantages font de plus en plus préférer cette technique à l’amniocentèse.
1. Technique : Cf chapitre spécial
2. Indications :
Elles sont largement dominées par l’étude du caryotype ; certaines indications sont rares (maladies métaboliques), d’autres rarissimes (groupage sanguin).
1) Caryotype :
Le tissu villositaire est jeune et prolifératif ; les mitoses spontanées s’y retrouvent en nombre suffisant pour être examinées, sans passer nécessairement par les cultures.
La qualité du caryotype obtenue sur trophoblaste est cependant moins bonne que celle obtenue sur liquide amniotique : les mitoses sont moins nombreuses que lors des cultures sur fibroblastes ; les chromosomes observés sont plus courts ; les méthodes de banding plus aléatoires. Par contre, le caryotype direct permet d’obtenir rapidement (48 h) et de façon fiable le nombre de chromosomes et le sexe ; il faut toutefois rester prudent en ce qui concerne le diagnostic d’anomalie de structure.
Il peut également exister des discordances de caryotype entre le trophoblaste et le fœtus du fait de clones cellulaires différents (mosaïcisme). Mais elles sont tellement grossières qu’elles prêtent peu à confusion. La prudence est de règle et peut conduire par sécurité à un contrôle du caryotype sur liquide amniotique à 17 SA.
Au total, le trophoblaste constitue un tissu très satisfaisant pour le diagnostic de sexe ou la recherche d’anomalies numériques ; par contre, il ne constitue pas, dans l’état actuel des techniques cytogénétiques, le meilleur tissu pour la mise en évidence d’une anomalie de structure.
Au vu des taux de fausses couches (cf. ci-dessus), on peut considérer que les indications sont les mêmes que celles de l’amniocentèse, y compris pour l’âge maternel :
– âge maternel > 38 ans,
– anomalie chromosomique équilibrée de l’un des parents,
– anomalie chromosomique chez l’un des enfants du couple,
– découverte échographique d’une anomalie morphologique dont on connaît le risque d’anomalie chromosomique associée, se limitant à ces termes précoces à la découverte d’un hygroma kystique (syndrome de Turner, trisomie 21), d’une omphalocèle (trisomies 18, 13, 21), d’une hydrocéphalie (triploïdie).
2) Diagnostic de sexe :
Il peut être connu en 48 h par l’examen direct.
Ses principales indications sont les maladies liées au sexe, telles que :
– myopathie de Duchenne de Boulogne,
– hémophilies A et B,
– syndrome de l’X fragile,
– maladies liées au sexe dont on ne connaît pas les bases biologiques (syndrome de Wiskott-Aldrich).
Lorsque le défaut moléculaire est connu, ou le gène localisé, seuls les fœtus masculins conduiront à sa recherche par la biologie moléculaire et à l’interruption de la grossesse pour les seuls fœtus atteints.
3) Diagnostic de certaines maladies génétiques (analyse de l’ADN par la biologie moléculaire) :
Le trophoblaste constitue ici un meilleur tissu que le liquide amniotique : les villosités choriales sont très riches en noyaux donc en ADN. Toutes les maladies génétiques ne sont pas encore accessibles au diagnostic par biopsie villositaire. Pourtant l’avenir est prometteur et la liste de celles qui le sont s’allonge tous les ans.
L’indication est posée s’il existe des cas index dans la famille et étude familiale préalable +++.
Un prélèvement d’excellente qualité et en quantité suffisante est indispensable.
Parmi les principales affections concernées peuvent être citées :
– maladies de l’hémoglobine : drépanocytose, thalassémies,
– hémophilies A et B,
– myopathie de Duchenne de Boulogne,
– retard mental avec X fragile,
– hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase,
– autres : adrénoleucodystrophie, déficit en alpha-antitrypsine, phénylcétonurie…
4) Diagnostic de certaines maladies métaboliques :
Il s’agit de doser l’activité enzymatique recherchée dans le tissu villositaire. Ceci ne peut se faire que si l’activité enzymatique s’exprime dans le trophoblaste et qu’il existe un cas index dans la fratrie.
Le résultat peut être rendu en 24 h pour un certain nombre d’entre elles. Il existe cependant un risque de contamination maternelle (5 % de contamination peut donner un faux négatif).
Mais c’est l’indication la plus difficile à réaliser en pratique puisque ces maladies sont rares et que les dosages sont faits dans des laboratoires spécialisés peu nombreux, dispersés en Europe (organisation du transport, envoi en 24 h après avoir pris contact avec le laboratoire).
– Sphingolipidoses : Maladie de Gaucher, de Niemann Pick, de Krabbe, de Fabry…
– Oligosaccharidoses : Mannosidose, fucosidose.
– Mucopolysaccharidoses (types I à VII).
– Aminoacidopathies, etc.
5) Groupe sanguin et rhésus :
Il s’agit d’une indication exceptionnelle chez une femme de Rhésus négatif porteuse d’agglutinines irrégulières ayant un ou plusieurs antécédents d’allo-immunisation FM sévères.
Deux techniques sont disponibles :
– la technique de coloration Immuno-Or-Argent sur biopsie de trophoblaste, qui permet de déterminer le phénotype Rh et Kell,
– la PCR spécifique (appliquée aux gènes Rh D, c, E, et Kell) peut s’effectuer sur des cellules du trophoblaste (ou du liquide amniotique).
En effet, il est parfois utile de déterminer précocement le groupe Rhésus du fœtus en cas d’hétérozygotie paternelle, ce qui permet d’éviter l’exposition de la mère et de l’enfant à des souffrances ultérieures (hydramnios, anasarque…) en interrompant la grossesse si l’embryon est Rhésus positif.
6) Indications psychologiques :
Dans certains contextes particuliers (chez une femme ayant déjà subi une interruption thérapeutique de grossesse, ou amenée de par sa profession à s’occuper d’enfants handicapés…), il est possible d’envisager un diagnostic anténatal précoce orienté par la seule angoisse maternelle.
Il est un fait que l’on retrouve des anomalies chromosomiques dans une fréquence non négligeable dans cette indication !
3. Conclusion :
Le PVC occupe une place de plus en plus importante dans le cadre du diagnostic anténatal puisqu’il permet de réaliser un diagnostic précoce et fiable rapidement, sans augmenter semble-t-il le risque d’avortement.
Le PVC a, en contrepartie, un certain nombre d’exigences :
– sa précocité impose de prévoir une consultation auprès d’un généticien suffisamment tôt, idéalement avant même la conception, sinon le plus tôt possible dès le diagnostic de grossesse fait,
– ses risques (dominés par le risque d’avortement) impliquent qu’il soit réalisé par des équipes entraînées en ayant une pratique suffisante et régulière,
– sa fiabilité impose le respect des indications : si le diagnostic de sexe, d’anomalies numériques, d’études de l’ADN ou de maladies métaboliques sont de bonnes indications, il n’en est actuellement pas tout à fait de même concernant les anomalies de structure.
C’est la raison pour laquelle les indications de cette méthode doivent être posées avec rigueur, en tenant compte des risques encourus qui devraient impérativement être exposés au couple demandeur.