1. Définition :

Le spina bifida (du latin signifiant “épine fendue en deux”) est une malformation congénitale liée à un défaut de fermeture du tube neural ; ce défaut permet à une partie du contenu du canal vertébral de sortir et de former une hernie.

Synonyme : dysraphisme spinal (rachidien) ; myélodysraphie.

Cette malformation se produit durant la quatrième semaine de la vie embryonnaire.

Le plus souvent, cette malformation concerne l’extrémité caudale et donc la région sacrée, voire lombaire ; il en résulte l’absence de l’apophyse épineuse d’une ou plusieurs vertèbres.

De gravité variable, cette malformations va du spina bifida occulta au méningocèle (protrusion des méninges) jusqu’au myéloméningocèle (protrusion des méninges avec la moelle épinière).

Les nerfs lombo-sacrés affectés par le myéloméningocèle participent :

– aux fonctions musculaires (hanche, cuisse, genou, jambe, pied),

– à la motricité digestive,

– au contrôle vésical (innervation de la vessie et de ses sphincters) et anal (sphincter anal),

– aux fonctions génitales (masculines et féminines).

La spina bifida autre que la spina bifida occulta concerne une naissance sur 2.000. 

2. Formes de spina bifida :

1) Spina bifida occulta :

Il représente la forme mineure et la plus répandue de la malformation. Il n’existe pas d’ouverture ni de déformation cutanée dans la région lombo-sacrée (la peau en regard des anomalies peut rester normale ou porter une zone très poilue, un nævus ou un hémangiome, voire une petite dépression du derme).

Pourtant la radio révèle une fermeture incomplète de la partie postérieure de la vertèbre.

Dans cette forme, la fente reste très limitée, et la moelle épinière n’en dépasse pas (il n’y a pas de protrusion).

Les conséquences de cette forme sont variables, mais la plupart du temps asymptomatiques.

Cependant, les formes complexes du spina bifida occulta peuvent entraîner en général des problèmes moteurs, une discrète altération de la sensibilité, et des atteintes du colon, voire une incontinence urinaire. Ces formes complexes sont souvent associées à d’autres malformations. 

2) Spina bifida myéloméningocèle :

Le myéloméningocèle est la forme viable la plus grave de spina bifida. La moelle épinière accompagne les méninges (qui recouvrent normalement la moelle épinière et le cerveau) qui émergent d’une fente pour former un “sac” (ou hernie) nettement visible dans le dos. Cette ouverture anormale peut être réparée chirurgicalement juste après la naissance.

Le sac méningé contient le liquide céphalo-rachidien, une partie de la moelle épinière, et la racine des nerfs lombo-sacrés.

La moelle est souvent endommagée et mal développée. Il en résulte (même après traitement, et dans une forme lombo-sacrée) une paralysie de gravité variable, des troubles sensitifs graves du membre inférieur, une incontinence urinaire et fécale, une possible hydrocéphalie, et des anomalies des vertèbres lombaires.

La gravité de cette forme clinique dépend de sa localisation et des dommages nerveux. 

3) Spina bifida méningocèle :

Il s’agit de la forme la plus rare : la partie postérieure de certaines vertèbres est fendue, les méninges poussées à travers cette ouverture pour former un sac méningé contenant du liquide céphalo-rachidien, et contrairement au myéloméningocèle, les nerfs rachidiens ne sont pas contenus dans ce sac . Les nerfs sont en général peu endommagés et fonctionnels, ce qui aboutit à des troubles discrets. 

4) Spina bifida à moelle ouverte :

Non viable, c’est la forme la plus grave de spina bifida.

Celle-ci ne peut en aucun cas être traitée cliniquement.

C’est le cas où, durant la morphogenèse spinale (et donc tôt dans le développement embryonnaire), la gouttière neurale ne se développe pas, laissant ainsi un arc neural totalement ouvert dans lequel le développement de la moelle épinière peut ne pas se faire, mais s’il se fait, la moelle ne sera pas entourée des méninges et sera en contact direct avec la phase profonde de l’épiderme dorsal.

Cette anomalie peut être mono-vertébrale ou poly-vertébrale.

3. Causes :

Le spina bifida est lié à une fermeture incomplète du tube neural durant le développement embryonnaire.

Normalement, le développement du tube neural se produit au cours de la 4ème semaine après la fécondation. Le tube se situe dans la région postérieure, entre le bas du dos et le crâne. Il va se fermer normalement en commençant par le milieu, puis la fermeture progresse vers les extrémités du corps. Cependant, il arrive que le tube ne se ferme pas totalement : la fermeture cesse avant d’avoir atteint l’extrémité caudale de l’embryon.

Les anomalies du tube neural comprennent aussi l’anencéphalie et l’encéphalocèle. Elles sont favorisées par le diabète, certains médicaments (pilule, valproate de sodium, antimétaboliques et autres) qui abaissent le taux d’acide folique ; leur prise augmente alors le risque d’avoir un enfant atteint.

Le valproate de sodium, molécule très efficace pour traiter l’épilepsie (Dépakine ®) augmente considérablement le risque de spina bifida chez les enfants exposés in utero. La fermeture du tube neural se produisant pendant la quatrième semaine de grossesse, quand la femme découvre qu’elle est enceinte il est déjà trop tard pour changer le traitement de son épilepsie dans le but d’éviter le spina bifida. La règle doit donc être “pas de grossesse sous valproate” (Dépakine ®) et non pas “pas de valproate pendant la grossesse”.

Des recherches récentes en génétique ont montré que l’une des causes du spina bifida est d’origine génétique.

Les anomalies de fermeture du tube neural et des vertèbres sont positivement corrélées à la présence d’un allèle mutant du gène de la 5,10-méthylène tétrahydrofolate réductase (MTHFR).

Le risque d’avoir un enfant atteint de spina bifida est donc plus grand chez les femmes qui ont déjà eu un enfant atteint de spina bifida.

De même, le risque d’avoir un enfant atteint de spina bifida est augmenté si l’un des deux parents est lui-même atteint de spina bifida et que la mère ne prend pas d’acide folique.

Les risques de malformations gravissimes augmentent encore quand les deux parents sont touchés et que la mère ne prend pas d’acide folique avant sa grossesse ou, au minimum, durant son premier mois de grossesse.

Des études récentes ont montré que le spina bifida est favorisé par un manque d’acide folique au début de la grossesse. Pour éviter cette situation, il est préférable de prendre sous forme de comprimé l’acide folique dans les six mois qui précèdent le début de la grossesse ou, au pire, dans le premier mois de grossesse.

La MTHFR est une enzyme clef du métabolisme de l’acide folique et de l’homocystéine. Ses mutations ont été impliquées dans des affections multifactorielles, comme les maladies neurologiques et cardiovasculaires qui s’améliorent avec un apport de folates.

Quelques rapports (à confirmer) suggèrent une corrélation entre le génotype 677C → T et les fentes palatines ou les anomalies congénitales cardiaques.

Il semble que le génotype 677C→ T accroît le taux d’avortement spontané de 30 % à 40 %, surtout en début de grossesse. Il augmente aussi de 40 % le risque de problèmes vasculaires placentaires et de 20 % la probabilité de prééclampsie.

Dans la population générale le risque de survenue de spina bifida se situe entre 1,2 et 1,6 pour 1.000 grossesses en Bretagne et 0,5 à 1 pour 1.000 dans le reste de la France.

Après un antécédent familial le risque se situe autour de 3 pour 1.000. Après un antécédent personnel le risque se situe autour de 3 pour 100.

4. Conséquences :

Le spina bifida risque d’entraîner une paralysie de gravité variable, des troubles sensitifs, une incontinence, des anomalies morphologiques de la moelle, des vertèbres et parfois des côtes, en fonction de la hauteur des vertèbres touchées. Dans de rares cas, un retard mental peut être associé.

Les conséquences sont variables selon le type de spina bifida :

– Le Spina bifida occulta est la forme la moins grave. Elle est souvent asymptomatique.

Il existe cependant des formes plus graves qui peuvent entraîner des faiblesses au niveau des jambes, une incontinence ou altérer la sensibilité.

– Le Spina bifida myéloméningocèle est la forme la plus grave car les nerfs rachidiens peuvent êtres endommagés. Elle peut entraîner un handicap mental ou physique. Les conséquences les plus courantes sont la paraplégie, l’hydrocéphalie, l’incontinence.

– Le Spina bifida méningocèle est la forme la plus rare. Le nerfs rachidiens étant peu ou pas touchés, les symptômes sont proches de ceux de la forme spina bifida occulta.

– Le Spina bifida à moelle ouverte est non viable.

5. Diagnostic :

Le diagnostic se fait aux alentours de la 22ème SA par différents moyens. 

1) Echographie obstétricale :

C’est le moyen le plus courant qui permet de détecter un spina-bifida visible morphologiquement.
Cependant, la plupart des spina bifida ne sont pas détectables avant le deuxième trimestre, d’où un diagnostic autour de la 22ème SA.

Nb : L’échographie peut aussi être utile pour le diagnostic après la naissance ; en effet, elle est moins invasive et moins irradiante que d’autres techniques existantes. Elle facilite le diagnostic de cette anomalie chez des enfants atteints d’énurésie. 

2) Amniocentèse : 

Cette technique de dosage permet de détecter l’alpha-fœtoprotéine dans le liquide amniotique, dont les taux sont souvent supérieurs à la moyenne en cas de spina bifida.

Elle est souvent proposée aux femmes qui ont déjà donné naissance à un enfant atteint de spina bifida et permet de poser un diagnostic précoce, à 16 SA. 

3) IRM :

Elle peut être utilisé pour affirmer le diagnostic.

6. Prévention :

1) Pour toutes les femmes :

L’acide folique (ou vitamine B9) a prouvé son utilité dans la prévention du spina bifida. Il est recommandé aux femmes ayant planifié leur grossesse de prendre au moins 0,4 mg d’acide folique à partir d’un mois avant le début de la recherche d’une conception, puis 1 mg par jour pendant les trois premiers mois de la grossesse, ce qui réduit le risque de 50 à 85 %.

L’acide folique est un facteur de maturation des cellules, qui est aussi indispensable à l’hématopoïèse.

Ses carences sont favorisées par une insuffisance d’absorption en particulier après résections intestinales, mais aussi par la prise de la pilule et/ou d’anticonvulsivants et/ou d’alcool. 

2) Pour les femmes présentant un facteur de risque identifié :

Pour les femmes épileptiques prenant un traitement (valproate de sodium, carbamazépine, Méthotrexate) ou pour celles ayant des antécédents d’anomalie de fermeture du tube neural, une dose plus élevée de vitamine B9 est proposée, de l’ordre de 5 mg/j, selon les mêmes modalités.

On propose par ailleurs un dépistage spécifique, portant sur le dosage sanguin de l’homocystéine, de la bétaïne, de l’alpha-fœtoprotéine, et des échographies morphologiques répétées par un médecin spécialisé.

7. Traitement :

1) Traitement du fœtus :

La chirurgie fœtale pratiquée aux États-Unis permet de suturer la membrane qui recouvre normalement la moelle épinière ainsi que la peau du fœtus. Ce type de prise en charge, en stoppant prématurément la fuite de liquide céphalo-rachidien, diminue les risques de séquelles pour l’enfant par rapport à une opération post-natale.

Elle augmente cependant le risque d’accouchement prématuré et nécessite une naissance par césarienne.

Ce type d’opération a été effectué avec succès pour la première fois en France en juillet 2014 par l’équipe du service de médecine fœtale de l’hôpital Armand-Trousseau (AP-HP) en collaboration avec l’équipe de neurochirurgie de l’hôpital Necker-Enfants Malades (AP-HP), dans le cadre d’un projet de recherche hospitalier. Cette intervention n’est pas sans risques. Pour le fœtus, il s’agit de la naissance prématurée. Chez les mères, les risques concernent les grossesses ultérieures, car le plus souvent un accouchement par césarienne sera imposé. Cette balance bénéfices/risques est longuement considérée par les médecins avant d’opter pour cette chirurgie. 

2) Traitement à la naissance :

La plupart des nouveau-nés touchés de méningocèle devront être opérés immédiatement pour refermer la fente afin de prévenir une aggravation des lésions et des infections (méningite, méningo-encéphalite). 

3) Traitement des symptômes :

Le spina bifida-myéloméningocèle est associé dans 80 % des cas à une hydrocéphalie qui nécessite la pose d’une dérivation ventriculo-péritonéale pour évacuer le trop-plein de liquide céphalo-rachidien.

L’opération (lorsqu’elle est nécessaire) doit se faire peu de temps après la naissance (quelques semaines à quelques mois), sinon le nouveau-né souffrira de troubles neurologiques et dans les cas les plus graves, des retards mentaux irréversibles (le liquide céphalo-rachidien écrase le cerveau, et la pression déforme les plaques crâniennes non encore soudées, faisant grossir anormalement la tête du nouveau-né). Une hydrocéphalie non traitée conduit à la mort de l’enfant.

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