La vaccination permet de protéger non seulement la mère contre certaines infections potentiellement graves, mais aussi le fœtus et le nouveau-né grâce au transfert transplacentaire des anticorps maternels.
La vaccination de la femme enceinte s’impose le plus souvent lors des épidémies qui sévissent dans le monde ou lors d’un voyage dans une zone contaminée ou suspecte.
La grossesse contre-indique formellement toute vaccination faisant appel à des virus vivants (même atténués).
1. En Europe :
1) Vaccins bactériens :
– Le plus ancien, le BCG, n’a aucune action tératogène ni abortive.
Cependant, en tant que vaccin vivant, cette vaccination est déconseillée pendant la grossesse.
Par ailleurs, en cas de contamination, le traitement spécifique ne pose pas de problèmes.
– Le vaccin antidiphtérique est assez réactogène, sur le plan local (érythème) et général, l’hyperthermie étant un risque important en cas de grossesse. Cependant la maladie étant grave, la vaccination peut être conseillée chez les personnes non vaccinées, et en présence d’une épidémie, cas exceptionnel.
– Le vaccin antitétanique, en revanche, est parfaitement supporté pendant la grossesse et ne comporte aucun risque, de même que la sérovaccination préventive en cas de blessure et si la dernière injection de vaccin remonte à plus de cinq ans. Il est même recommandé en cas de non vaccination antérieure, car il prévient le tétanos néonatal.
2) Vaccins polysaccharides :
– Le vaccin antithyphoïdique : Typhim Vi ® [Solution injectable IM ou SC : Seringue préremplie de 0,5 ml munie d’un bouchon-piston avec 2 aiguilles séparées, boîte unitaire].
Il est très efficace en une fois et très bien toléré.
Cependant les études chez la femme enceinte sont encore rares avec ce vaccin. Aussi, bien qu’aucun incident n’ait été rapporté, il convient toujours d’établir le rapport du risque éventuel du vaccin par rapport au risque réel de contracter une typhoïde avec ses conséquences.
– Le vaccin antipneumococcique a peu d’indication chez la femme enceinte.
– Il en est de même du vaccin anti-méningococcique. En outre, ce vaccin (sérogroupes A + C) ne protège pas contre le sérogroupe B, le plus fréquent en France. Toutefois, l’incidence du sérogroupe C augmente un peu en France, et la vaccination peut être utile en cas de contact avec un sujet atteint de méningite de sérogroupe C.
– Le vaccin antigrippal (contre l’Haemophilus influenzae) : il est efficace et bien toléré ; il est justifié car la grippe peut être particulièrement grave chez les femmes enceintes, augmentant le risque de complications pour la mère et le fœtus. On peut l’administrer quel que soit le trimestre de grossesse, mais idéalement pendant la saison grippale.
3) Vaccins viraux :
a) Virus inactivés ou tués :
– Le vaccin antipoliomyélite inactivé injectable est efficace et parfaitement toléré en cours de grossesse : Imovax Polio ® [solution injectable ; seringue préremplie de 0,5 ml].
– Le vaccin contre l’hépatite B ne pose aucun problème chez la femme enceinte. Il est d’ailleurs nettement préférable de vacciner avant la grossesse pour protéger le nouveau-né.
– La vaccin antirabique ne doit être effectué qu’en cas de suspicion de contamination, car la rage a une évolution gravissime. Cependant aucune réaction particulière n’a été remarquée chez les femmes enceintes ayant reçu le vaccin.
b) Virus vivants atténués :
Les vaccins fabriqués à partir des souches virales vivantes sont légalement interdits chez les femmes enceintes, par crainte de l’éventuelle survenue, même théorique, d’une malformation néonatale.
– Le vaccin antipoliomyélitique buccal, ou vaccin Sabin, est ainsi contre indiqué.
Cependant, une enquête sur cent millions de vaccinations, y compris les femmes enceintes, n’a révélé aucun accident.
– Le vaccin contre les oreillons pourrait provoquer une fausse couche spontanée du fait de la réaction thermique, et le virus a été retrouvé dans le placenta des femmes vaccinées. En outre, cette vaccination n’a aucune indication chez la femme adulte.
– Le vaccin antirubéole doit être effectué en dehors de toute grossesse, et toute grossesse doit être évitée dans les deux mois suivant l’injection. Toutefois une étude du C.D.C. d’Atlanta, portant sur 1500 femmes vaccinées entre la 9ème semaine avant la conception et la 15ème semaine après la conception n’a montré qu’une infection infraclinique chez 1,2 % des enfants (présence d’IgM spécifiques) et aucun symptôme n’est apparu après un suivi de 2 ans. Le risque de malformation congénitale observé est identique au risque habituel dû au hasard. Aussi, le corps médical ne considère-t-il plus cette situation comme une indication d’interruption médicale de grossesse.
– Le vaccin contre la varicelle est contre-indiqué chez la femme enceinte, tout en sachant qu’il est parfaitement toléré et efficace chez les sujets vaccinés. Les malformations dues à la varicelle sont rares mais graves (atrophie cérébrale et cérébelleuse, arriération mentale). Il est donc conseillé chez la jeune fille non immunisée et en contact possible avec des enfants atteints de varicelle.
– La vaccination contre la rougeole ne s’effectue pas chez l’adulte qui en principe, a déjà été vacciné dans l’enfance. Si le virus de la rougeole ne provoque pas de malformations fœtales, il peut néanmoins être responsable d’accouchement prématuré ou de mortalité fœtale. Le risque tératogène est inconnu concernant ce vaccin qui n’a aucune indication à l’âge adulte. Il en est de même pour le vaccin associé rougeole-oreillons-rubéole (ROR).
2. En pays d’endémie :
La femme enceinte qui voyage se trouve confrontée à d’autres maladies nécessitant une prévention comme le paludisme, mais aussi à certaines affections pour lesquelles il existe un vaccin, en particulier le choléra, l’hépatite A et la fièvre jaune.
1) Vaccins bactériens :
Le vaccin anticholérique, préparé à partir de vibrions tués n’est plus recommandé depuis 1974.
Toutefois, certains pays peuvent le recommander en cas d’épidémie, et il peut être effectué pendant la grossesse.
En fait, l’OMS considère que ce vaccin peu efficace doit avantageusement être remplacé par une hygiène rigoureuse.
2) Vaccins viraux :
– Le vaccin contre l’hépatite A est récent et les études ne sont pas encore suffisantes pour le recommander chez la femme enceinte, bien qu’aucun incident n’ait été rapporté dans ce cas.
– Le vaccin contre la fièvre jaune est le seul obligatoire pour les séjours en Afrique noire et dans la région de l’Amazonie.
Cette affection est suffisamment grave (hépatonéphrite aiguë) pour que la grossesse soit une contre-indication.
Cependant le risque théorique entraîne des avis différents selon les pays : contre-indication absolue en Allemagne, relative en France, et inexistante aux Pays-Bas. Mais aucun accident n’a été répertorié avec ce vaccin.
3. Organisation de la prise en charge vaccinale :
– Consultation préconceptionnelle : mise à jour du carnet vaccinal avant la grossesse.
– Consultation prénatale au premier trimestre : évaluation systématique du statut vaccinal.
– Communication : informer la patiente sur les avantages et la sécurité des vaccins recommandés.
– Traçabilité : enregistrement des vaccins administrés dans le dossier obstétrical.
4. Conclusion :
La vaccination pendant la grossesse est une mesure préventive essentielle pour prévenir les infections materno-fœtales et protéger le nouveau-né.
Certains vaccins sont tout à fait anodins au cours de la grossesse (vaccins inactivés), d’autres sont inutiles, ou sont interdits (vaccins vivants), et d’autres enfin ne doivent être pratiqués qu’en cas de risque (fièvre jaune).
Cependant une notion fondamentale doit toujours demeurer à l’esprit en ce domaine : une vaccination accidentelle en cours de grossesse n’est pas un motif d’interruption volontaire de grossesse, les risques étant théoriques et surtout exceptionnels.
Vaccins recommandés :
1. Vaccin contre la grippe saisonnière :
– Indication : toutes les femmes enceintes devraient recevoir un vaccin contre la grippe saisonnière, quel que soit le trimestre de grossesse, mais idéalement pendant la saison grippale.
– Justification : la grippe peut être particulièrement grave chez les femmes enceintes, augmentant le risque de complications pour la mère et le fœtus.
– Type de vaccin : Influenza inactivée (pas le vaccin vivant atténué).
2. Vaccin trivalent contre le tétanos, diphtérie et coqueluche (vaccin DTC) :
– Indication : toutes les femmes enceintes devraient recevoir ce vaccin lors de chaque grossesse, idéalement entre 27 et 36 SA.
– Justification : la coqueluche est une maladie grave chez les nouveau-nés et les nourrissons. La vaccination maternelle offre une protection cruciale pour le bébé jusqu’à ce qu’il puisse être vacciné lui-même.
3. Vaccin contre le COVID-19 :
– Indication : tous les trimestres de la grossesse, avec priorité pour les femmes présentant des comorbidités (obésité, diabète, hypertension).
– Justification : le COVID-19 peut être grave chez les femmes enceintes, et la vaccination est considérée comme sûre et efficace pour prévenir les formes sévères de la maladie.
– Modalités : vaccin à ARNm (Pfizer-BioNTech ou Moderna).
Vaccins sélectionnés au cas par cas :
1. Hépatite B :
Indication : toutes les femmes enceintes non vaccinées devraient recevoir un vaccin contre l’hépatite B, surtout celles non vaccinées et exposées à un risque accru d’infection.
Raisons : l’hépatite B peut être transmise de la mère à l’enfant pendant l’accouchement, et la vaccination est essentielle pour prévenir cette transmission.
2. Méningocoque :
Indication : risque épidémique ou antécédents d’exposition.
3. Hépatite A :
Indication : si le risque est élevé (voyages en zone endémique).
Vaccins contre-indiqués :
Ces vaccins contenant des virus vivants atténués sont contre-indiqués en raison du risque potentiel pour le fœtus :
1. ROR (rougeole, oreillons, rubéole) : administrer avant la conception si possible.
2. Varicelle : vaccination préconceptionnelle recommandée.
3. Fièvre jaune : déconseillé sauf en cas de risque majeur d’exposition.
Cas particulier de l’hépatite B :
L’hépatite B est une infection virale qui peut être grave, surtout si elle devient chronique.
# Vaccination contre l’hépatite B pendant la grossesse :
1. Sécurité et efficacité : le vaccin contre l’hépatite B est considéré comme sûr et efficace pendant la grossesse.
Il est recommandé aux femmes enceintes qui n’ont pas été vaccinées précédemment et qui sont à risque d’infection par le virus de l’hépatite B (HBV).
2. Administration : le vaccin est généralement administré en trois doses, souvent à partir de 28 SA.
Cependant, l’objectif principal est de protéger la mère et, indirectement, le fœtus, bien que les anticorps ne soient pas bien transmis au fœtus.
3. Transmission mère-enfant : la principale préoccupation est la transmission du virus de l’hépatite B de la mère à l’enfant pendant l’accouchement. Pour prévenir cela, les nouveau-nés de mères Ag HBs positives doivent recevoir une dose de vaccin contre l’hépatite B et de l’immunoglobuline contre l’hépatite B (HBIG) dans les 12 premières heures de vie.
4. Recommandations : toutes les femmes enceintes doivent être dépistées pour l’hépatite B.
Si elles sont positives pour l’antigène Ag HBs, des mesures supplémentaires comme l’antiviral tenofovir peuvent être recommandées à partir de la 28ème semaine pour réduire le risque de transmission au fœtus.
En résumé : la prévention de la transmission mère-enfant est cruciale, et les nouveau-nés de mères infectées doivent être protégés dès la naissance.

