1. Traitement préventif :
Les facteurs épidémiologiques du cancer de l’endomètre étant connus, quelques mesures préventives peuvent être proposées.
– Traitement progestatif systématique en cas :
. d’hyperplasie ou de polype de l’endomètre,
. de dysovulation avec insuffisance lutéale (cycles irréguliers, spanioménorrhées…).
– Traitement estroprogestatif substitutif (dysgénésie gonadique et surtout ménopause précoce).
– Traitement précoce et suivi des ovaires polykystiques pour éviter les longues périodes d’hyperestrogénie.
– Abandon des pilules séquentielles utilisées au long cours.
2. Traitement curatif :
Le traitement du cancer de l’endomètre repose principalement sur l’association de la chirurgie et de la radiothérapie.
1) Méthodes :
a) Chirurgie :
C’est la base du traitement.
● Opérabilité :
– l’estimation de l’état général est essentielle, et ce d’autant qu’il s’agit souvent de patientes âgées, obèses ou diabétiques,
– cependant, la plupart des patientes peuvent être opérées malgré l’âge, les limites de l’opérabilité étant reculées par les progrès de l’anesthésie (anesthésie locorégionale).
● Exploration peropératoire :
Pratiquée de façon systématique, elle est toujours précédée par la réalisation d’une cytologie péritonéale :
– l’abdomen est exploré à la recherche de métastases hépatiques, péritonéales ou ganglionnaires (adénopathies lombo-aortiques et iliaques externes),
– toute lésion suspecte est biopsiée pour examen histologique.
● Techniques chirurgicales :
Elles comportent toujours au minimum une hystérectomie totale avec annexectomie.
– Hystérectomie totale avec ovariectomie bilatérale, par voie abdominale, cœlioscopique ou mixte (hystérectomie vaginale cœlio-préparée).
– Colpohystérectomie élargie avec lymphadénectomie, type Wertheim, associant hystérectomie non conservatrice, lymphadénectomie retirant les ganglions iliaques primitifs, iliaques externes, rétro-cruraux, obturateurs, hypogastriques, et colpectomie retirant une collerette vaginale d’environ 3 cm. Il s’agit d’une intervention dont la morbidité n’est pas négligeable.
– Hystérectomie avec prélèvement sous-veineux, le curage étant alors limité aux premiers relais ganglionnaires (la lymphadénectomie pouvant être cœlio-chirurgicale).
– Hystérectomie vaginale, présentant un intérêt certain chez les grandes obèses ou les patientes récusées pour une laparotomie (l’intervention étant plus courte et moins hémorragique). Cependant, l’exploration complète de la cavité abdominale est alors impossible et les prélèvements ganglionnaires beaucoup plus difficiles.
– Omentectomie (pour les carcinomes papillo-séreux).
– Pelvectomie.
b) Radiothérapie :
Le plus souvent, elle est complémentaire de la chirurgie mais elle peut être exclusive pour les malades inopérables.
● La curiethérapie :
– permet de réduire le taux de récidives locales,
– il s’agit d’une curiethérapie vaginale réalisée en post-opératoire,
– la dose prescrite est variable : si elle est associée à une irradiation externe : 20 à 30 Gy ; si elle est associée à la chirurgie seule : 50 Gy.
● La radiothérapie externe :
– on délivre 40 à 50 Gy dans l’association radio-chirurgicale et 70 Gy en cas de radiothérapie exclusive,
– pour les patientes inopérables, la radiothérapie transcutanée précède la curiethérapie dont elle facilite l’action en réduisant le volume tumoral,
– pour les patientes opérables, elle complétera la curiethérapie en irradiant les métastases ganglionnaires.
● Les complications :
– cystites radiques (post-curiethérapie) : 3 %,
– rectites radiques (post-radiothérapie externe) : 1 %,
– plus rarement, sigmoïdites, iléites, ostéoradionécroses, dyspareunie.
c) Traitements médicaux :
Il s’agit du traitement palliatif.
Dans les cancers avancés, récidivants ou métastasés : chimiothérapie (F. indifférenciées) ou hormonothérapie (F. différenciées).
● Hormonothérapie : on peut utiliser :
– les progestatifs de synthèse à forte dose : MPA (acétate de médroxyprogestérone),
– les antiestrogènes : tamoxifène, utilisé seul ou en association avec les progestatifs à forte dose à titre palliatif dans les formes évoluées.
L’action est d’autant plus remarquable que le type histologique est plus orthoplasique.
● Chimiothérapie : utilisée dans les formes graves, indifférenciées, Grade III, avec envahissement myométrial, atteinte ganglionnaire, annexielle.
Plusieurs protocoles peuvent être utilisés : FAC, cisplatine, 5-fluoro-uracile.
Les doses et la durée du traitement doivent tenir compte du terrain particulier de ces patientes.
Certains protocoles associent hormono et chimiothérapie.
2) Indications :
Dans tous les cas, les indications dépendent du stade évolutif du cancer et de l’état général de la patiente, mais la chirurgie reste la base du traitement.
L’attitude “classique” peut se résumer de la façon suivante :
STADE I | RISQUE BAS – IA, type 1, G1 ou 2 | – Hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale. – Pas de traitement complémentaire sauf une curiethérapie vaginale en cas d’envahissement myométrial. |
RISQUE INTERMEDIAIRE – IB, type 1, G1 ou 2 | – Hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale. ± Lymphadénectomie pelvienne si IB grade 2 ou envahissement myométrial. – Curiethérapie vaginale post-opératoire. | |
RISQUE ELEVE | – Hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale et lymphadénectomie lombo-aortique. – Radiothérapie externe pelvienne post-opératoire. ± curiethérapie vaginale post-opératoire. Pour les types 2, on ajoutera : lymphadénectomie pelvienne, omentectomie infracolique, cytologie et biopsies péritonéales ± chimiothérapie adjuvante. | |
STADE II | TYPE 1 | – Hystérectomie totale ± élargie avec annexectomie bilatérale. – Lymphadénectomie pelvienne ± lombo-aortique si N+ en pelvien. – Radiothérapie externe pelvienne post-opératoire. – Curiethérapie vaginale post-opératoire. |
TYPE 2 | A ce qui est recommandé pour les types 1, on ajoutera : | |
STADE III | IIIA | – Hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale. – Lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique. – Omentectomie infracolique et cytologie péritonéale. – Radiothérapie externe pelvienne post-opératoire. ± curiethérapie post-opératoire (atteinte cervicale). ± chimiothérapie adjuvante séquentielle (atteinte annexielle). |
IIIB | – Radiothérapie exclusive : radiothérapie externe pelvienne et curiethérapie vaginale post-pératoire. ± lymphadénectomie lombo-aortique initiale. ± chimiothérapie concomitante de la radiothérapie. ± chirurgie de clôture. | |
IIIC | – Hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale. – Lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique. – Radiothérapie externe post-opératoire. – Curiethérapie post-opératoire. ± chimiothérapie adjuvante séquentielle. | |
STADE IV | IVA | – Radiothérapie exclusive : radiothérapie externe et curiethérapie. ± chimiothérapie concomitante. – Chirurgie (exentération pelvienne) si échec de la radiothérapie. |
IVB | – Chirurgie de cytoréduction complète si carcinose péritonéale réséquable sans métastase à distance. – Chimiothérapie concomitante. – Hormonothérapie si récepteurs hormonaux positifs. – Radiothérapie externe sur la tumeur primitive. |
Au total (résumé) :
a) Stade I :
● Patientes opérables (absence de contre-indication à une anesthésie générale, utérus mobile ; pas de métastase) :
* Hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale.
Une lymphadénectomie (évidement iliaque externe bilatéral) est associé, SAUF si la patiente est âgée ou obèse.
* Six semaines plus tard : radiothérapie :
– Une curiethérapie vaginale : elle pourra être évitée si la lésion n’infiltre pas le myomètre et est bien différenciée.
– Une irradiation pelvienne à 50 Gy post-op est pratiquée en cas :
. d’atteinte myométriale supérieure à la moitié,
. ” ” annexielle, ganglionnaire pelvienne,
. si extension à l’isthme ou au col utérin,
. si une lymphadénectomie pelvienne n’a pas été pratiquée.
Nb : Si utérus très volumineux : une irradiation pré-op pelvienne sera pratiquée.
● Patientes à opérabilité limitée : hystérectomie simple ou hystérectomie vaginale complétée par une curiethérapie vaginale ;
● Patientes inopérables : traitement radiothérapique exclusif (curiethérapie + radiothérapie pelvienne externe).
Nb : De nombreuses équipes proposent la radiothérapie externe de principe pour les stades I de mauvais pronostic (envahissement myométrial supérieur à 50 %, grade histologique 3).
b) Stade II :
Traitement idem à celui du cancer du col : L.C.H.E et une radiothérapie pelvienne externe complémentaire.
Là encore, si inopérable : radiothérapie exclusive.
c) Stade III (ou contre-indication à une anesthésie) :
Irradiation pelvienne (radiothérapie et curiethérapie).
d) Stade IV :
Il est difficile de donner des directives générales, et le traitement sera discuté cas par cas.
Il associe en général une irradiation pelvienne à une chimiothérapie et/ou une hormonothérapie.
Les indications de pelvectomies sont rares chez ces patientes où les risques de métastases à distance sont particulièrement élevés.
3. Surveillance post-thérapeutique :
La surveillance post-thérapeutique doit être programmée de façon stéréotypée ; elle repose sur l’examen clinique :
– la recherche de signes fonctionnels (métrorragies),
– la palpation des aires ganglionnaires,
– la palpation des seins (même terrain),
– la palpation abdominale (hépatomégalie),
– un examen gynécologique complet avec examen de la totalité du vagin, ainsi que les touchers pelviens (TV et TR).
Il n’y a pas d’indication pour des examens d’imagerie, de biologie ou des frottis du fond vaginal systématiques.
(Classiquement une surveillance cytologique du fond vaginal était réalisée par frottis sur la cicatrice tous les ans pendant au moins trois ans).
La fréquence du suivi dépend du stade FIGO : tous les 6 mois les 3 premières années (stade I et II), ou les 5 premières années (stade III), puis tous les ans ensuite.
Cette surveillance sera instaurée afin d’évaluer la possibilité d’une récidive vaginale, la souplesse du pelvis et des paramètres ou d’une métastase à distance.
4. Traitement des récidives :
– Récidive vaginale nodulaire au tiers inférieur : curiethérapie interstitielle par iridium.
– Infiltration du moignon vaginal : discuter une reprise chirurgicale. Si elle n’est pas possible : radiothérapie pelvienne, suivie d’une curiethérapie.
– Infiltration de l’espace cellulo-pelvien : radiothérapie pelvienne.
Les traitements complémentaires sont à discuter dans certaines récidives en fonction de l’étendue des lésions, de l’état général et de l’âge de la patiente. Le choix entre hormonothérapie (progestatif) et/ou chimiothérapie est fonction du degré de différenciation tumorale et de la présence ou non de récepteurs hormonaux.
Nb : En cas de métastases : l’hormonothérapie voire la chimiothérapie sont proposées à titre palliatif.
5. Conclusion :
Le pronostic favorable des stades précoces rend compte de la nécessité d’évoquer le cancer de l’endomètre devant toute métrorragie post-ménopausique.
La base du traitement est chirurgicale.
Le pronostic est classiquement bon, tout au moins pour les stades I qui représentent la grande majorité des cas.
Le problème est d’individualiser les formes de mauvais pronostic, afin de les traiter de façon adaptée, et surtout de ne pas surtraiter les autres.