1. Effets secondaires dermatologiques des contraceptifs oraux :

1) Effets secondaires liés à l’action hormonale :

a) Mélasma ou chloasma :

Cette hyperpigmentation mélanique du visage constitue l’un des effets secondaires les plus fréquents lié à l’utilisation des estroprogestatifs (EP). Son délai d’apparition varie entre 1 mois et 3 ans après le début de la prise de l’EP.

Le phototype ne constitue pas un facteur favorisant la survenue d’un mélasma, mais influence l’intensité de la pigmentation, plus marquée chez les femmes brunes.

Le mélasma se manifeste par une hyperpigmentation de type mélanique, marron-brun, en taches ou en nappes irrégulières aux contours déchiquetés. La topographie est caractéristique : front, tempes, pommettes.

Les lésions sont bilatérales et grossièrement symétriques. L’atteinte de la lèvre supérieure est également classique.

L’exposition solaire constitue le facteur déclenchant principal, facteur d’aggravation et d’extension des lésions. Il faudra donc, parallèlement aux mesures de photoprotection à mettre en œuvre impérativement, éviter la prise de médicaments photosensibilisants.

Au plan pathogénique, les œstrogènes comme les progestatifs peuvent stimuler l’activité du mélanocyte, par des mécanismes encore inconnus qui ne semblent pas reposer sur une stimulation de la sécrétion de MSH (“melanocyte stimulating hormone”).

L’arrêt du contraceptif, ou le passage à un EP moins dosé, joints à une photoprotection stricte et constante par écran total d’indice élevé, permettent parfois de faire régresser, voire de faire disparaître le mélasma.

Cette régression est souvent lente et incomplète.

Les topiques dépigmentants ne sont pas d’une efficacité constante et peuvent être source de dépigmentations en confetti.

b) Acné – Séborrhée :

La séborrhée du cuir chevelu est une conséquence d’une sécrétion importante de sébum au niveau du cuir chevelu.

Les glandes sébacées sont sous l’influence, entre autres des androgènes.

Un certain nombre de progestatifs peuvent faire augmenter la sécrétion de sébum par leurs effets secondaires androgéniques et qui seront responsables d’un début ou d’une aggravation de la séborrhée ou de l’acné.

Pour prévenir cette plainte, on peut prescrire une pilule contenant un progestatif sans effets secondaires androgéniques comme le désogestrel (ou le gestodène).

En cas d’acné sévère, il faudra d’abord faire appel à l’activité anti-androgène puissante de l’acétate de cyprotérone administrée à des doses suffisamment élevées. Une fois qu’un résultat satisfaisant est obtenu, on peut passer à une préparation combinée contenant du désogestrel (Mercilon ®, Varnoline ®).

c) Alopécie :

– Une alopécie diffuse, à type d’effluvium télogène, s’observe parfois au décours d’une prise prolongée d’EP.

Cet effluvium rappelle celui classiquement observé en post-partum.

Pendant la grossesse, l’inflation estrogénique entraîne une stimulation de la croissance capillaire, de nombreux follicules étant en phase anagène. La chute brutale du taux des œstrogènes entraîne une conversion télogène synchrone des follicules.

Cet effet secondaire est cependant très rarement observé au décours d’une prise d’EP.

– De même, des alopécies de type androgénique ont été exceptionnellement rapportées chez des patients recevant des pilules dont le progestatif présentait une forte action androgénique. Il peut être justifié, dans ces cas, d’effectuer un bilan endocrinien au décours de l’arrêt du contraceptif, afin de dépister un hyperandrogénisme de sécrétion et/ou périphérique. Le traitement fait appel à l’acétate de cyprotérone (9 cycles). 

d) Lésions vasculaires :

Les œstrogènes sont responsables de modifications des parois vasculaires : épaississement de l’intima, prolifération de la média, hyperplasie endothéliale.

Les modifications vasculaires suivantes peuvent être observées : télangiectasies, angiomes stellaires. 

2) Effets secondaires non liés à une action hormonale :

a) Réactions d’hypersensibilité :

Elles sont rares, sinon exceptionnelles.

Des manifestations à type d’urticaire, d’œdème de Quincke, de prurit vulvaire ont été rapportées.

La positivité des tests intradermiques a permis de retenir l’imputabilité de l’éthinylestradiol ou des norstéroïdes dans certaines observations.

La survenue d’érythème noueux au cours de la prise d’EP est classique mais relativement rare, le délai d’apparition étant variable, allant d’une semaine à plusieurs mois. De nombreux arguments mettent en avant le rôle préférentiel des œstrogènes dans le déterminisme de ces hypodermites aiguës. 

b) Prurit – ictère :

Une cholestase, se manifestant par un prurit féroce parfois accompagné d’un ictère, peut compliquer exceptionnellement une prise d’EP. Ce tableau est à rapprocher de la cholestase gravidique.

Il est donc déconseillé de prescrire des EP chez des patientes présentant un antécédent de cholestase gravidique. 

c) Photosensibilisation :

Des réactions de photosensibilisation ont exceptionnellement été rapportées sous EP.

La recherche de signes en faveur d’un lupus érythémateux sera systématique dans ces cas.

2. Influence des EP sur l’évolution de certaines dermatoses :

1) Herpes gestationis :

L’herpes gestationis est une dermatose bulleuse auto-immune sous-épidermique, survenant généralement au cours du 2ème trimestre de la grossesse ou dans le post-partum. Des récidives ont été rapportées sous EP.

L’antécédent d’herpes gestationis contre-indique l’emploi d’estrogène mais pas les progestatifs macrodosés. 

2) Porphyries :

La responsabilité des œstrogènes dans la survenue des poussées de porphyrie, quelle qu’en soit le type, est une notion bien établie et ces molécules sont formellement contre-indiquées chez ces patientes. 

3) Lupus érythémateux :

L’imputabilité des œstrogènes dans l’aggravation et l’évolutivité de la maladie lupique est attestée par de nombreuses données tant cliniques qu’expérimentales : prévalence de l’affection chez la femme en période d’activité génitale, exacerbation au cours de la grossesse, déclenchement de lupus chez la souris NZB/NZW par les œstrogènes.

Le rôle aggravant des œstrogènes sur la néphropathie lupique a été démontré.

Toutes les pilules estroprogestatives sont donc formellement contre-indiquées chez la patiente lupique.

Les macroprogestatifs n’ont à l’inverse aucune influence sur l’évolution d’ensemble de l’affection et constituent le mode de contraception retenu chez ces patientes.

Rappelons enfin le risque infectieux lié à la mise en place d’un DIU chez des patientes recevant fréquemment des immunosuppresseurs.

4) Mélanome :

Certains arguments laissent entrevoir l’hypothèse d’une hormonodépendance de cette tumeur mélanocytaire maligne : mise en évidence de récepteurs aux œstrogènes au sein des cellules tumorales, forte prévalence chez la femme en période d’activité génitale. La grossesse, cependant, ne semble pas influer de manière significative l’évolution du mélanome, en terme de survie à 5 ans, mais l’analyse de la littérature concernant le rôle des EP sur l’évolution du mélanome se heurte à d’importants biais méthodologiques, ne permettant pas de conclure de manière formelle.

Il semble cependant préférable de conseiller une méthode contraceptive non hormonale chez des patientes ayant un antécédent de mélanome de mauvais pronostic.

Rappel

Toutes les connectivites (porphyrie, lupus érythémateux disséminé, otosclérose, périartérite noueuse, sclérodermie, dermatomyosite), sont des contre-indications absolues à la pilule EP.

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