IRM et endométriose : l’IRM apparaît aujourd’hui comme l’examen essentiel au diagnostic et au bilan préthérapeutique de l’endométriose, ainsi que pour la surveillance des traitements médicaux et chirurgicaux.
Cependant, la connaissance de la technique de réalisation de l’IRM, ainsi que des particularités des lésions par localisations, est fondamentale pour aboutir à un diagnostic adéquat et précis.
L’amélioration des techniques d’imagerie, comme l’échographie et l’IRM, permettent le plus souvent de préciser les localisations et l’extension des lésions d’endométriose, et ce de façon moins invasive que la cœlioscopie.
L’IRM est l’examen de choix pour le diagnostic non invasif de l’endométriose sous-péritonéale. Néanmoins, cet examen est encore aujourd’hui sous-utilisé dans cette indication.
L’IRM permet également de détecter facilement les lésions ovariennes ou l’adénomyose.
Technique :
La technique utilisée doit être rigoureuse, car les lésions peuvent être de petite taille et de diagnostic difficile. En pratique, il faut réaliser des séquences pondérées en T2 dans les trois plans de l’espace, un plan pondéré en T1 et T1 en écho de spin avec suppression de graisse (plan axial habituellement). L’épaisseur des coupes est de 5 mm, avec un espacement de 0,5 mm.
La vessie doit être idéalement en semi-réplétion, afin d’obtenir une antéversion moyenne de l’utérus.
Il n’est pas nécessaire d’utiliser des produits d’opacification digestive.
L’injection de gadolinium n’est pas nécessaire, sauf en cas de suspicion d’endométriose vésicale, où elle permet de sensibiliser le diagnostic.
Pour l’étude fine des ligaments utérosacrés, il est possible d’obtenir un plan de coupe supplémentaire, oblique, le long du trajet des ligaments utérosacrés, c’est-à-dire incliné de 35° en bas et en avant par rapport au col, avec une épaisseur des coupes réduite (4 mm/0,4 mm).
Enfin, des séquences avec antenne endocavitaire (endorectale pour l’analyse de la cloison rectale ou vaginale pour l’analyse du cul-de-sac vésico-utérin) peuvent être réalisées pour une étude fine de l’atteinte des ligaments utérosacrés ou de la cloison rectovaginale.
L’IRM peut être réalisée à tout moment du cycle, mais la détection des lésions est parfois plus aisée si l’examen est réalisé en période menstruelle.
1. Endométriomes (kystes endométriosiques) :
Les endométriomes sont le plus souvent hyperintenses en T1 et en T2, l’hyperintensité étant plus nette sur les séquences en T1 avec suppression de graisse. Cet aspect est le plus fréquent.
Il est possible également que l’endométriome apparaisse hypo-intense en séquence pondérée en T2 en raison de la présence d’hémosidérine.
Comme en échographie, des caillots peuvent être visibles au sein du kyste endométriosique, habituellement en signal intermédiaire en T1 et en T2.
Les lésions peuvent être bilatérales ou multiples dans un même ovaire ; dans ce cas, la coexistence de kystes contenant du sang d’âge différent, avec un aspect variable du signal, est très évocatrice du diagnostic.
Lorsque les implants sont de très petite taille (1 cm), il peut être difficile de différencier un kyste endométriosique d’un kyste fonctionnel du corps jaune.
Le diagnostic différentiel avec un kyste dermoïde est facile lorsque l’hyperintensité en séquence pondérée en T1 persiste sur les séquences réalisées avec suppression de graisse.
2. Adénomyose :
L’IRM, en revanche, est une technique fiable dans le diagnostic de l’adénomyose.
1) Adénomyose :
Elle se traduit en IRM par :
– une augmentation globale du volume utérin ;
– un épaississement diffus ou localisé de la zone jonctionnelle, situé à l’interface entre l’endomètre et le myomètre, de plus de 9 mm (adénomyose diffuse) ;
– des lésions nodulaires hyperintenses en T1 et en T2 à l’interface endomètre-myomètre, qui correspondent aux cryptes glandulaires endométriosiques à contenu hématique, conférant un aspect moucheté au myomètre (adénomyose focale).
Les résultats de la littérature sont controversés. En effet, des études comparatives récentes ont établi que l’IRM était plus sensible et plus spécifique que l’échographie pour caractériser l’adénomyose. D’autres auteurs ne retrouvent pas de différence significative entre l’échographie endovaginale et l’IRM pour la détection de l’adénomyose, lorsqu’il n’y a pas de fibromes associés. En revanche, la sensibilité de l’échographie par rapport à l’IRM serait réduite lorsque les lésions d’adénomyose sont associées à une atteinte fibromateuse du myomètre.
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► Quelle est l’indication de l’IRM dans la reconnaissance d’une adénomyose profonde ?
Les indications de l’IRM résultent des insuffisances du diagnostic échographique : elle est indiquée surtout en cas d’anomalies associées, endométriales ou plutôt myométriales, l’existence de myomes pouvant gêner l’appréciation fine du myomètre non myomateux. Cela est susceptible d’orienter à tort vers une chirurgie conservatrice de myomes. De même, l’endométrectomie pour métrorragies fonctionnelles voit son taux de réussite diminuer en cas d’adénomyose profonde associée.
Les signes IRM de l’adénomyose sont pour une part identiques à ceux de l’échographie, mais signalons que les spots d’hypersignal en T2 du myomètre révélant l’existence de kystes intra-myométriaux sont faciles à voir, contrastant nettement avec le reste du myomètre.
L’IRM permet, de plus, une étude multiplan de la totalité du myomètre :
– La dysmorphie utérine est également appréhendée, l’endomètre offrant un contraste marqué avec le myomètre, ce qui n’est pas toujours le cas en échographie. L’étude multiplan facilite les mesures ;
– La force de l’IRM est de mettre en évidence, au milieu de myomes même volumineux ou juxtaposés, des spots correspondant aux kystes myométriaux et d’affirmer ainsi la coexistence de deux pathologies pouvant rendre aléatoire une chirurgie conservatrice ;
– Rappelons que l’IRM permet une étude associée des annexes, du reste du contenu de la cavité pelvienne et en particulier du péritoine (dans l’hypothèse d’une endométriose associée) ;
– La particularité sémiologique de l’IRM dans le diagnostic d’adénomyose est la mise en évidence d’un épaississement de la zone jonctionnelle (ou tiers interne du myomètre) localisé ou diffus, témoignant de la prolifération des fibres musculaires lisses, alors que cela n’est pas possible en échographie.
2) Adénomyome :
Il s’agit d’une forme particulière, correspondant à une lésion circonscrite au sein du myomètre, habituellement hétérogène, et ponctuée d’hypersignaux hémorragiques. Cette lésion peut être difficile à distinguer d’un fibrome interstitiel ou même d’un sarcome utérin.
3. Atteinte externe sous-péritonéale (endométriose profonde) :
1) Atteinte postérieure (Douglas, ligaments utérosacrés et cloison rectovaginale) :
L’IRM, par la multiplicité des plans de coupes et son excellente résolution tissulaire, est un examen clé pour le diagnostic de ces lésions sous-péritonéales. Néanmoins, l’analyse des clichés est difficile car les lésions sont le plus souvent anciennes et de petite taille. Les séquences pondérées en T1 avec suppression de graisse peuvent donc être insuffisantes dans ce cas.
L’atteinte des ligaments utérosacrés peut être révélée indirectement par une rétroversion utérine.
Les implants des ligaments utérosacrés se situent habituellement à leur insertion proximale, en arrière du torus utérin. Les ligaments utérosacrés normaux sont peu ou non visibles en IRM. Il est néanmoins possible de les suivre lorsqu’un épanchement liquidien ou du tissu adipeux prédominent dans le cul-de-sac de Douglas.
La lésion peut être directement visible sous la forme d’un épaississement nodulaire de l’origine du ligament utérosacré, supérieur à 9 mm. Des séquences avec coupes fines acquises dans le plan des ligaments utérosacrés peuvent optimiser la détection des lésions des ligaments utérosacrés.
Il est important de signaler que les atteintes des ligaments utérosacrés sont souvent méconnues, du fait du caractère fréquemment hypo-intense des lésions, lié en partie à la présence de fibrose. En effet, diagnostiquées tardivement, ces lésions ne contiennent plus de cryptes hémorragiques mais du tissu fibreux, responsable d’un piégeage de filets nerveux et donc de douleurs postérieures intenses. C’est pourquoi, il faut non seulement chercher des hypersignaux hémorragiques dans cette localisation, mais parfois aussi un simple épaississement linéaire hypo- intense du ligament utérosacré en séquences pondérées en T1 et en T2.
L’infiltration du cul-de-sac de Douglas et de la cloison rectovaginale peut se manifester par un comblement tissulaire en arrière du col, jusqu’au rectum. Cette lésion est parfois responsable d’une rétroversion utérine.
Les nodules de la cloison rectovaginale sont le plus souvent iso- ou hypo-intenses en séquences pondérées en T1 et en T2, ponctués d’hypersignaux hémorragiques.
L’atteinte de la cloison rectovaginale est plus facilement visible sur les coupes sagittales et parfois sur les coupes axiales. Comme pour l’atteinte des ligaments utérosacrés, l’absence d’hypersignaux hémorragiques peut rendre difficile la détection des nodules. Il est fréquent dans cette indication d’observer des adhérences associées aux nodules. Elles sont visibles sous la forme de fines lignes hypo-intenses en séquences pondérées en T1 et en T2, en arrière du col et au contact de la paroi rectale, avec des images de rétraction de la graisse pararectale, particulièrement bien visibles en séquences pondérées en T1.
Il faut pouvoir préciser le degré d’infiltration de la paroi rectale, qui détermine ensuite le type de traitement chirurgical. L’infiltration est supposée en IRM lorsque la ligne hypo-intense de la séreuse n’est plus visible, mais englobée dans la lésion endométriosique. En effet, lorsque la musculeuse rectale est envahie, seule la résection rectale peut empêcher la survenue de récidives.
En cas de doute (sur le degré d’infiltration) ou d’incertitude, l’échoendoscopie rectale peut également permettre de préciser l’extension des lésions. L’échographie endovaginale peut parfois détecter un épaississement nodulaire en arrière du col, mais ne permet pas de préciser le caractère infiltrant des lésions.
Les autres lésions digestives sont le plus souvent localisées sur la partie haute du rectum et le sigmoïde. Plus rarement, des lésions peuvent être détectées sur l’appendice, le cæcum ou l’iléon.
L’IRM permet parfois de détecter les lésions sigmoïdiennes, mais est limitée dans les autres localisations digestives.
2) Atteinte urinaire :
L’IRM est un bon examen pour le dépistage et le bilan des lésions d’endométriose vésicale.
La lésion se traduit par un nodule hétérogène, comportant de petits foyers hyperintenses en T1 et en T2, dans le cul-de-sac vésico-utérin ou la profondeur de la paroi vésicale.
L’infiltration de la paroi vésicale est affirmée lorsque l’hyposignal physiologique de la musculeuse vésicale est interrompu.
La détection de l’infiltration de la paroi vésicale peut être sensibilisée par l’injection de gadolinium. Dans ce cas, le traitement est la cystectomie partielle.
L’IRM peut permettre en outre de rechercher des lésions associées, ovariennes et surtout postérieures, dans le cadre d’un bilan préchirurgical.
Des lésions d’endométriose peuvent être localisées en arrière du col ou du torus utérin et s’étendre latéralement au contact de l’abouchement des uretères. Dans ce cas, elles peuvent être responsables d’obstruction urétérale et d’une hydronéphrose chronique.
4. Endométriose péritonéale :
Les implants endométriosiques péritonéaux sont souvent de petite taille, infracentimétriques, difficiles à détecter par l’IRM.
C’est la cœlioscopie qui reste le meilleur examen diagnostique de ces lésions.
L’IRM peut cependant parfois détecter des hypersignaux en T1 et T1 avec suppression de graisse, en particulier sur les replis péritonéaux, proches des culs-de-sac. La détection de ces lésions est variable, pouvant aller jusqu’à 60 % selon les auteurs.
5. Endométriose sur cicatrice :
L’endométriose sur cicatrice n’est pas exceptionnelle. Il faut distinguer deux formes d’endométriose sur cicatrice : l’endométriose sur cicatrice utérine ou l’endométriose sur cicatrice abdominale.
Toute chirurgie utérine peut être le vecteur d’endométriose sur cicatrice.
– Le diagnostic d’endométriose sur cicatrice utérine est difficile et il faut y penser lorsqu’une patiente présentant un antécédent de chirurgie utérine décrit des douleurs pelviennes à recrudescence menstruelle, alors que l’échographie est normale.
– En cas d’endométriose sur cicatrice abdominale, il est possible de palper un nodule douloureux, parfois inflammatoire, dans le territoire sous-cutané, en regard de la cicatrice abdominale. La tomodensitométrie ou l’échographie peuvent mettre en évidence un nodule sous-cutané en regard de la cicatrice, mais c’est surtout l’IRM qui peut permettre de détecter un nodule iso- ou hypo-intense en T1 et en T2 ponctué de foyers hyperintenses en T1et en T2, au niveau de la cicatrice utérine ou de la cicatrice abdominale. Le diagnostic peut être également évoqué par la ponction à l’aiguille fine du nodule, en présence de cellules endométriales. Le traitement est chirurgical.
6. Localisations exceptionnelles :
Certaines atteintes exceptionnelles de l’endométriose ont été décrites. Parmi celles-ci, une des plus fréquentes est la localisation sur le trajet du nerf sciatique d’un nodule endométriosique, responsable de sciatique à recrudescence menstruelle. L’IRM pelvienne peut détecter un nodule contenant des hypersignaux hémorragiques, sur le trajet du nerf sciatique.
L’atteinte pulmonaire et diaphragmatique est exceptionnelle et se manifeste par des hémoptysies ou des pneumothorax à recrudescence menstruelle. L’imagerie est habituellement décevante et le diagnostic est affirmé si les lésions sont retrouvées lors de la thoracoscopie.
Enfin, quelques cas d’endométriose cérébrale ont été diagnostiqués chez des patientes se plaignant de céphalées et de crises convulsives à recrudescence menstruelle.
La tomodensitométrie ou l’IRM peuvent montrer des lésions nodulaires cérébrales, non spécifiques, mais le diagnostic reste histologique.
7. Conclusion : IRM et endométriose
Le diagnostic d’endométriose ovarienne est aisé et l’échographie est généralement suffisante au diagnostic.
Dans ce cas, l’IRM est intéressante pour les formes douteuses, ou encore pour rechercher des lésions postérieures pelviennes associées.
L’hystérographie reste le seul examen diagnostique non chirurgical des lésions tubaires.
Le diagnostic d’adénomyose par l’échographie peut être difficile, surtout lorsque l’utérus est fibromateux ; l’IRM est alors le meilleur examen diagnostique non invasif.
Le diagnostic des atteintes postérieures du pelvis est impossible à préciser par l’échographie ; l’IRM complétée éventuellement par une échoendoscopie rectale doit alors être proposée.
Enfin, l’IRM est le meilleur examen d’imagerie dans le cadre d’un bilan complet, préchirurgical ou préthérapeutique, de l’endométriose profonde.