1. Définition :
La MIU se définit comme l’arrêt de toute activité cardiaque du fœtus après 28 SA révolues (180 jours de vie IU).
On élimine de cette définition les morts intra-partum (pendant le travail) et les morts néonatales précoces.
Cette complication obstétricale survient dans 3 circonstances :
– les morts dites “prévisibles” sur des GHR (toxémie, diabète),
– les morts dites “accidentelles” (infections fœtales anténatales, malformations),
– les morts totalement inexpliquées, où il faut rechercher l’étiologie.
La MIU représente souvent un drame mal vécu, parfois incompréhensible.
Sa part est importante dans la mortalité périnatale : 4,1 %. des naissances.
Le diagnostic positif repose sur l’échographie.
Le diagnostic étiologique est tantôt évident (HTA, RCIU sévère, allo-immunisation Rh), tantôt très difficile.
2. Etiologies :
1) Causes maternelles :
– Hypertension artérielle (cause la plus fréquente) : le décès se fait soit par la prééclampsie et ses complications (HRP, éclampsie, Hellp syndrome), soit de façon insidieuse au terme d’une SFC avec RCIU sévère,
– pathologies hépatiques : cholestase gravidique, Hellp syndrome, stéatose hépatique aigue gravidique,
– diabète : surtout le diabète insulino-dépendant mal équilibré (cause devenue rare en raison de la prise en charge des femmes diabétiques),
– alloimmunisations : leur fréquence diminue en raison de la prophylaxie systématique ; les décès dus à des immunisations sévères peuvent souvent être évités grâce à la surveillance des anticorps dans le sang maternel,
– anoxies : cardiopathies sévères, anémies,
– lupus érythémateux aigu gravidique,
– pathologies thyroïdiennes : principalement la maladie de Basedow avec un taux d’anticorps élevé,
– thrombophilies et complications vasculaires : la grossesse s’accompagne de nombreuses modifications biologiques, physiologiques et notamment d’une hypercoagulabilité ; cette hypercoagulabilité physiologique peut être majorée par des facteurs de risques génétiques et/ou acquis de thrombose. On observe alors une augmentation du risque de maladie thromboembolique, de thrombose dans les vaisseaux du placenta et ainsi d’arrêt de grossesse. Les thrombophilies impliquées peuvent être :
. génétiques ; il s’agit de la mutation du facteur II (MF II), la mutation du Facteur V Leiden (FVL) et la résistance à la protéine C activée (RPCa), les déficits en antithrombine III (AT), les déficits en protéine C ou en protéine S,
. ou acquises comme le syndrome des antiphospholipides (SAPL), l’homocystéinémie et la Maladie de Vaquez,
– causes infectieuses : les principaux germes pouvant entraîner une MIU sont :
. bactéries : listériose ++, syphilis, infections génitales à gonocoque, chlamydiae et à mycoplasmes, maladie de Lyme, infections urinaires (pyélonéphrites),
. virus : rubéole, CMV, HIV, parvovirus B19, herpès, plus rarement : hépatite (A ou B), rougeole…,
. parasites : toxoplasmose, paludisme,
– toxicomanies : alcool, drogue (cocaïne), médicaments (AINS)…,
– causes toxiques : intoxication au CO2, au plomb,
– traumatismes (accidents de la voie publique, violences physiques, chutes…),
– utérines : rupture utérine, utérus hypoplasiques ou malformés.
2) Causes fœtales :
– Anomalies chromosomiques (5 à 10 % des MIU) : trisomie 21, 13, 18, triploïdie et syndrome de Turner.
L’aberration chromosomique peut être difficile à mettre en évidence à cause de la macération, d’où la nécessité de prélever du liquide amniotique avant l’expulsion et de prélever différents tissus du fœtus après l’expulsion (foie, poumons, gonades) afin d’effectuer un examen cytogénétique. La découverte d’une anomalie chromosomique est capitale pour le conseil génétique. Elle peut amener à pratiquer un caryotype parental et un caryotype précoce systématique lors d’une grossesse ultérieure.
– malformations congénitales :
. du squelette : ostéogenèse imparfaite,
. du système nerveux central : anencéphalie, hydrocéphalie,
. cardiaques sévères,
– petit poids fœtal et retard de croissance intra-utérin (RCIU) : le RCIU peut être consécutif à de nombreuses pathologies telles que les pathologies vasculo-placentaires, les infections, l’HTA maternelle ou encore le tabagisme,
– anémie fœtale : alloimmunisation Rhésus surtout, les infections à Parvovirus B19, plus rarement les thalassémies et déficit enzymatique (en pyruvate kinase),
– grossesse gémellaire : le risque est multiplié par 3 en cas de grossesse monochoriale (syndrome transfuseur-transfusé)… et grossesse multiple.
– grossesses prolongées.
3) Causes annexielles :
– placentaires : placenta prævia hémorragique ++, HRP, infarctus placentaire (si atteinte de plus de 30 % du placenta), hémorragie de Benckiser, chorioangiome,
– funiculaires : nœud, circulaire, tumeur ou brièveté du cordon,
– brides amniotiques.
4) Causes inexpliquées :
L’étiologie est malheureusement indéterminée dans 30 % des cas, même après un bilan complet (causes immunologiques ?).
3. Diagnostic :
A) Diagnostic clinique :
1) Signes fonctionnels :
– Absence ou disparition des mouvements fœtaux (motif habituel de la consultation), souvent précédée par leur diminution,
– impression de diminution du volume de l’abdomen,
– petite métrorragie noirâtre ± glaireuse,
– montée laiteuse avec tension mammaire,
– amélioration de l’état général, disparition des œdèmes et varices.
2) Signes physiques :
– Hauteur utérine insuffisante par rapport à l’âge de la grossesse ou régression de la hauteur utérine par rapport à une consultation précédente,
– palpation : utérus “follement mou” (Brindeau), avec mauvaise perception des pôles fœtaux,
– absence des bruits du coeur fœtal (BCF -),
– toucher vaginal :
. col souvent dur, contrastant avec un utérus mou,
. présentation souvent élevée,
. si présentation céphalique et mort ancienne : chevauchement des os du crâne avec parfois crépitations (signe de Naegele).
Aucun de ces signes n’est suffisamment sensible pour prendre une décision rapide et imprudente. Les erreurs sont fréquentes. Répéter l’examen et temporiser.
Le diagnostic de certitude est obtenu par l’échographie.
B) Diagnostic paraclinique :
1) Echographie ++ : Cf chapitre spécial
2) Radio du CU :
Elle doit être demandée systématiquement lorsque la MIU est de quelques jours. On retrouve :
– chevauchement des os du crâne (signe de Spalding I),
– angulation du rachis (signe de Spalding II),
– halo péricéphalique (bande claire entre les os du crâne et le cuir chevelu (Devel),
– quelques bulles de gaz au niveau du thorax par libération des gaz du sang dans le cœur et les gros vaisseaux,
– parfois on retrouve la cause :
. anasarque (signe de Bouddha),
. malformation (hydrocéphalie ou anencéphalie),
. grossesse gémellaire ou grossesse multiple.
3) Autres examens :
Les dosages hormonaux, amnioscopie, amniocentèse n’ont actuellement aucun intérêt pour le diagnostic de MIU, sinon :
– cytologie vaginale : disparition progressive des cellules naviculaires, et apparition de cellules rondes de lactation plus tardivement,
– étude du LA (amnioscopie, amniocentèse) : liquide rougeâtre ou brunâtre (jus de viande).
4. Evolution de l’œuf en état de rétention :
1) Evolution clinique : variable :
a) L’évolution habituelle est normale, l’accouchement spontané est ± retardé.
La durée de la rétention est variable, de quelques jours à quelques semaines.
En pratique, dans 80 % des cas, l’expulsion se produit dans les 15 jours.
b) Les accidents qui peuvent se voir pendant le travail :
– dystocie dynamique : liée à l’involution progressive du myomètre,
– les présentations dystociques sont fréquentes (transverses),
– la tête s’engage à dilatation incomplète (défaut d’accommodation),
– risque de rupture utérine.
c) La délivrance :
– difficulté de clivage du placenta (rétention totale ou partielle),
– rétention des membranes,
– hémorragie de la délivrance.
* Les complications :
– Infection ovulaire : à craindre lorsque les membranes sont rompues et que le fœtus n’est pas expulsé rapidement. Dans ce cas, il va y avoir un envahissement de la cavité amniotique par des germes anaérobies ⇒ accidents de putréfaction cadavérique.
Cliniquement, elle se traduit par une hyperthermie à 39-40°C, une odeur fétide du LA, un utérus distendu, sonore tympanique, avec parfois des crépitations.
L’évolution sans traitement se fait vers la septicémie.
– Embolie amniotique.
– Accidents de défibrination : le placenta en cytolyse depuis plusieurs semaines laisse passer dans la circulation maternelle des facteurs thrombo-plastiniques ⇒ coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) ⇒ risque d’hémorragie de la délivrance.
2) Evolution anatomique :
a) Fœtus : on peut savoir à quand remonte la MIU :
– 3ème au 5ème mois : MOMIFICATION :
Le fœtus est petit, desséché, en bougie (comme si conservé dans de l’alcool).
– après le 5ème mois : MACERATION :
. pendant 48 h : pas de modifications (pas de décollement épidermique),
. 2ème – 3ème jour : épiderme soulevé par de larges phlyctènes rougeâtres, prédominant au niveau des membres inférieurs,
. 3ème – 8ème jour : les phlyctènes s’étendent et atteignent la face et le crâne, qui sont les derniers à desquamer, les phlyctènes se rompent, laissant le derme à nu,
. 8ème – 12ème jour : véritable dislocation du fœtus : la tête se déforme, les os se chevauchent (fœtus polichinelle).
b) Les annexes :
– le cordon est infiltré, rougeâtre, exsangue,
– les membranes sont rougeâtres,
– le LA est épais et de couleur brune.