Les vomissements gravidiques, symptôme physiologique du 1er trimestre, sont un motif fréquent de consultation ainsi que d’hospitalisation dans les formes incoercibles (qui compliquent 0,5 à 2 % des grossesses).
Les vomissements gravidiques sont :
– soit un signe banal de grossesse, rangé traditionnellement dans le cadre des signes neurosympathiques de la grossesse ; ils sont propres à l’espèce humaine ;
– soit une complication sévère voire gravissime du début de la grossesse.
Les vomissements incoercibles sont responsables d’une perte de poids (supérieure à 5 % du poids initial) avec déshydratation, acidocétose et hypokaliémie.
En cas de déséquilibres sévères (hyperémèse gravidique), il est impératif d’hospitaliser la patiente, d’éliminer une origine organique et de traiter efficacement les vomissements afin d’éviter une évolution vers la mort maternelle ou fœtale.
1. Physiopathologie :
1) Phénomènes hormonaux : il faut une grossesse évolutive !
Beaucoup de systèmes hormonaux ont été étudiés : hCG, estrogènes, hormones thyroïdiennes, corticoïdes…
2) Phénomènes psychologiques :
– Dysadaptation affective de la femme par rapport à sa grossesse ou/et à son entourage (” le vomissement est un langage par lequel s’exprime une détresse psychologique “).
– On relève souvent des problèmes socio-culturels… il existe des craintes, un rejet de la grossesse.
Ce sont souvent des jeunes primigestes, très dépendantes de leur mère, soumises à des conflits familiaux : conflit affectif avec le mari (absences fréquentes), avec la famille (dépendance), à la personnalité immature, infantile.
2. Types de vomissements :
1) Vomissements simples :
Les vomissements banals sont le début des vomissements graves :
– Conditions de survenue : le matin, au réveil, à l’occasion des repas ; parfois déclenchés par des odeurs ;
– Rapidité d’apparition après l’ingestion alimentaire ;
– Ils sont ” faciles “, sans efforts vrais de vomissements ;
– Ils sont répétés chaque jour et plusieurs fois par jour ;
– Etat général peu altéré.
Leur abondance et leur répétition les rendent graves.
2) Vomissements incoercibles (ou graves) :
a) Définition :
Sont dits graves les vomissements entraînants :
– Un amaigrissement de plus de 10 % du poids corporel ;
– Une acétonurie à +++ ou ++++ ;
– Des signes cliniques de dénutrition ou de déshydratation.
b) Signes cliniqes : les vomissements
– Intolérance gastrique absolue : la malade vomit immédiatement tout ce qu’elle vient d’absorber.
– Efforts de vomissements, improductifs : douleurs épigastriques parfois intenses
– Asthénie rapide et profonde.
– On recherche :
* Signes de déshydratation extra cellulaires :
. Faciès tiré, yeux cernés, langue rôtie et râpeuse ;
. Le pli cutané persiste ;
. Hypotension ;
. Oligurie ;
. La malade n’a pas soif +++ .
* Signes de dénutrition :
. Amaigrissement de plus de 10 kg ;
. La perte quotidienne peut atteindre 500 g (fonte du pannicule adipeux et des masses musculaires).
* Complications de la grossesse : môle et gémellaire.
c) Diagnostics différentiels :
– Syndromes digestifs : occlusion, appendicite, ulcère, cholécystite, hernie hiatale…
– Syndromes rénaux : infections urinaires ;
– Syndrome hypertensif : prééclampsie ;
– Syndromes neurologiques : affections neuro-méningées, tumeurs (FO) ;
– Syndromes psychiatriques : patientes qui se font vomir ;
– Le ptyalisme, observé surtout chez certaines africaines ; serait un équivalent des vomissements, mais ne pose guère de problèmes de réanimation (traitement : faire mâcher du chewing-gum pour faire avaler la salive).
d) Signes biologiques :
– déshydratation et hémoconcentration :
. Natrémie normale en général ;
. Baisse légère du chlore et du potassium ;
. Elévation de l’hématocrite et des protides ;
. Le Na urinaire est bas (le rein “verrouille” le sodium). Le potassium urinaire est plus élevé (inversion du rapport Na/K).
– hypercatabolisme : élévation de l’urée sanguine ; présence de corps cétoniques urinaires (jusqu’à 3 à 5 g/l) ;
– troubles de l’équilibre acido-basique : alcalose hypochlorémique due aux vomissements, puis acidose métabolique due à la dénutrition.
e) Evolution :
– Sans traitement : apparition de signes de gravité : fièvre, subictère, oligoanurie, signes neurologiques : torpeur, syndrome de Gayet Wernicke.
A ce stade là, la mort survient en quelques jours.
– Avec traitement : le pronostic est en général bon, mais rechutes fréquentes, surtout par défaut de traitement.
4. Recherche de signes de gravité :
– Vomissements incoercibles, toute la journée, au-delà de 3 mois ;
– ou complications :
. déshydratation (hyponatrémie, hypokaliémie, hypochlorémie, cétonurie) ;
. amaigrissement > 5 % ;
. insuffisance rénale, hypercalcémie ;
. cytolyse, hyperbilirubinémie ;
. encéphalopathie de Gayet-Wernicke (carence en vit. B1).
5. Conduite à tenir :
1) En l’absence de signes de gravité :
– Repos (arrêt de travail) ;
– Rassurer ;
– Repas fractionnés et en petites quantités ;
– Eviter les boissons en dehors des repas ;
– Favoriser les graisses et le sel ;
– Arrêter tabac, fer, exclure les odeurs fortes ;
– Antiémétiques à proposer :
. métoclopramide (Primpéran ®) 1 cp avant les repas ou en suppositoire ;
. ou métopimazine (Vogalène ®) 1-2 cp ou en suppositoire ;
. ou dompéridone (Motilium ®) 3-6 cp/j ;
– Associer facilement un antiacide : hydroxydes d’aluminium et de magnésium (Maalox ®, Gelox ®) ou alginate + bicarbonate de sodium (Gaviscon ®) ± ranitidine (Azantac ®).
2) En cas de signes de gravité :
Vomissements incoercibles, compliqués, toute la journée, ou au-delà de 3 mois avec une perte de poids > 5 % ⇒ HOSPITALISATION.
NB : La déshydratation est due à la restriction des apports et aux vomissements ; les pertes en Na, Cl et K sont masquées par l’hémoconcentration.
Le jeûne conduit à l’épuisement des réserves glucidiques (avec métabolisme lipidique, apparition de corps cétoniques).
a) Bilan :
– Clinique : fréquence, retentissement, palpation abdominale (appendicite ?), orifices herniaires (occlusion ?)…
– NFS, CRP, ionogramme, uricémie, créatininémie, bilan hépatique, Ag HBS, TSHus, T3, T4, chimie des urines (bandelettes) ;
– Poids, diurèse ;
– Echographie obstétricale : vitalité, liquide amniotique, placentation ;
– Echographie hépatovésiculaire ;
– Si persistance ou soupçon de pathologie organique : consultation gastro-entérologique (fibroscopie).
b) Traitement :
1- L’isolement : indispensable (demi-obscurité, dans le calme, en chambre seule), en limitant les visites si besoin ;
2- Arrêt de l’alimentation ;
3- Psychothérapie de soutien +++ (entretien avec un psychologue ± assistante sociale selon les cas) ;
4- Perfusions pour corriger la déshydratation (sels) l’hypoglycémie et le jeûne :
. GS 2 L/j + Na Cl 4 g/L, KCl 2 g/j (ou PGS % 2 L/j) et polyvitamines : 2 amp/j (prévention des complications neurologiques+++) ;
. ou métoclopramide (Primpéran ®) 30-40 mg/j (3-4 amp/j) ;
. ou métopimazine (Vogalène ®) 10-20 mg/j (1-2 amp/j) ;
. ± chlorpromazine (Largactil ®) 15 gouttes, 3 fois/j ;
5- Associer facilement antiacide : hydroxydes d’aluminium et de magnésium (Gelox ®, Maalox ®) ou alginate + bicarbonate de sodium (Gaviscon ®) ± ranitidine (Azantac ®) ;
6- Une sonde nasogastrique peut être nécessaire (exceptionnel).
c) Evolution :
– Surveillance : poids, hydratation, diurèse/24 h, ionogramme en fonction des troubles ;
– Réalimentation progressive après 48 h sans vomissements, d’abord légère, solide, puis normale 24 h après si RAS ;
– Arrêt de perfusion si pas de vomissements et bonne alimentation ;
– Relais par :
. métoclopramide (Primpéran ®) 1 cp avant les repas ou en suppositoire ;
. ou métopimazine (Vogalène ®) 1-2 cp ou en suppositoire ;
. ou dompéridone (Motilium ®) 3-6 cp/j ;
. associer facilement antiacide : hydroxydes d’aluminium et de magnésium (Gelox ®, Maalox ®) ou alginate + bicarbonate de sodium (Gaviscon ®) ± ranitidine (Azantac ®) ;
– Sortie à la demande.
d) Avant la sortie :
– Conseils hygiénodiététiques :
. Repos en décubitus dossier surélevé, suppression du tabac ;
. Fractionner l’alimentation en de nombreux petits repas en diminuant les graisses et les aliments à odeurs fortes ;
. Privilégier les aliments riches en potassium (bananes, prunes, jus de fruits…) ;
– Echographie (contrôle de la grossesse), déclaration, prochain RDV ;
– Organiser le repos : discuter maison de repos ou éloignement de la famille directe.
Exemple de protocole de traitement :
J1 et J2 :
1- Jeûne complet.
2- Traitement médical :
- soit le classique cocktail lytique DPL : Péthidine (ancien Dolosal) 100 mg, Prométhazine (Phenergan) 50 mg et Chlorpromazine (Largactil) 25 mg, 3/jour,
- soit l’association Phenergan Largactil, en doses fractionnées ou en perfusion, 3 fois par jour,
- soit le Sulpiride (Dogmatil) : 100 mg IM, 3 fois par jour.
3- Réanimation :
- apport quotidien de 2 L à 2.5 L de glucosé à 5% avec par litre 4 à 6 gr de NaCl et 2 à 3 g de KCl,
- bicarbonate si RA basse, chlorhydrate d’arginine si RA élevée.
J3 et J4 :
- si pas de vomissements : alimentation semi liquide, avec jus de fruits (K), sirop de K,
- Phénergan-Largactil en IM (1/2 ampoule de chaque, 30 minutes avant la prise alimentaire), ou Dogmatil (3 gélules à 50 mg/j).
J5 et J6 :
- alimentation solide, poursuivre le Largactil per os ou le Dogmatil per os.
Dans les formes avec signes de gravité, et lorsque le traitement initial parait insuffisant, se pose le problème d’une alimentation parentérale continue ou d’une alimentation entérale par sonde. Cette éventualité est tout à fait exceptionnelle et nécessite la collaboration avec les services compétents.
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L’hyperémèse gravidique (hyperemesis gravidarum ou HG) se distingue des nausées et vomissements liés à la grossesse par une perte de poids ≥ 5 % ou des signes de déshydratation ou un score PUQE ≥ 7.
L’hospitalisation est recommandée lorsqu’au moins un des critères suivants est rempli :
– perte de poids ≥ 10 %,
– un ou plusieurs signes cliniques de déshydratation,
– score PUQE (Pregnancy Unique Quantification of Emesis and nausea : quantification unique des vomissements et des nausées pendant la grossesse) ≥ 13,
– hypokaliémie < 3,0 mmol/L,
– Hyponatrémie < 120 mmol/L,
– créatinine sérique élevée > 100 mmol/L
– ou résistance au traitement.
Il est recommandé d’arrêter la supplémentation prénatale en vitamines et en fer sans interrompre la supplémentation en acide folique.
Le régime alimentaire et le mode de vie seront ajustés en fonction des symptômes.
L’aromathérapie ne doit pas être utilisée.
Si le score PUQE est < 6, le gingembre, la pyridoxine (vitamine B6), l’acupuncture ou la stimulation électrique peuvent être utilisés même s’il n’y a aucune preuve de bénéfice.
Il est recommandé que le médicament ou la combinaison de médicaments associés aux effets secondaires les moins graves et les moins fréquents soit toujours sélectionné pour une utilisation en première, deuxième ou troisième intention, en tenant compte du fait qu’il n’y a pas de supériorité d’une classe de médicaments sur une autre. Nausées et vomissements de grossesse et HG.
En cas d’hyperémèse gravidique nécessitant une réhydratation parentérale, la vitamine B1 doit être administrée par voie systémique pour prévenir le développement de l’encéphalopathie de Gayet Wernicke.
Les patients hospitalisés pour HG ne doivent pas être placés à l’isolement (placé dans un endroit sombre, téléphones portables confisqués, ou interdiction de visite…).
Un soutien psychologique doit être proposé à toutes les patientes atteintes d’HG.
Au retour à domicile après une hospitalisation, les soins seront organisés par le médecin référent.
Les nausées et les vomissements pendant la grossesse font partie des symptômes de grossesse les plus courants et touchent 50 à 90 % des femmes.
Dans la plupart des cas, les symptômes sont légers, n’affectent pas la qualité de vie et disparaissent à la fin du premier trimestre.
Les formes plus graves comprennent l’hyperémèse gravidique (hyperemesis gravidarum – HG).
Des nausées et des vomissements surviennent chez environ 35 % des femmes pendant la grossesse, entraînant une incapacité physique, des changements dans les activités quotidiennes et professionnelles et affectant négativement les relations familiales.
Ces vomissements sont incontrôlables dans 0,3 à 3,6 % des grossesses et constituent la première cause d’hospitalisation au premier trimestre.
Il est crucial d’identifier les femmes qui présentent un risque élevé de souffrir d’HG.
De nombreux facteurs ont été suggérés comme indicateurs de risque potentiels, notamment une prédisposition génétique, un faible indice de masse corporelle, des grossesses multiples ou des antécédents d’HG lors d’une grossesse précédente.
La compréhension des mécanismes à l’origine de l’HG reste limitée.
Les facteurs contribuant à cette maladie sont probablement divers et peuvent différer selon les femmes, influencés par la prédisposition génétique, les éléments biologiques, le sexe fœtal ou l’état de santé général.
Bien que les changements hormonaux aient fait l’objet de recherches approfondies, cela ne suffit pas à élucider pleinement les symptômes cliniques à eux seuls.
De nombreuses études se sont principalement concentrées sur les hormones telles que la gonadotrophine chorionique humaine (hCG), les hormones thyroïdiennes et les hormones stéroïdes comme le cortisol, les œstrogènes et la progestérone aux premiers stades de la grossesse.
Cela est dû au fait que l’apparition et l’intensité des symptômes correspondent à l’augmentation de ces hormones spécifiques.
La présence d’HG a un impact significatif sur l’évolution de la grossesse.
L’encéphalopathie de Gayet-Wernicke présente un danger potentiel pour les mères, surtout si elles subissent une réhydratation sans inclusion de thiamine (vitamine B1).
Malheureusement, cette condition peut devenir irréversible, même avec une supplémentation ultérieure en thiamine.
Dans de rares cas, une carence en vitamine K peut entraîner une dysostose maxillo-faciale ou un syndrome de Binder.
L’hyperemesis gravidarum peut altérer la qualité de vie personnelle et professionnelle et avoir des conséquences psychologiques et psychiatriques pendant la grossesse (stress, anxiété-dépression, trouble de stress post-traumatique et pensées suicidaires) qui peuvent persister jusqu’au post-partum.
La gravité des symptômes amène parfois certaines femmes à envisager d’interrompre volontairement une grossesse initialement non désirée, ou à abandonner des grossesses ultérieures.
Enfin, il existe un risque de récidive lors des grossesses ultérieures, mais sa fréquence est mal évaluée.
Vomir de façon répétée pendant des semaines, perdre parfois une quantité significative de poids, se sentir affaibli, incapable d’assumer les tâches quotidiennes, la vie de famille et le travail.
Ce sont des réalités auxquelles certaines femmes peuvent être confrontées pendant leur grossesse, bien que la société leur répète souvent que “la grossesse n’est pas une maladie”.
* Quelle est la définition des nausées et vomissements de la grossesse ?
Il est proposé de définir les nausées et vomissements gravidiques comme des nausées et vomissements débutant au premier trimestre de la grossesse en l’absence d’autre étiologie.
Tout d’abord, il est important d’exclure toute autre cause possible en se basant sur l’interrogatoire et l’examen clinique.
Il n’est pas nécessaire, en première instance, de réaliser des tests biologiques ou des examens d’imagerie médicale (à l’exception de l’échographie obstétricale).
L’échographie obstétricale, qui est facilement accessible permet d’éliminer rapidement et facilement une éventuelle cause d’hyperémèse gravidique, telle qu’une grossesse multiple ou une grossesse môlaire.
* Sur quels éléments doit reposer l’évaluation initiale de la sévérité des nausées et vomissements gravidiques ?
Il est proposé que l’évaluation initiale de la
sévérité des nausées et vomissements gravidiques repose sur 3 critères cliniques :
– la perte de poids rapportée au poids avant la grossesse,
– la recherche de signes cliniques de déshydratation,
– et le score PUQE modifié.
Le score PUQE (Encadré 1) a été choisi en raison de sa simplicité et de sa corrélation élevée avec la gravité des nausées et vomissements gravidiques.
Il est mesuré par le biais d’un interrogatoire portant sur une période de 24 heures.
La version modifiée du score est préférée à la version originale car elle nécessite une évaluation sur une période de 24 heures (alors que la version originale était basée sur une période de 12 heures seulement) depuis le début de la grossesse.
De plus, cette version modifiée a été validée en langue française, étant développée au Québec.
Les signes cliniques de déshydratation comprennent :
– une soif intense : La personne ressent une sensation de soif importante et peut avoir besoin de boire fréquemment pour s’hydrater,
– le signe du pli cutané : Il s’agit d’un test effectué en pinçant doucement la peau, généralement au niveau du dos de la main ou de l’avant-bras, puis en relâchant. Si la peau met du temps à retrouver sa forme normale et reste plissée, cela peut indiquer une déshydratation,
– une hypotension artérielle orthostatique, puis de décubitus avec tachycardie compensatrice réflexe,
– un choc hypovolémique lorsque les pertes liquidiennes sont supérieures à 30 %. Cela se caractérise par une diminution importante du volume sanguin circulant, ce qui peut entraîner une baisse de la pression artérielle, une augmentation de la fréquence cardiaque et une altération de la perfusion des tissus,
– un aplatissement des veines superficielles, y compris la jugulaire externe en position allongée,
– une oligurie avec concentration des urines.
– une sécheresse de la peau, en particulier dans les aisselles ; la déshydratation peut entraîner une diminution de la transpiration et une sécheresse cutanée, notamment dans les zones où les glandes sudoripares sont concentrées, comme les aisselles.
Pour le score PUQE modifié : Voir plus bas.
Ce score permet d’évaluer la sévérité des nausées et vomissements gravidiques.
* Quelle est la définition des nausées et vomissements gravidiques non compliqués ?
– une perte de poids inférieure à 5 %,
– l’absence de signes cliniques de déshydratation,
– un score PUQE ≤ 6.
* Quel bilan faire en cas de nausées et vomissements gravidiques non compliqués ?
Il est proposé de ne pas réaliser de bilan biologique ou d’imagerie (à l’exception d’une échographie obstétricale) en cas de nausées et vomissements gravidiques non compliqués.
1. Définitions et sévérité :
1) Définition de l’hyperémèse gravidique :
Il est proposé de définir l’hyperémèse gravidique comme des nausées et vomissements gravidiques associés à au moins un des signes suivants :
– une perte de poids ≥ 5 %,
– un ou des signes cliniques de déshydratation,
– un score PUQE ≥ 7.
2) Bilan biologique à faire en cas d’hyperémèse gravidique :
Il est proposé de réaliser devant toute hyperémèse gravidique un :
– dosage de la kaliémie,
– de la natrémie,
– de la créatininémie,
– une bandelette urinaire complète.
Le bilan a pour objectif d’évaluer les éventuelles conséquences de l’hyperémèse gravidique sur l’équilibre hydro-électrolytique et métabolique de la patiente.
L’hyperémèse gravidique peut entraîner des déséquilibres tels que l’hypokaliémie, l’hyponatrémie, l’insuffisance rénale et l’acidocétose diabétique en cas de diabète préexistant pendant la grossesse.
Il est donc important de rechercher des éléments de sévérité qui pourraient justifier une hospitalisation.
Il est proposé, en cas de persistance et/ou d’aggravation des symptômes après un traitement bien conduit, que le bilan puisse être complété par un dosage des transaminases, de la lipase, la réalisation d’une échographie abdominale, d’une numération leucocytaire, un dosage de la CRP, de la TSH, de la T4 à la recherche d’un diagnostic différentiel.
Le but de ce bilan est d’exclure les diagnostics différentiels les plus fréquents de l’hyperémèse gravidique qui ne peuvent pas être déterminés uniquement à partir de l’interrogatoire et de l’examen clinique.
Il s’agit de diagnostiquer une hépatite, une pancréatite, des formes atypiques d’appendicite, de pyélonéphrite, de torsion de l’annexe et une hyperthyroïdie.
Le praticien doit garder à l’esprit que l’hyperémèse gravidique est souvent associée à des modifications des tests hépatiques et thyroïdiens. Par exemple, la TSH peut être basse en raison de la similarité structurale entre la béta-hCG et la TSH, ce qui conduit à une thyrotoxicose gestationnelle transitoire.
Ces modifications sont le plus souvent une conséquence de l’hyperémèse gravidique et non la cause.
Les diagnostics différentiels mentionnés ci-dessus doivent être envisagés dès le départ en cas de modifications biologiques majeures ou en présence d’une discordance entre l’évolution des anomalies biologiques persistantes ou aggravées et celle des nausées et vomissements qui deviennent moins fréquents ou même disparaissent sous traitement.
Il est important de noter que, sauf en cas de vraie maladie de Basedow, caractérisée par un goitre et des signes de thyrotoxicose, il n’est pas nécessaire de prescrire des médicaments antithyroïdiens de synthèse aux patientes chez qui le bilan biologique est compatible avec une simple hyperthyroïdie gestationnelle transitoire.
3) Critères d’hospitalisation en cas d’hyperémèse gravidique :
Il est proposé que les patientes avec des nausées et vomissements gravidiques non compliqués bénéficient d’une prise en charge externe.
Compte-tenu de la fréquence très élevée des nausées et vomissements gravidiques, de leur évolution très favorable dans la grande majorité des cas, lorsque ceux-ci sont non compliqués, la prise en charge doit se faire en externe. Il n’y a pas de place à l’hospitalisation pour ces patientes en l’absence de pathologie sous-jacente.
Il est proposé une hospitalisation en cas d’hyperémèse gravidique lorsqu’elle est associée à au moins un des critères suivants :
– perte de poids ≥ 10 %,
– un ou des signes cliniques de déshydratation,
– score PUQE ≥ 13,
– hypokaliémie < 3,0 mmol/L,
– hyponatrémie < 120 mmol/L,
– élévation de la créatininémie > 100 mmol/L,
– résistance au traitement.
Au total, l’hospitalisation dans le cas de l’hyperémèse gravidique est généralement réservée aux patientes présentant des complications telles que des pertes de poids significatives ou des troubles hydroélectrolytiques nécessitant une correction rapide par voie intraveineuse.
Cependant, il est important de noter que ces critères ne doivent pas être interprétés de manière stricte.
L’association de plusieurs anomalies biologiques qui ne dépassent pas les seuils spécifiques mentionnés précédemment peut également justifier une hospitalisation, en fonction de l’évaluation globale de l’état physique et psychologique de la patiente.
2. Prise en charge non médicamenteuse des nausées et vomissements gravidiques non compliqués :
1) Règles hygiéno-diététiques :
Il est proposé aux femmes pré sentant des nausées et vomissements gravidiques d’arrêter leurs vitamines prénatales et leur supplémentation en fer et de privilégier la supplémentation en acide folique seule car la supplémentation en fer au 1er trimestre de la grossesse semble aggraver les symptômes.
Il est proposé aux femmes d’adapter librement leur régime alimentaire et leur mode de vie en fonction de leurs symptômes, puisqu’aucune modification du régime alimentaire ou du mode de vie n’a prouvé son efficacité pour améliorer les nausées et vomissements gravidiques et l’hyperémèse gravidique.
2) Gingembre :
Il est proposé de réserver le gingembre aux femmes ayant un score PUQE ≤ 6, s’il devait être utilisé, sachant que l’amélioration des symptômes après sa prescription n’est pas formellement démontrée.
3) Pyridoxine (vitamine B6) :
Il est proposé de réserver la vitamine B6 aux femmes ayant un score PUQE ≤ 6, si elle devait être utilisée, sachant que l’amélioration des symptômes après sa prescription n’est pas démontrée.
De plus, la vitamine B6 n’est pas disponible en France aux posologies utilisées dans la littérature.
4) Acupression, acupuncture et électrostimulation :
Il est proposé de réserver l’acupression, l’acupuncture et l’électrostimulation aux femmes ayant un score PUQE ≤ 6, si elles devaient être utilisées, sachant que l’amélioration des symptômes après leur prescription n’est pas démontrée.
3. Prise en charge médicamenteuse :
1) Antiémétiques :
Il est proposé que soient toujours choisis pour des utilisations en première, deuxième, ou troisième intention, les médicaments ou les associations de médicaments associés aux effets secondaires les moins sévères et les moins fréquents, compte-tenu de l’absence de supériorité d’une classe médicamenteuse par rapport à une autre pour réduire les symptômes des nausées et vomissements et de l’hyperémèse gravidiques.
Au total, il en ressort néanmoins que :
– seule l’association doxylamine-pyridoxine a été évaluée contre placebo ; et elle n’a pas montré de supériorité pour la diminution des nausées ou des vomissements du premier trimestre de la grossesse. En revanche, l’association doxylamine-pyridoxine est le traitement pharmacologique des nausées et vomissements du premier trimestre de la grossesse semblant montrer le moins d’effets secondaires.
– Pour les autres antiémétiques, aucune étude randomisée contre placebo n’est disponible. Les études ayant comparé des antiémétiques entre eux, ne permettent pas de conclure à la supériorité d’une molécule par rapport à une autre dans le traitement des nausées et vomissements du premier trimestre de la grossesse.
– Les neuroleptiques (métoclopramide), incluant les phénothiazines (chlopromazine et prométhazine) utilisés dans le traitement des nausées et vomissements du premier trimestre de la grossesse sont associés à un risque augmenté de signes extrapyramidaux (somnolence, tremblements, vertiges, dystonie).
– L’exposition en période d’organogenèse à l’ondansétron, utilisé dans le traitement des nausées et vomissements du premier trimestre de la grossesse, est associée, dans des études de registre, à une augmentation minime du risque absolu de fentes labio-palatines (d’environ 3 cas supplémentaires pour 10 000 naissances vivantes exposées).
Nb : L’ondansétron, un antagoniste des récepteurs 5-HT3 de la sérotonine utilisé comme antiémétique, n’a pas d’autorisation de mise sur le marché en France pour le traitement des nausées et vomissements du premier trimestre de la grossesse. Cependant, il est autorisé pour les nausées et vomissements post-opératoires ainsi que les vomissements aigus induits par la chimiothérapie.
– Les corticoïdes, compte tenu de leurs effets secondaires potentiels et de leur efficacité incertaine, s’ils sont utilisés, ne doivent l’être qu’en dernier recours en cas d’hyperémèse gravidique.
2) Traitements complémentaires :
Il est proposé que de la vitamine B1 soit systématiquement administrée en cas d’hyperémèse gravidique nécessitant une réhydratation intraveineuse afin de prévenir la survenue d’une encéphalopathie de Gayet Wernicke.
4. Accompagnement des femmes atteintes d’HG :
– Les patientes hospitalisées pour hyperémèse gravidique ne devraient pas être mises à l’isolement : ne pas les placer dans l’obscurité, ni leur confisquer leur téléphone portable ou leur interdire les visites. Cette proposition est basée sur le fait qu’il n’existe pas de données suggérant que cette mesure soit efficace, et qu’elle pourrait avoir des effets psychologiques néfastes.
– Il est également proposé d’offrir un soutien psychologique à toutes les patientes atteintes d’hyperémèse gravidique, en raison de l’impact négatif que cette pathologie peut avoir sur leur bien-être psychique.
5. Algorithme de prise en charge :
Il s’agit d’une proposition qui tient compte de la balance bénéfices/risques des traitements au regard des données de la littérature mais qui peut être adaptée aux protocoles et habitudes de chacun (Fig. 1).
6. Prise en charge après le retour à domicile :
Il est proposé d’organiser la prise en charge des patientes avec hyperémèse gravidique autour d’un médecin référent lors de leur retour à domicile après hospitalisation.
Après l’hospitalisation, il est envisageable d’organiser une prise en charge ambulatoire qui sera supervisée par un médecin référent pendant une période initiale de 7 à 15 jours, dans le but de réduire les récidives sévères et d’éviter une ré-hospitalisation.
Le médecin référent peut être, selon les cas, le médecin traitant de la patiente, son gynécologue de ville ou l’obstétricien de sa maternité.
Une surveillance clinique et éventuellement biologique peut alors être effectuée à domicile par une infirmière diplômée d’État.
En cas de détérioration de l’état clinique ou biologique, l’infirmière contactera le médecin référent afin de mettre en place une adaptation du traitement selon les modalités définies dans l’algorithme ou décider d’une nouvelle hospitalisation si nécessaire.
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Cet article a été largement inspiré du “Consensus formalisé d’experts du Collège national des gynécologues et obstétriciens français” ; extrait de la revue “Gynécologie Obstétrique Fertilité Sénologie 50 (2022) 700–711”.