Après que le triplet diagnostique aura permis d’établir le diagnostic de cancer du sein et de classer la tumeur et l’atteinte ganglionnaire, définir le T et le N de la classification internationale de l’UICC, se pose le problème de la détermination d’un éventuel état métastatique concomitant.

Le risque métastatique est fonction de l’extension locale et régionale de la maladie.

La diffusion métastatique peut être évidente au moment du diagnostic car symptomatique ; elle nécessite alors la mise en jeu des procédures de diagnostic habituelles nécessaire à la confirmation de la nature métastatique du symptôme considéré. L’examen choisi celui dont la sensibilité et la spécificité sont les meilleures dans le cas considéré.

Les ponctions orientées par échographie, tomodensitométrie ou bientôt par IRM permettent d’affirmer la nature secondaire des lésions suspectes.

Deux questions se posent aujourd’hui : faut-il réaliser pour chaque patiente atteinte de cancer du sein un bilan systématique à la recherche d’une éventuelle dissémination métastatique infraclinique et quels sont les termes de ce bilan quand il doit être réalisé ?

La réunion de consensus de la Société française de sénologie et de pathologie mammaire tenue à Lyon en novembre 1991 apporte des réponses graduées mais dont les paramètres de choix de décision sont pour la plupart obtenus par le geste chirurgical loco-régional :

1. Il ne faut pas faire de bilan d’extension en cas de cancer in situ.

2. Pour les tumeurs centimétriques sans atteinte ganglionnaire axillaire métastatique ni facteurs de mauvais pronostic, il ne faut pas faire de bilan d’extension. 

3. Pour les autres tumeurs, le bilan d’extension est à pondérer des facteurs de mauvais pronostic en particulier dans les situations cliniques suivantes où le risque métastatique immédiat est important : cancer inflammatoire ou localement évolué ou fixé au plan profond ou à la peau ou avec adénopathies axillaires fixées.

Dans ces cas, on recommande :

– une scintigraphie osseuse,

– une radiographie pulmonaire,

– une échographie abdominale,

– et un bilan biologique : numérations globulaires et plaquettaires, fonctions hépatiques,

– ainsi que les marqueurs tumoraux (ACE et CA 15-3) dont la sensibilité et la spécificité sont reconnues par la plupart des équipes. Rappelons que ni l’un ni l’autre n’ont leur place en diagnostic ou en dépistage. Leur dosage en cas de présence de facteurs de mauvais pronostic pourra servir de valeur de référence.

CONCLUSION

L’inventaire préthérapeutique n’est plus systématique mais pondéré par les facteurs de pronostic.

B I L A N   D ‘E X T E N S I O N  : 

1) Examens radiologiques :

Certains examens sont pratiqués de principe, d’autres à la demande, en fonction du contexte ou des signes d’appel cliniques ou biologiques.

– La radiographie pulmonaire révèle exceptionnellement des métastases pulmo­naires ou pleurales infra-cliniques. Cet examen est toujours normal dans le bilan des petites tumeurs. Il est toutefois pratiqué à titre systématique, plus à titre de bilan général à la recherche d’un état pathologique associé, en particulier avant une anesthésie, qu’à titre de bilan d’extension. Il constitue également un document de référence pour la surveillance ultérieure, en notant en particulier les séquelles de tuberculose ou de traumatisme thoracique.

En général, la radiographie thoracique standard est suffisante. Des examens complémentaires (tomographie conventionnelle, tomodensitométrie thoraci­que) ne sont faits qu’à la demande pour préciser une image ambiguë.

– Les radiographies squelettiques ne sont pas pratiquées à titre systématique, en raison de la plus grande sensibilité de la scintigraphie ; elles seront donc indiquées à la demande, en fonction d’une éventuelle fixation scintigraphique ou d’un signe clinique d’appel.

Les clichés localisés peuvent montrer une anomalie bénigne expliquant la symptomatologie ou la fixation scintigraphique : pathologie rhumatologique, maladie de Paget, fracture traumatique. Ils peuvent au contraire confirmer la nature métastatique d’anomalies scintigraphiques et préciseront alors leur caractère lytique, mixte ou condensant.

L’intérêt de la radiologie est de diagnostiquer les lésions fragilisantes, en particulier au niveau des os longs des membres qui requièrent parfois un traitement orthopédique en urgence pour prévenir la fracture pathologique.

– L’échographie hépatique n’est pas systématique au cours du bilan préthérapeutique, car les métastases hépatiques cliniquement et biologiquement muettes sont exceptionnelles au cours d’un premier examen.

Ce n’est que lorsqu’il existe des signes d’appel cliniques ou biologiques que l’on pratique une échographie hépatique, complétée en cas de doute par un examen tomodensitométrique, réalisé en deuxième intention, après l’échographie.

L’échographie n’est pratiquée de principe, comme examen de référence pour faciliter la surveillance ultérieure, que chez les patientes à haut risque métastatique.

– La tomodensitométrie cérébrale de principe a été évaluée dans le cas de patientes à très haut risque métastatique, afin de traiter dans de bonnes conditions d’efficacité des métastases cérébrales infracliniques ; cet examen s’est montré inefficace dans la détection de ces métastases infracliniques et sans influence déterminante sur les modalités du traitement. Au contraire si existent des signes de localisation neurologique ou des signes d’hypertension intracrânienne, l’indication de cet examen est indiscutable.

– Les autres examens radiologiques (digestifs, échographie pelvienne…) peuvent être pratiqués à la demande en fonction des signes d’appel, plus souvent en raison d’une pathologie annexe dans le cadre du bilan général que dans le contexte purement cancérologique.

Au total, les examens radiologiques suffisamment déterminants pour être pratiqués à titre systématique dans le bilan préthérapeutique sont la mammographie et la radiographie pulmonaire. Les autres examens peuvent être indiqués en fonction du contexte ou à la demande, devant un signe d’appel clinique, biologique ou scintigraphique.

2) Scintigraphie osseuse :

– Généralités et techniques :

L’os est la localisation secondaire la plus fréquente des cancers du sein : au moment du décès, des métastases osseuses sont présentes dans 77 % des cas.

La radiographie squelettique, bien que très spécifique, manque de sensibilité puisque 20 à 40 % de la charge calcique doit être perdue pour qu’une lésion osseuse soit visible radiologiquement.

Dès l’avènement de la scintigraphie osseuse, on a pensé détenir une excellente méthode de détection des métastases osseuses au moment du bilan des cancers du sein. Mais si cet examen est plus sensible que les radiographies classiques, son manque de spécificité doit en rendre l’interprétation prudente.

Les caractéristiques physiques du technétium 99m et la faible irradiation du malade qui en découle en ont fait un traceur de choix.

La réalisation pratique de l’examen ne demande aucune préparation particulière et ne présente aucune contre-indication en dehors de la grossesse.

On injecte par voie intraveineuse 15 à 20 mCi de 99mTC-MDP (ou autre dérivé phosphaté). L’examen proprement dit est réalisé deux à trois heures après. Il importe d’obtenir une évacuation vésicale aussi complète que possible (par sondage si nécessaire) juste avant l’examen. La patiente est ensuite placée en décubitus dorsal si l’examen utilise un système de balayage corps-entier. La durée de l’examen est de 30 à 45 minutes. Les images sont obtenues sur des photos à développement instantané ou sur des films spéciaux (Kodak NMB). La dose d’irradiation est de l’ordre de 0,45 cGy, c’est-à-dire comparable à celle des radiographies conventionnelles.

– L’image scintigraphique normale montre :

. sur une vue antérieure : une visualisation symétrique du squelette avec une fixation plus intense au niveau des sutures crâniennes, des articulations chondrocostales qui peuvent dessiner un “chapelet”, des crêtes iliaques et de L4-L5, vertèbres les plus proches du détecteur sur cette incidence,

. sur une vue postérieure : la pointe de l’omoplate qui peut en imposer pour un foyer d’hyperfixation costale ; une fixation relativement intense au niveau du rachis et des régions sacro-iliaques,

. sur les vues antérieures et postérieures : une hyperfixation relative au niveau des articulations et une faible visualisation des os longs.

Le radiotraceur ayant une élimination rénale, l’image des reins et surtout de la vessie se superpose à l’image osseuse normale. L’image viscérale masque ainsi des hyperfixations pathologiques en cas d’évacuation vésicale insuffisante.

La qualité de l’image scintigraphique est fonction de l’âge, de la morphologie de la malade (images de qualité médiocre chez les malades âgées ou obèses) et de sa position rigoureusement symétrique par rapport aux détecteurs.

– L’image scintigraphique anormale peut se présenter sous deux formes :

. “hyperfixation” qui sera appréciée par rapport aux pièces osseuses symétriques, en cas d’os pairs, ou voisines sus et sous-jacentes en cas de localisation vertébrale,

. plus rarement lacune froide plus facilement détectée en tomoscintigraphie et correspondant à des zones où le tissu osseux est entièrement détruit.

– Limites de l’examen ; stratégie diagnostique :

Les métastases osseuses des cancers du sein se traduisent en général par un ou plusieurs foyers hyperfixants, intéressant par ordre de fréquence décroissante les côtes, le bassin, le rachis dorsal et lombaire, le crâne.

. Lorsque les hyperfixations sont multiples, à distance des articulations, le diagnostic de métastase osseuse est hautement probable.

. Plus difficile à résoudre est le problème d’une hyperfixation scintigraphique isolée. De nombreuses affections bénignes peuvent avoir la même traduction scintigraphi­que, en particulier dans les tranches d’âge qui nous intéressent ici. Ce sont les lésions osseuses traumatiques, la maladie de Paget, l’arthrose ou l’ostéoporose en poussée évolutive, la scoliose, plus rarement un ostéome ostéoïde, une dysplasie fibreuse, un infarctus osseux, une ostéomyélite.

Les radiographies centrées sur les zones hyperfixantes permettront le plus souvent de confirmer s’il s’agit d’une lésion bénigne ou maligne.

Il reste le problème des hyperfixations n’ayant pas de traduction radiologique. De nombreux auteurs ont montré la précession des signes scintigraphiques sur les signes radiologiques. Malheureusement un certain nombre de faux positifs inexpliqués ont été décrits et on ne peut se contenter des seuls signes scintigraphiques pour considérer que la malade a des métastases et renoncer alors à un traitement à visée curative.

La scintigraphie osseuse est reconnue unanimement pour être sensible et avoir un faible taux de faux négatifs (2 à 4,5 %). Ceux-ci s’observent essentiellement lors de lésions purement ostéolytiques ou évoluant de façon très rapide ou en phase terminale lorsqu’il n’existe plus de réaction osseuse.

Bilan d’extension

 

Comme pour les autres cancers, le bilan du cancer du sein comporte un bilan d’extension. Il s’agit d’effectuer un bilan de départ de l’extension de maladie, afin d’adapter au mieux la stratégie du traitement et de la surveillance.

Le bilan d’extension permet d’évaluer la taille de la tumeur et son stade.

Il n’existe pas de consensus quand aux examens à pratiquer ; ils sont donc prescrits en fonction de l’âge de la patiente, de son état général, du stade clinique de la maladie et en fonction des habitudes des équipes prenant en charge la patiente.


Ce bilan comporte habituellement :

      • Une mammographie bilatérale et une échographie mammaire ;
      • Une radiographie pulmonaire ;
      • Une échographie abdomino-pelvienne ;
      • Une scintigraphie osseuse ;
      • Des marqueurs tumoraux : CA 15-3 et ACE.
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