L’échoguidage à visée diagnostique était déjà utilisé depuis de nombreuses années en médecine interne, surtout dans la pathologie digestive. Elle concernait essentiellement la ponction échoguidée de masses solides à des fins histologiques. C’est par nécessité surtout que les premières ponctions échoguidées sont apparues dans le domaine gynécologique, pour simplifier les techniques de recueil ovocytaire, dans le cadre des programmes de fécondation in vitro. Cette technique comporte deux aspects : les principes généraux de tout geste échoguidé d’une part, les indications spécifiques à la pathologie gynécologique d’autre part.
1. Techniques de la ponction échoguidée :
Cet examen se fait en ambulatoire ou en hospitalisation du jour.
– Le lieu : bloc opératoire.
– L’instrumentation :
. échographe muni de sondes de 3,5 ou 5 MHz,
. sondes abdominales (sectorielle si la ponction est réalisée par voie abdominale au contact direct, exigeant alors une asepsie parfaite de la paroi avec protection stérile de la sonde, ou convexe si la ponction est effectuée par voie basse),
. sondes vaginales 7 MHz, avec un dispositif de solidarisation de l’aiguille et de la sonde,
. aiguilles de ponction de 17 à 20 gauges, de 20 à 30 cm de long, et pourvues d’une extrémité biseautée d’échogénicité accrue,
. seringues d’aspiration à usage unique de 20 ou 60 cc.
– La patiente :
. prémédiquée ou neurolept-analgésiée,
. à jeun, vessie pleine,
. avec désinfection locale soigneuse.
– L’opérateur :
. habillé stérilement,
. aidé d’un échographiste s’il utilise une sonde abdominale.
– La voie d’abord : après un nouvel examen échographique et une éventuelle anesthésie locale, l’abord direct du kyste a lieu par :
. ponction trans-abdominale (évitant le trajet des épigastriques) si l’ovaire est en contact étroit avec la paroi abdominale antérieure,
. ponction trans-vaginale (évitant les pédicules utérins et la vessie), si l’ovaire est dans le Douglas ou au contact d’un cul-de-sac vaginal,
. ponction trans-vésicale (per-urétrale) si l’ovaire, de situation pelvienne, est en contact avec le mur postérieur de la vessie (l’aiguille est introduite par la lumière d’une sonde de Folley (16 Ch.)).
Ce geste impose de pouvoir faire concorder une droite (l’aiguille de prélèvement) et un plan (la coupe ultrasonore).
Ceci n’est aisé qu’en apparence, car seule la pointe de l’aiguille est concernée, or on peut facilement engendrer un écho brillant lié au métal, à quelques centimètres ou millimètres de la pointe de la simple intersection du plan de coupe ultrasonore et de l’aiguille. Cet aspect montre déjà le risque d’un défaut de repérage ; le meilleur moyen de pallier à cet inconvénient est de s’efforcer d’obtenir la trace de l’aiguille en entier sur la coupe.
La progression de l’aiguille est donc contrôlée de façon permanente par échographie ; un mouvement de rotation de l’aiguille permet une meilleure visualisation de sa pointe biseautée.
L’affaissement du kyste doit être total.
– Conditions de pratique :
Si l’asepsie est à l’évidence obligatoire, l’anesthésie est très variable selon la longueur du geste à effectuer, la pusillanimité ou non de la patiente, le caractère mobile ou non de la cible et ses dimensions. Elle peut être générale sous forme le plus souvent d’une simple analgésie, plus rarement locale en raison de sa faible efficacité.
– Incidents et accidents :
Comme tout geste échoguidé, les ponctions au niveau du pelvis rencontrent parfois des difficultés sources d’incidents, voire d’accidents, dont deux types peuvent être décrits :
. la cible ne peut être réellement et complètement atteinte et évacuée (surtout si ses dimensions sont réduites, en fonction d’une mobilité excessive, fuyant alors devant l’aiguille), d’autres éléments anatomiques voisins sont touchés, les conséquences pouvant être redoutables ;
. la blessure vasculaire concerne le plus souvent des veines latérales pelviennes, le diagnostic est rapidement fait devant la nature du recueil et l’apparition d’une lame peu échogène dans le cul-de-sac de Douglas ; la blessure digestive concerne des anses fixées antérieurement, donc ne fuyant pas devant l’aiguille ; l’infection secondaire, enfin, a été décrite.
La connaissance de ces complications possibles doit toujours être à l’esprit de l’opérateur, même devant l’apparente facilité du geste, tout en sachant qu’en respectant les règles énumérées ci-dessus, elles doivent rester rarissimes.
2. Indications :
L’échographie interventionnelle en gynécologie peut trouver plusieurs applications, qu’elles soient devenues de pratique courante et admises par tous ou plus sélectives.
1) Prélèvements ovocytaires :
Au début effectués par la voie cœlioscopique, ils sont maintenant du ressort exclusif de l’échographie ; ce mode est vite apparu supérieur par sa simplicité, sa légèreté (pouvant être fait en quasi ambulatoire), et une qualité identique du recueil.
L’aspiration folliculaire est faite 36 heures après le déclenchement de l’ovulation.
L’échographie présente d’ailleurs un avantage, en autorisant la vidange complémentaire de follicules intra-ovariens.
La méthode maintenant la plus répandue utilise la sonde vaginale couplée à l’aiguille, permettant à des opérateurs peu rompus à la technique échographique de l’effectuer couramment, d’autant que la séméiologie échographique est univoque.
2) Ponctions de kystes de l’ovaire :
Elles ont bénéficié de la technique précédente. Cette indication au début contestée est actuellement admise par de nombreux praticiens à condition d’entrer dans un cadre bien défini. La séméiologie du kyste occasionnel obéit ici à des critères précis : anéchogénicité, contours internes nets, diamètre maximal inférieur ou égal à 8 cm, unilocularité.
La ponction apporte des éléments diagnostiques complémentaires, la simple vidange ne devant pas être la finalité du geste ;
– l’aspect du liquide est important pour orienter vers une nature fonctionnelle s’il est citrin ou organique, s’il est “eau de roche”, mucineux, “chocolat”, huileux,
– une étude cytologique est systématiquement réalisée par un pathologiste, tout en connaissant le taux relativement élevé de faux négatifs (environ 10 %),
– une étude biochimique enfin est demandée concernant d’une part les marqueurs tumoraux (CA 125, CA 19-9, ACE), le taux de 17 ß-estradiol (habituellement supérieur à 1000 pg/ml dans les kystes fonctionnels et inférieur à 100 pg/ml dans les kystes organiques) et éventuellement de progestérone d’autre part.
Les dosages de l’androstènedione et des marqueurs tumoraux ovariens, que certains préconisent, ont une valeur prédictive beaucoup plus faible.
Le but principal est d’éviter des interventions même cœliochirurgicales pour kyste fonctionnel (environ 20 % dans les grandes séries). Le geste devrait être effectué dans un environnement chirurgical, des erreurs étant possibles dans l’appréciation de départ : ainsi, la mise en évidence d’un liquide de nature organique vraisemblable doit pouvoir être suivie immédiatement de la cœlioscopie, la patiente ayant été prévenue et préparée au plan préopératoire.
Des indications particulières peuvent relever de situations spécifiques ; les critères séméiologiques retenus peuvent alors souffrir des exceptions : liquide échogène dans le cadre d’une surveillance d’endométriose connue et traitée, cloisons multiples dans le cadre d’une dystrophie résiduelle iatrogène, échogénicité d’un kyste associé à la grossesse dont la nature prævia peut faire proposer la vidange pour permettre la voie basse avant d’envisager une chirurgie secondaire.
3) Ponctions évacuatrices de masses pelviennes :
De natures diverses, ces masses peuvent dans des cas rares être utilement abordées par voie échoguidée ; il peut s’agir de collections infectieuses purulentes, au cours d’une pelvipéritonite, la vidange, même partielle, pouvant avoir un effet bénéfique dans la première phase de thérapeutique médicale ; dans les suites de toute chirurgie pelvienne, des hématomes secondaires peuvent apparaître, facilement diagnostiqués par échographie vaginale (à préférer à la voie abdominale en raison de la distension gazeuse intestinale, hostile aux ultrasons), la ponction avec aiguille de calibre suffisant peut alors suffire, évitant une réintervention.
3. Surveillance clinique avant la sortie :
Les consignes de surveillance (température-douleurs-tension artérielle) permettront de ne pas méconnaître une complication iatrogène (lésions vasculaires, digestives ou urologiques, inflammation ou suppuration pelvienne). Selon le contexte, une surveillance clinique et échographique sera conseillée.