Délicates, elles doivent tenir compte de :
– l’âge, mais surtout de l’âge physiologique,
– l’importance des lésions,
– du degré de gêne fonctionnelle,
– du désir de grossesse,
– de l’activité sexuelle.
1. Abstention thérapeutique :
Elle peut être temporaire ou définitive. Ses causes sont essentiellement :
1) Insuffisance du prolapsus :
– prolapsus modéré découvert lors d’un examen systématique, sans gêne fonctionnelle importante.
– prolapsus modéré mais avec une gêne fonctionnelle importante. Il faudra alors rechercher une autre étiologie à cette gêne avant de débuter un traitement décevant pour la patiente.
2) Jeune âge de la patiente :
La découverte d’un prolapsus chez une femme jeune en l’absence de gêne trop importante, sans incontinence urinaire d’effort (IUE) associée, doit conduire à l’abstention thérapeutique du fait :
– de la récupération possible du plancher musculaire pelvien,
– du rôle néfaste joué par les accouchements ultérieurs,
– et de l’apparition de la ménopause.
3) Tares organiques :
Diabète, HTA, insuffisance coronarienne, insuffisance respiratoire, obésité, varices des membres inférieurs doivent inciter à la prudence.
C’est dans ces cas d’abstention chirurgicale qu’un traitement médical devient indispensable.
2. Chirurgie :
On peut schématiser les choix thérapeutiques :
1) Femme jeune :
Le facteur congénital prédomine, éventuellement aggravé par une ou plusieurs grossesses.
Doivent être impérativement opérés :
– les prolapsus de la vierge et de la nullipare,
– ” ” ” ” importants entraînant une gêne fonctionnelle,
– ” ” ” ” associés à une IUE.
Le désir éventuel de grossesse constitue une contre-indication relative.
a) Deux interventions de choix peuvent alors être proposées :
– intervention de Shirodkar pour les “vaginalistes”,
– isthmopexie postérieure au tissu prévertébral du promontoire pour les “abdominalistes”.
Une stérilisation par ligature des trompes (LDT) doit être associée chaque fois que possible.
b) Un certain nombre de gestes sont contre-indiqués chez le femme jeune :
– l’amputation sus-vaginale du col,
– une colpopérinéorraphie postérieure trop serrée,
– une ventrofixation,
– la triple intervention à la Française (Manchester).
c) Cas particuliers :
* Femme vierge ou nullipare jeune :
La douglassectomie type JAMAIN-LE TESSIER corrige les 3 anomalies congénitales :
– profondeur excessive du Douglas,
– rétroversion utérine,
– allongement du col par remise en tension des ligaments utéro-sacrés.
* Femme jeune en âge de procréation :
L’indication opératoire n’est posée que si les signes fonctionnelles sont vraiment insupportables et il faut toujours essayer de reporter l’intervention après la grossesse. Dans ce cas, c’est l’intervention de Shirodkar qu’il faut proposer :
– colpopérinéorraphie antérieure,
– pas d’amputation du col afin de ne pas compromettre les chances de grossesse,
– transposition antérieure des ligaments utéro-sacrés et mise en tension,
– fermeture particulière du Douglas par résection de celui-ci,
– pas de périnéorraphie postérieure pour ne pas rétrécir la vulve.
En cas d’accouchement, la voie basse est possible mais la césarienne est plus prudente.
* Jeune femme ne désirant plus de grossesse :
Le but est de préserver les rapports sexuels par l’opération de Manchester-Musset :
– colpopérinéorraphie antérieure,
– procédé de Shirodkar et amputation du col même si sa longueur est normale car son ablation crée un tissu fibreux renforçant par la suite les moyens de soutien de l’utérus,
– colpopérinéorraphie postérieure : veiller à n’enlever que très peu de muqueuse vaginale au niveau de la commissure postérieure de la vulve pour ne pas trop resserrer l’orifice vulvaire.
La stérilisation tubaire par voie basse doit être associée avant la ménopause.
Enfin la plicature sous urétrale type MARION-KELLY est à associer systématiquement pour Musset à titre préventif d’une IUE.
2) Femme aux alentours de la ménopause :
Les traumatismes obstétricaux interviennent ici de façon prépondérante.
La cystocèle est souvent la lésion dominante.
Les muscles releveurs sont souvent de mauvaise qualité.
a) Pour les abdominalistes :
L’intervention de choix est l’isthmo-fixation au promontoire associée à une prothèse sous-vésicale en cas de cystocèle importante.
Une périnéorraphie postérieure et un soutènement antérieur du col vésical sont fréquemment associés.
En cas d’utérus pathologique, une hystérectomie subtotale peut être pratiquée (elle est systématique pour certaines équipes).
b) Pour les vaginalistes :
2 interventions majeures peuvent être proposées à la patiente :
. la triple intervention périnéale (intervention de MANCHESTER),
. la colpohystérectomie vaginale de KASER.
Dans tous ces cas, une rééducation pré et post-opératoire est indispensable.
3) Prolapsus de la femme âgée :
La voie vaginale semble ici préférable à la voie abdominale, en raison des risques opératoires moindres (la voie vaginale est rapide et peu choquante).
Le type d’intervention doit être choisi en fonction de la vie sexuelle de la femme.
– si la patiente y a renoncé : l’intervention de choix est l’opération de ROUHIER,
– si la femme entretient toujours une vie sexuelle active : il faut réaliser une colpohystérectomie vaginale de KASER et procédé de CAMPBELL.
L’intervention de LEFORT qui a l’inconvénient d’emprisonner l’utérus au-dessus du cloisonnement vaginal doit être réservée aux patientes âgée, à risque chirurgical élevé.
4) Incontinence urinaire d’effort (IUE) :
Les grands types d’opérations utilisées :
– Soutènement sous-urétro-cervical (MARION-KELLY) réalisant une véritable périnéorraphie sous-urétro-cervicale,
– Suspension par fronde sous-urétro-cervicale (GOEBELL-STOCKEL,…) replacent le col en position normale et renforcent son soutènement postérieur,
– Suspension vaginale à effet de fronde sous-urétro-cervicale (MARSCHALL-MARCHETTI, SCALI) apportent elles aussi le double bénéfice de la suspension et de l’épaulement.
5) Prolapsus associé à des lésions utérines ou annexielles :
– Une lésion de petit volume autorise la voie basse,
– Une lésion volumineuse commande la voie haute, de même que la notion d’antécédents de pelvipéritonite ou d’endométriose grave dont les séquelles peuvent compliquer la chirurgie par voie basse.
6) Prolapsus après hystérectomie :
– Après hystérectomie totale : il s’agit d’une colpoptôse le plus souvent associée à une cystocèle. Leur cure est difficile.
Il faut réaliser une promonto-fixation du dôme vaginal refoulé, préalablement, par une grosse bougie de Hégar, une périnéorraphie postérieure et une fixation antérieure de type Marshall-Marchetti.
En effet, après hystérectomie totale, on ne peut plus se fonder sur l’appareil ligamentaire, d’où la nécessité, lorsque le maintien de la perméabilité du vagin est requis, de la mise en œuvre de techniques complexes de suspension par voie haute.
En revanche une colpectomie avec colpocléisis peut être entreprise chez les femmes âgées ayant renoncé à l’entretien d’une activité sexuelle. Le vagin procident est attiré hors de la vulve. La muqueuse qui tapisse ses faces antérieure et postérieure est extirpée, découvrant la vessie et le rectum. L’étendue de la colpectomie doit être adaptée à l’importance de chaque colpocèle car les ptôses vésicale et rectale ne sont pas toujours du même degré, ce qui ne manque pas de rendre plus difficile l’accolement des deux surfaces cruentées. De plus l’exérèse vaginale ne doit pas être complète afin que les accolements finaux n’exercent pas d’attraction nocive sur le col vésical. A cet effet, deux techniques peuvent être employées :
. la limitation de la colpectomie aux deux tiers supérieurs du vagin laissant en place sa partie inférieure dont l’obliquité est restituée par une forte colpopérinéorraphie postérieure ;
. la constitution d’une gouttière sous-urétrale, après exérèse complète du vagin en avant et en arrière, à l’aide des tissus vaginaux latéraux attirés sur la ligne médiane, en arrière de l’urètre et en avant du périnée postérieur.
Ces techniques reposant sur le simple cloisonnement du vagin et l’accolement vésico-rectal sans suspension ligamentaire, toujours associées à des plicatures sous-urétrales, procurent d’excellents résultats dans cette indication très particulière.
Il faut toutefois conclure ce chapitre en insistant sur l’immense intérêt prophylactique de l’hystérectomie vaginale dans les lésions bénignes de l’utérus associées aux prolapsus potentiels, à la condition que l’exérèse de l’organe malade s’accompagne d’une reconstruction de la statique pelvienne analogue à celle employée dans les prolapsus constitués.
– Après une hystérectomie subtotale : la pratique des interventions principales décrites précédemment est modifiée seulement par l’impossibilité de retrouver et d’utiliser les ligaments ronds. Il est nécessaire dans tous les cas de procéder à l’ablation du col restant, dont la mise en œuvre demande quelques précautions particulières. Il est aventureux, en effet, d’entreprendre d’emblée le clivage entre la face antérieure du moignon cervical et la vessie ; il faut au contraire inciser le vagin et le péritoine postérieurs et par cette voie passer l’index en crochet autour du col restant pour mieux exposer la zone de dissection dangereuse.
La vessie est alors séparée du col sur le repère du doigt médian. La section de ses piliers, le refoulement latéral et l’incision du cul-de-sac vésico-cervical sont alors aisés.
La taille du moignon cervical est variable, mais son ablation permet habituellement de retrouver les deux ligaments utéro-sacrés. Les bords internes de ceux-ci sont adossés par plusieurs points solides. Leur extrémité antérieure est ensuite attachée, après croisement de la ligne médiane, à la profondeur de la tunique vaginale et des tissus disposés de part et d’autre de l’incision antérieure, au contact des branches ischiopubiennes, et non de la symphyse. Ce montage procure un soutien à la fois solide et harmonieux, sans attraction antérieure excessive.
Comme précédemment, l’exérèse vaginale peut porter soit sur la totalité des tissus, avec colpocléisis, soit sur une surface variable de ceux-ci lorsque la perméabilité doit être préservée.
7) Prolapsus récidivés :
– Les récidives précoces essentiellement liées à des fautes techniques sont donc relativement prévisibles, et de ce fait évitables : abandon d’une béance du Douglas, d’un allongement du col, ignorance d’une rétroversion utérine.
Ces récidives se manifestent également sous forme d’hystérocèle ou de cystocèle, alors que la réfection périnéale postérieure a tenu.
Cette absence de lésion postérieure rend malaisée la reprise chirurgicale par voie basse mais non impossible.
– La récidive tardive, plurisegmentaire est souvent due à la seule déficience tissulaire.
La réparation est alors beaucoup plus aléatoire ⇒ intervention de soutien par promonto-fixation (HUGUIER).
8) Pathologie associée :
– fibromyome utérin : myomectomie et Manchester si la femme est jeune, ou hystérectomie totale et promonto-fixation,
– cancer du col ou du corps utérin : le traitement du cancer prime sur celui du prolapsus.
3. Prévention :
1) En obstétrique :
– pas d’efforts expulsifs avec une vessie pleine,
– pas d’expulsion prolongée,
– pas de forceps à la partie haute de l’excavation,
– pas d’hésitation à réaliser une épisiotomie.
2) En gynécologie :
Estrogénothérapie dès l’installation de la ménopause, après avoir éliminé les contre-indications, pour limiter l’involution des tissus.
3) En chirurgie :
Le prolapsus de la voûte vaginale après hystérectomie sera évité en fixant la voûte aux ligaments utéro-sacrés et aux ligaments cardinaux.
On ne fera plus d’hystéropexie au promontoire ou de ligamentopexies isolées.
4. Conclusion :
La correction chirurgicale des prolapsus génitaux doit être simple, atraumatique et sans danger.
Elle doit en outre être complète et adaptée pour supprimer chacun des éléments de la procidence, sans en négliger aucun, quel qu’en soit le degré.
La voie vaginale procure toutes ces possibilités dans la grande majorité des cas, à la condition d’une conduite rigoureuse et d’une indication judicieuse.